La présence de l’Armée française dans le Borkou a quelque chose d’inconnu qui échappe aux habitants dans cette Province et même les interroge quand l’on sait visiblement que leur présence n’apporte rien à la Province du Borkou.

Pour les habitants, la présence d’une telle Armée coloniale qui n’a pas brillé par sa sympathie à la Province et à ses ressortissants aussi bien dans le passé de son histoire coloniale que dans son présent n’a pas de justification et cela mérite un questionnement.

Après la conquête coloniale dont les abus restent encore en mémoire (mariages forcés, tueries, humiliations de toutes sortes, effacements volontaires de l’histoire de tout un peuple …etc), est venue la période des luttes de libération où la France a participé aux côtés de ceux qui au nom d’une philosophie néocolonialiste et expansionniste ont voulu procéder à l’anéantissement de notre peuple et de son cheptel ;

La France qui, sciemment, par sa politique, a retardé l’émancipation de la Population de la Province en introduisant une politique culturelle séparée entre les régions du pays ;

La France qui, dans un passé récent a tenté la balkanisation du Pays avec la Libye et qui encore, récemment par sa voix autorisée, a exprimé son hostilité contre notre communauté Gorane (Toubou) en parlant de sa neutralisation.

De tout ce qui précède, est ce que la France pourrait prétendre à dire qu’elle est là pour le bien de la Province ?

Non, personne n’est dupe.

La présence de la France à Faya entre dans une stratégie militaire plus étendue, quadrillage de notre Pays avec l’objectif d’empêcher tout changement non consenti et au-delà vise un renversement des rapports entre la République Centrafricaine (RCA) et la Russie pour regagner une position perdue en Afrique centrale.

Quant au passif colonial, outre ce qui a été énuméré ci-haut, au plan économique et infrastructurel, la France toute son action se reposait sur l’utilisation de la main d’œuvre pénitentiaire et l’imposition des impôts forcés aux personnes et aux animaux. La collecte se faisait à travers une Armée spécialisée appelée Gardes nomades (Goumiers) dotés des moyens de monture adaptés (Dromadaires).

La mission de ces derniers éduqués pour la répression était d’aider et d’accompagner les Chefs de Cantons à recouvrer efficacement les impôts mais les aider aussi à s’imposer et asseoir leur autorité sur les sujets.

L’appréciation et la notation de ces chefs étaient fonction de la qualité de leurs missions des collectes et du respect du délai des versements de celles-ci.

La politique est la même en ce qui concerne la réquisition des dromadaires destinés au transport au profit des colons.

Il s’agissait en fait des opérations de réquisitions forcées de ces moyens de transport et de leurs propriétaires appelés « cowa » ou convois pour déplacer leurs biens entre la capitale et les zones reculées.

Au cours de ces longs voyages périlleux peu des dromadaires reviennent vivants et les maladies étaient nombreuses pour les personnes non habituées à ces corvées et au climat. Ces voyages étaient difficiles en ce sens que les zones de l’époque étaient humides et insupportables pour les personnes des zones sahariennes.

Il arrivait souvent que certains sujets désavouent l’autorité de leurs cantons et y quittaient pour aller vers d’autres afin de se protéger contre les réquisitions de leurs dromadaires. Surtout que les meilleurs étaient connus grâce aux collaborateurs goumiers. De même que ceux qui possédaient des grands troupeaux figuraient dans les registres mis à jour.

Il faut rappeler qu’un Chef de Canton pour sa bonne grâce auprès des colons, devait donner le nombre exact du bétail dont disposaient ses sujets. C’est pourquoi, cantons et goumiers veillaient sur la véracité du nombre donné en vue de l’imposition de l’impôt.

Pour les sujets, donner le nombre exact de ses animaux équivalait à payer plus d’impôts, tricher était un risque d’être dépouillés de tous leurs cheptels ou faire la prison, car les goumiers n’ont pas pitié et ils sont formés pour la répression.

Dotés pour leur déplacement des meilleurs dromadaires de monture, les goumiers sont capables de faire n’importe quelle mission dans ce désert, d’ailleurs leur recrutement se fait sur la base de leur passé de guerriers contre la présence coloniale appelés » cheradas » et ils sont aussi recrutés parmi les premiers  » appelés » de l’Armée tchadienne libérés après deux ans de services militaires.

Sur le plan culturel, le laisser pour compte des ressortissants de cette Province n’a été reconnu que trop tard quand le gouvernement tchadien et son allié français avaient signé un accord dit « Mission de la Réforme Administrative » (MRA) par laquelle quelques cadres moyens ont bénéficié d’une bourse de formation en France.

Au plan des infrastructures, le constat est amer et donne à réfléchir, tous les bâtiments publics ont été construits tout juste pour un confort limité par une main d’œuvre pénitentiaire avec des matériaux locaux (rôniers, diatomite etc..). Pour ainsi dire que pendant toute la période coloniale, la France s’est nourrie sur le dos du Tchad (les impôts, la main d’œuvre pénitentiaire etc.…).

Contrairement aux pays anglophones et lusophones, aucune infrastructure durable n’a été réalisée durant soixante années de colonisation et la France veut encore nous étouffer par son omniprésence, par des déplacements et des bivouacs, des visites des espaces terrestres et aériens non contrôlées.

Ce qui se passe au Mali et au Burkina Faso doit nous édifier et nous servir d’exemple et à plus de prudence.

Quand un ministre des Affaires étrangères français Jean Yves Le Drian, s’immisce dans les rapports entre des États souverains et les juge à leur place, il y a de quoi s’interroger sur son comportement.

La présence de l’ancien Chef d’État centrafricain au Tchad, les déclarations à l’emporte-pièce sur nos rapports avec nos pays amis prouvent que la France n’a pas encore digéré son départ de la RCA et l’hostilité contre sa politique par l’ensemble de la jeunesse francophone.

Qui sème récolte tôt ou tard.

À bon entendeur salut !

« Toubou Gorane Donza »

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