La rédaction de Zoomtchad avait consacré un dossier sur l’affaire du prêt de 1,45 milliards de dollars accordé en 2014, par la Société Glencore aux autorités tchadiennes pour racheter la part de Esso -Chevron lorsque cette dernière avait exprimé la volonté de vendre ses parts.

Les autorités tchadiennes s’étaient faites rouler dans la farine car Glencore avait exigé d’être remboursée en pétrole. Et, c’est ainsi que Glencore avait réussi à mettre la main sur la vente de la totalité du pétrole de la Société des Hydrocarbures du Tchad (SHT) sans compter la vente de ses propres gisements dans le bassin de Doba.

La crise a duré plusieurs années et malgré de nombreuses négociations, le dossier n’a pas avancé d’un iota du fait de l’intransigeance de Glencore. La baisse du cours du baril a plongé le Tchad dans une situation critique, les salaires des fonctionnaires dans les secteurs névralgiques comme l’éducation, la santé n’étaient plus assurés. La France a intervenu auprès du FMI pour une aide budgétaire d’urgence. Mais, le FMI, après examen des conditions effarantes acceptées par le gouvernement de Deby dans le cadre de l’attribution du prêt par Glencore, a exigé un accord avec Glencore avant toute aide dans la mesure où les taux d’intérêt du prêt étaient trop élevés et le Tchad ne pouvait avoir aucune marge budgétaire.

Ce blocage a valu à M. Christian Diguimbaye de perdre son poste de ministre des finances,  Idriss Deby lui reprochant de n’avoir pas réussi à accomplir un miracle.

 

L’entrée en jeu du Qatar : il est important de révéler une information fondamentale dans cette affaire:

Le Qatar est l’actionnaire principal de Glencore à travers son fonds d’investissement.  Autre élément à prendre en considération, c’est la crise entre l’Arabie Saoudite et le Qatar. Rappelons que, dans cette tension diplomatique entre les deux pays,  le Tchad avait pris fait et cause pour l’Arabie Saoudite. Idriss Deby a rappelé son ambassadeur au Qatar en juin 2017 et fermé l’ambassade en août 2017.

Non seulement Idriss Deby avait pris position contre le Qatar mais avait proposé aux Saoudiens de jouer au courtier pour que le Niger, le Mali et la Mauritanie, eux aussi rompent avec le Qatar. Aujourd’hui, la diplomatie Qatarie est très active au Sahel, compte tenu de son implication en Libye, et, l’Arabie Saoudite l’avait bien compris en retournant les pays sahéliens contre le Qatar en vue d’affaiblir, voire créer des difficultés au soutienapporté aux fractions libyennes par le Qatar. En Libye, on avait déjà vu l’axe Khalifa Haftar – Idriss Deby se dessiner contre les islamistes libyens soutenus par le Qatar et appuyés par l’une des fractions des rebelles tchadiens installées en Libye.

Et voilà que face à cette situation politico-militaro- diplomatique avec des intérêts et des alliances croisées, Idriss Deby qui avait tourné le dos au Qatar, s’est retrouvé pieds et poings liés. Son sort, la situation économique du Tchad entre les mains du Qatar grâce à ses investissements judicieux pour le contrôle des grandes sociétés agissant dans le domaine du pétrole.

Les autorités Qataris ont abattu leur carte et expliqué très clairement les choses à Deby. Le Qatar, premier actionnaire de Glencore peut débloquer la situation. Mais son intervention se paie cash. Idriss Deby se doit de revoir en urgence sa position diplomatique, c’est ce qu’il fait en urgence. Le Tchad fait volte face, tourne le dos à l’Arabie Saoudite et reprend ses relations diplomatiques avec le Qatar et s’engage à convaincre ses amis de la sous-région de le suivre. C’est ainsi que Glencore a diminué les taux d’intérêt du prêt, compte tenu de la grave situation sociale avec des salaires non payés depuis de longs mois. Une période de deux années de grâce, 2018 et 2019, sont accordées de sorte qu’aucun remboursement n’ait lieu. Un allongement de 12 ans est aussi consenti pour permettre au Tchad de souffler et d’honorer ses engagements envers les fonctionnaires et autres. Ce qu’il faut comprendre c’est que la situation de crise n’est pas encore résolue, et quelque part, elle s’est compliquée avec désormais un nouveau jeu d’alliances forcées qui va se dérouler en Libye au moment où Khalifa Haftar, l’un des protagonistes de la crise libyenne, allié de Deby, âgé de 75 ans, est dans le coma, malade d’un cancer du poumon qui se généralise. Autrement dit, selon de nombreux observateurs, en Libye, le camp des islamistes actuellement  en position de force militairement, va se retrouver renforcé par la guerre de succession qui est, d’ores et déjà, déclenchée dans le camp de Haftar.

Rappelons que l’une des fractions de l’opposition armée tchadienne en Libye est dans le camp de ceux que le Qatar soutient. On aura compris pourquoi un curieux appel lancé par cinq Tchadiens a trouvé écho et fut même publié par l’édition en ligne du journal Le Monde Afrique. Cette initiative suscitée probablement par la DGSE qui contrôle et manipule, peu ou prou, toutes les activités des réfugiés politiques qui sont actifs politiquement, soit derrière  cette initiative financée par Idriss DEBY qui démontre que le renversement de la situation en Libye dérange au plus haut point les Occidentaux. Dans les milieux politiques au Tchad, proches du MPS, des infos ont fait état, avec optimisme, de la compétence de deux personnes proches du pouvoir, MM Abdoulaye Sabre et Hamid Tahar Nguilin dans les négociations avec Glencore. Aussi, comme on peut le constater à la lumière des faits, il n’en est rien du tout, et l’affaire du prêt consenti par Glencore est loin d’être terminée.

Elle a permis de voir le gâchis monumental du pouvoir MPS dans la gestion des revenus pétroliers et dans la dégradation totale de la situation financière du pays qui est loin, très loin d’être résolue, quand l’on sait que,  désormais, les Tchadiens ont affaire avec un Président à vie gérant le pays comme le faisait Bokassa.

La Rédaction de Zoomtchad.

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