Né le 19 juin 1942, Kadhafi, jeune Lieutenant dans l’armée libyenne, organise le 1er septembre 1969 un coup d’Etat contre le Roi Idriss Al Senoussi. Dès sa prise de pouvoir, Kadhafi s’attela à la libération totale de son pays de l’occupation et de l’influence pesante des puissances occidentales; en commençant par le démantèlement des bases militaires étrangères. Suivront des mesures d’ordre économique, commercial et diplomatique, notamment la nationalisation du pétrole, l’ouverture du pays aux Etats du bloc de l’Est, en particulier l’URSS, et l’établissement des relations avec tous les pays du Tiers -Monde.

 

Il transforme le régime et rêve d’un grand État arabe et prône dans son Livre vert, une Troisième Voie entre le capitalisme et le communisme. Son pouvoir connaîtra des mutations presque tous les 10 ans. Les années 80 seront marquées par la lancée de l’expansionnisme libyen, à travers le soutien à de nombreuses rébellions et à des actions terroristes. Cette politique d’expansionnisme l’entraînera au Tchad où il mènera sa première et unique guerre, engagera l’essentiel de ses forces et échouera. Il organisera l’attentat de Lockerbie en 1988 et celui du vol UTA en 1989. Les années 90 seront celles de la réconciliation avec l’Occident, il renoncera à soutenir le Terrorisme mais ira plus loin, en donnant les réseaux terroristes aux Occidentaux particulièrement aux Américains. En 2000, il indemnisera les familles des victimes des attentats et ce sera le retour en grâce sur la scène internationale. Après le 11 septembre, il collaborera avec les Américains pour lutter contre les réseaux islamistes et les pourchassera dans son pays. Dix ans après, les révoltes populaires seront portées par la branche islamiste qu’il croyait avoir décapité en Libye. Après 42 ans de règne sans partage, la chute et la mort de Kadhafi a entrainé, aujourd’hui, le chaos général en Libye et des graves conséquences dans les pays voisins.

 

Retour sur le parcours exceptionnel d’un homme qui a démontré tout au long de sa vie politique qu’il n’a jamais perdu le sens de ses intérêts, luttant par tous les moyens pour sa survie politique, sachant faire marche arrière, volte face, violant ses engagements, reniant ses théories, pactisant avec ses ennemis d’hier, lâchant et livrant à leurs ennemis ceux qu’il soutenait la veille. Un véritable monstre politique.

 

La Jamahiriya ou l’art de gouverner sans État dans un monde d’Etats.

 

Arrivé au pouvoir par un coup d’Etat militaire en 1969, il a mis en place un système sans équivalent au monde. La Libye n’a pas d’Etat. La Grande Jamahiriya est un système qui s’est forgé contre la notion d’Etat. Aux yeux de Kadhafi, après la colonisation par les Turcs puis les Italiens et les Britanniques, l’État est pour lui un instrument de l’étranger et ne peut symboliser l’intérêt général. On s’attendait à ce que le leader qu’il était, utilise l’appareil d’Etat comme instrument de préservation de son pouvoir et de réalisation de sa politique. Que non ! L’Etat, pour lui, était un instrument d’exploitation dont il fallait se méfier à tout prix. Il décida donc de gouverner sans État dans un monde d’Etats.

 

Dans cette logique, il avait interdit la formation de partis politiques et toute activité issue de la société civile en dehors des confréries religieuses musulmanes. Assez tôt, après sa prise de pouvoir, Kadhafi s’est démarqué des systèmes idéologiques traditionnels. Il inventa sa théorie de la « Troisième Voie » et son « Etat des Masses Populaires », idées traduites et expliquées dans son Livre Vert. En réalité, ce n’est rien d’autre qu’un ensemble de recettes théorisées visant la revitalisation et le renforcement des structures tribales traditionnelles, désormais dotées de moyens et pouvoirs nouveaux et embellies d’un vernis de modernisme particulièrement frappant dans le langage du livre et les modes de concertation indiqués. L’ Etat des Masses Populaires a également démantelé l’Armée libyenne aux structures classiques pour constituer, en lieu et place, de grandes unités à recrutement tribal, indépendantes les unes des autres, dirigées par des proches de Kadhafi, recevant les ordres directement de lui. Il va sans dire que, dans ce système, les grandes tribus arabes ont une place prépondérante tandis que les petites tribus arabes et non arabes sont négligées, voire purement et simplement oubliées. Kadhafi dirigeait le pays en s’appuyant sur quatre tribus dont, bien entendu, la sienne. C’est ainsi que ce sont les tribus et les clans familiaux qui recueillaient l’allégeance des Libyens. Ce système a laissé en rade les Berbères et les Toubous abandonnés à eux-mêmes, exclus des retombées des revenus pétroliers, vivotant dans un dénuement total. C’est d’ailleurs, cette discrimination qui explique que ces tribus furent parmi les premières et les plus engagées dans le soulèvement populaire anti Kadhafi. L’Etat des Masses proclamé par Kadhafi se signalait par la forte présence de comités révolutionnaires.

 

Dans cet Etat révolutionnaire, le peuple est son propre chef et il n’y avait pas de pouvoir parlementaire. Dans son Livre Vert, Kadhafi énonce : « Les parlements ont été une barrière légale entre les peuples et l’exercice de l’autorité. C’est une théorie obsolète et une expérience périmée. » Selon cette théorie, les citoyens libyens auraient le pouvoir grâce à tout un ensemble de congrès populaires et de comités. Le système mis en place assurait une surveillance totale des libyens à travers les comités populaires dotés de moyens de plus en plus sophistiqués, livrés par les entreprises occidentales. Pendant longtemps, les libyens ne pouvaient voyager librement, même les produits de consommation étaient présélectionnés avant d’être mis dans des établissements publics pour vente.

 

La Libye était devenue avec le boom pétrolier une société hydrocarbure comme on dit, les revenus pétroliers étaient distribués aux différents clans de la Jamahiriya sous la coupe du Guide Kadhafi. La rente pétrolière a permis à la population libyenne très peu nombreuse, à peine 6 millions de personnes d’avoir de nombreux avantages dans les domaines de l’éducation, de la santé, de l’eau, de l’électricité, tous ces services étaient obtenus à des prix quasi insignifiants. Kadhafi, sa famille et son clan avaient concentré entre leurs mains les abondantes ressources pétrolières qui ont servi à acheter généreusement toute opposition à leur règne mais aussi, à financer la répression. Les revenus pétroliers étaient en outre réinvestis dans le monde entier et l’élite formée dans les meilleures universités anglaises et américaines en assurait le placement financier et faisait fructifier cette manne financière colossale. C’est pourquoi l’image d’un Kadhafi, mettant en avant l’image d’un bédouin, plantant sa tente partout où il se rend et projetant ainsi la symbolique d’une certaine austérité est parfois trompeuse.. Kadhafi ne pouvait être qualifié de dirigeant qui jetait l’argent du pétrole par la fenêtre ou dans des éléphants blancs. Bien au contraire, il avait pleinement conscience du pouvoir extraordinaire que lui procurait l’argent du pétrole qui faisait courir le monde entier. Il l’utilisa à très bon escient, et s’assura ainsi les moyens de son arrogance et de sa politique nationale et internationale.

 

Kadhafi et l’Afrique Noire

 

Son intervention sur le Continent a connu aussi une mutation profonde. Si dans un premier temps, il s’est agit pour lui de financer toutes les rébellions en Afrique au nom de la Révolution et de la lutte contre l ’ impérialisme occidental, des chefs rebelles ou simples aventuriers, nombreux, furent ceux qui sont allés chercher les pétrodollars de la Jamahiriya pour tenter de déstabiliser leurs pays. Au sein de sa politique africaine, le Tchad occupe une position clé, tant sur le plan spatial que géopolitique. Le territoire tchadien est appréhendé côté libyen comme le « prolongement naturel » de la Libye, car il partage avec elle une aire culturelle et historique, du moins dans sa partie Nord. Le Tchad devait être la base d’une stratégie de constitution d’un bloc économique et militaire arabo- musulman qui fasse pendant au bloc pro -occidental. Il a tenté par son ingérence dans la crise tchadienne, de démontrer sa force militaire et financière mais aussi de donner corps à son expansionnisme politique en Afrique. Son ingérence et son soutien militaire à certains groupes politico-militaires tchadiens a été sans limite: pétrodollars sans compter, recrutements massifs, armements à volonté.

 

En Afrique et à travers la crise tchadienne, il a démontré sous mille formes, le pouvoir de l’Argent. Non seulement, il a attisé les divisions entre les hommes politiques mais il en a créé de toutes pièces, il s’y est aussi immiscé pour entraver, par sa diplomatie des mallettes bourrées d’argent, tout processus de règlements des conflits. Il a éliminé ceux qui ont compris ses dangereuses intentions. Partout en Afrique, il a mobilisé, grâce à son argent, des soutiens pour détruire le Tchad dirigé par le Président Habré. Au Nigeria, dans le Nord au Borno State, ses avions bombardiers ont trouvé des aéroports pour faire le plein de carburant, pour leurs missions de bombardements de la Capitale tchadienne. Aujourd’hui, ironie du sort, c’est cette région du Nord Nigeria qui est la base de Boko Haram, et, il a fallu que les Tchadiens aillent mourir pour la sauver.

Il est important de révéler que, dans sa rhétorique, Kadhafi l’Africain, qui déclare sa volonté de réaliser l’Unité Africaine, les États Unis d’Afrique, ce même Kadhafi n’a pas hésité pendant la guerre au Tchad, de provoquer une réunion de la Ligue arabe, qui, dans un communiqué officiel a appelé au soutien d’un pays arabe en danger. Il est utile de préciser cependant que c’est la Libye qui était l’agresseur du Tchad avec plus de 10 000 de ses hommes dans le territoire d’un pays voisin occupé par la force des armes. De nombreux régimes arabes ont répondu à l’appel de Kadhafi pour venir faire la guerre aux Tchadiens. On a vu ainsi des Mauritaniens, des Sahraouis, des Libanais de la milice de Walid Joumblatt, des Palestiniens, venir se battre aux côtés de leurs frères Libyens, agresseurs du Tchad. Dans cette guerre terrible que le peuple tchadien a mené, aucun pays africain n’a envoyé des soldats mourir au Tchad, malgré la position de certains pays arabes en soutien à Kadhafi. Aujourd’hui, ironie du sort, encore, ce sont les Tchadiens qui sont appelés au secours pour sauver des pays contre tantôt Boko Haram, tantôt les djihadistes.

Que constate t-on ? Les Africains ne se mobilisent jamais pour aider leurs frères mais se bousculent pour les éliminer, les détruire, les condamner à perpétuité. Ils sont toujours en position pour faire la guerre des autres mais absents pour mener les combats légitimes qui les interpellent.

Après sa lourde défaite au Tchad, Kadhafi a abandonné sa politique expansionniste et est devenu sage. Il a changé son fusil d’épaule et s’est lancé dans une politique d’expansionnisme économique. La création de l’Union Africaine lui a permis de se positionner en première ligne et d’assurer 70% du budget de fonctionnement. Les cotisations à l’ONU de nombreux pays africains étaient assurées par lui, de même que celles dues à la défunte Air Afrique.

Ses aides budgétaires pour boucler des fins de mois difficiles ne se comptaient plus sur le Continent africain. Des cadeaux de mallettes pleines de pétrodollars circulaient dans tous les sens et entre de nombreuses mains. On ne compte plus les catégories de personnes dans chaque pays africain, qui devenaient peu à peu redevables au Guide de la Jamahiriya qui, petit à petit, tissait sa toile sur le Continent.

Exit la Nation Arabe, Vive l’Afrique Noire dans laquelle toutes les folies étaient permises grâce à la diplomatie des mallettes. La conquête territoriale etait en marche avec des voyages où il mobilisait des centaines de 4×4 qui pénétraient dans les territoires africains, circulaient de village en village avec ses médias et ce jusqu’à la Capitale, au Palais présidentiel, où l’attendait le Chef de l’Etat du pays traversé dans tous les sens! Concernant les investissements, ils ont connu une évolution. Tout d’abord, il était question de donner des bourses pour des études en théologie, puis d’ouvrir des centres culturels islamiques. Ensuite, les questions de sécurité lors de ses visites l’ont préoccupé au plus haut point. Toutes les meilleures structures hôtelières étaient aux mains des sociétés françaises, ce qui le poussa à construire dans chaque pays, où il avait des visées précises un hôtel 5 étoiles, où ses hommes pouvaient s’y installer et lui poser sa tente dans le jardin en toute sécurité et faire en même temps du business avec cet investissement. Soulignons ici, que les Nations Unies et certains pays occidentaux demandaient que les conférences qui voyaient une participation financière de leurs pays, n’aient pas lieu dans les hôtels appartenant à la Holding de Kadhafi.

Il est important de signaler que l’influence grandissante de Kadhafi dans le pré-carré françafricain n’a pas causé de gros problèmes avec la France ; bien au contraire, la France était bien contente que les aides financières et budgétaires de Kadhafi apaisent les tensions sociales. Aussi, en parfaite entente, avec Kadhafi, elle lui concéda une aire d’influence dans sa zone francophone en posant, toutefois, des limites bien définies ; ne pas toucher aux richesses des sous-sols, (l’exploitation pétrolière a redoublé l’intérêt de Khadafi pour le Tchad. Trois sociétés tchado -libyennes ont été créées dans le domaine de l’exploration pétrolière mais n’ont pas pu travailler), ne plus demander la fermeture des bases militaires françaises, comme il le faisait régulièrement dans ses discours.

La coopération libyenne a mis en place deux instruments ; la LAFB (la Libyan arab foreign bank) qui se destinait à une prise de participations bancaires et la LAFICO qui est la holding d’investissements libyens qui avait pour mission de développer ses activités dans des secteurs très diversifiés comme le secteur agricole, le tourisme, la pêche, le transport, dans la construction de cités administratives, de villas résidentielles notamment dans le cadre de sa coopération au Mali, au Niger, etc. Il serait faux de dire que l’intérêt libyen mettait en avant le critère de l’islam pour agir car même si les pays majoritairement musulmans recevaient une aide importante parce qu’ils se situent le long de la ceinture saharienne et constituent donc une position politique et stratégique vitale pour la Libye, il n’en demeure pas moins que des pays comme l’Angola, l’Ethiopie, le Ghana, l’Ouganda ont été aussi des grands bénéficiaires de fonds libyens. Enfin, avant sa mort, Kadhafi a commencé à s’intéresser à l’acquisition de terres arables dans plusieurs pays. Au Tchad, des millions d’hectares ont été donnés à Kadhafi, au franc symbolique, par décret présidentiel d’Idriss Deby. D’autres projets comme l’acquisition d’un satellite de communications pour l’Afrique et celui consistant à vouloir soutenir la création d’une monnaie africaine et de pousser les pays africains à quitter la zone franc, projet révélé par la presse américaine pour expliquer l’engagement fou de la France représentée par Nicolas Sarkozy pour assassiner Kadhafi et détruire son régime.

De nombreux pays africains ont signé toutes sortes d’accords avec lui dont on ne connaît pas la teneur exacte. La doctrine libyenne en matière d’investissement met en avant la volonté de rompre la dépendance du Sud à l’égard des marchés financiers internationaux dominés par les puissances occidentales. La stratégie libyenne est donc double d’une part, substituer le capital libyen arabe à l’aide occidentale, et d’autre part, rechercher une bonne rentabilité financière. La constitution de sociétés mixtes se fait toujours avec une prédominance libyenne de l’ordre de 60%, ce qui permet à la Libye de jouir ainsi de la majorité absolue et donc d ‘un droit de gestion et de contrôle quasi souverain.

En examinant sa démarche dans la conduite de la coopération, on constate que la Jamahiriya est très active dans la relation bilatérale et très réservée dans la coopération multilatérale. Il est vrai que ce cadre a des contraintes et dans sa logique de pays avec une puissance financière importante, elle souhaite profiter de cette position dominante pour s’imposer à des pays pauvres, vulnérables et avec un pouvoir de négociations quasi inexistant.

Notons toutefois, que des initiatives favorables aux pays africains ont été remarquées lors des rencontres de la coopération afro-arabe. Ce fut le cas lors du choc pétrolier en 1973, il a proposé que des prix préférentiels soient fixés aux pays africains pour l’achat du pétrole. Ou encore, quand il soutint le Président Julius Nyerere qui demanda en 1977, une aide exceptionnelle de 2,2 milliards de dollars à la coopération arabe. Kadhafi améliorait ainsi sa côte de popularité par ses prises de position qui faisaient, par ailleurs, grincer les dents de ses frères arabes lesquels avaient pleinement conscience qu’il cherchait à les écarter en les mettant à mal avec les pays africains. Même si la Libye a pu capter, en quelque sorte, l’euphorie du rapprochement arabo-africain, pour le réinvestir dans ses relations bilatérales, on voit que la gestion, dans le long terme, lui a posé des problèmes dans la mesure où le fonctionnement de certaines sociétés libyennes a été lié aux fluctuations des relations politiques. En RCA sous Bokassa, et au Sénégal sous Diouf, dés que le capital confiance constitué par un activisme parfois débordant, était remis en cause, automatiquement les activités des sociétés étaient suspendues en même temps que les accords de coopération mis en souffrance.

Il avait sa lecture personnelle, spécifique et spécieuse de l’histoire des relations de la Oumma arabe avec les peuples noirs. Néanmoins, officiellement, c’est au nom de la liberté, de l’indépendance, de l’amitié arabo-africaine, de l’unité africaine et du développement du Continent qu’il agissait. Ses visites officielles en pays sahéliens sont invariablement marquées par une gigantesque cérémonie de prière collective présidée par le « Guide » lui-même, en qualité d’Imam pour la circonstance, bien que les traditions islamiques interdisent à tout étranger de passage ou en visite dans un pays, d’exercer cette fonction éminemment symbolique. Kadhafi tient beaucoup à ce rituel qui prend sous son magistère, l’allure d’un acte d’allégeance. Lors de sa visite au Sénégal, il a voulu se rendre à Touba et présider la prière. Le Khalife Général des Mourides s’y était opposé. Il faut préciser qu’il n’a jamais tenté de faire la même chose dans un pays arabe et n’aurait, d’ailleurs, pas pu le faire. Il s’adonne ainsi lors de ses visites, à des séances de conversion à l’Islam de personnes chrétiennes ou animistes moyennant finances! Quand il a été question d’indemniser les victimes des bombes placées dans les avions par ses services secrets et qui ont explosé à Lockerbie et au Niger pour le vol d’UTA, il a accepté de payer pour les victimes européennes et américaines 10 millions de dollars par personne mais ne donna que 1 million de dollars pour les victimes africaines. Les relations du Guide libyen avec ses homologues subsahariens, sont marquées du sceau de l’appât du gain et/ou de la crainte des menées déstabilisatrices, armes diplomatiques auxquelles le leader libyen a recours sans états d’âme.

A vrai dire, très peu, de ses « amis » Chefs d’Etat africains ont vraiment confiance en lui, prennent réellement au sérieux ses plaidoyers et ses initiatives en faveur de l’unité africaine, la grande obsession des dernières années de celui qui s’est fait introniser, à coût de milliards de FCFA, « Roi des Rois ». Toutefois, à l’exception notable de quelques rares têtes d’entre eux – c’est le cas des Présidents Houphouët Boigny et Léopold Sédar Senghor pour qui, le dirigeant libyen est un personnage infréquentable – les Chefs d’Etat subsahariens étaient d’une grande disponibilité et d’une sollicitude affichée dans leurs relations avec le Guide libyen. Victimes consentantes de la diplomatie du dollar dont Kadhafi est l’expert sans égal. Autrement dit, la générosité et les largesses légendaires de Kadhafi ont un lourd prix. Par ailleurs et en général, le « Guide » jouit, de la part de la jeunesse africaine en particulier, d’une popularité incontestable en Afrique Subsaharienne en raison du souvenir vivace de son engagement aux côtés des mouvements de libération nationale africains, de ses discours anti-impérialistes et de ses plaidoyers en faveur de l’unité africaine. Ni les crimes abominables de son armée au Tchad, massacrant, violant, enlevant, torturant, détruisant et pillant le pays, lesquels crimes de guerre et crimes contre l’humanité qui, malgré le fait qu’ils ont hanté la salle N°4 du Palais de justice lors du procès Habré, ont été ignoré et mis de côté par les magistrats françafricains des CAE. Ni ses pratiques discriminatoires confinant les libyens noirs (Toubou et autres) au rang d’espèces inférieures sans droits, totalement privés du bénéfice des retombées des revenus pétroliers, ni les traitements racistes, humiliants et inhumains réservés aux immigrés noirs n’ont jamais sérieusement entamé cette popularité. D’évidence, les Africains ont la mémoire courte et l’indignation si difficile!

Quid des relations de Kadhafi avec le monde arabe et les dirigeants occidentaux ? Ce sera l’objet de la chronique de la semaine prochaine.

Par Mme Fatimé Raymonne Habré.

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