1. Introduction Ce document vient après celui du 21 août 2021, intitulé « Organisation, mobilisation, et formation des populations du Tchad ». Le document du 21 août 2021 présente les organigrammes des forces politiques en présence pendant les 100 premiers jours (3 mois) de la prise de pouvoir par le Conseil militaire de transition au Tchad (CMT) et puis pendant les 450 jours (15 mois) restants, considérant que la charte du CMT prévoit 18 mois de transition ; le document traite également de la mobilisation, et de la formation des populations dans leurs langues maternelles.

Le présent document intitulé « Scénario plausible d’une conférence nationale souveraine inclusive (SPCNSI) » est un projet d’organisation d’une conférence nationale souveraine inclusive basée sur les aspirations des populations du Tchad, populations qui ont connu la conquête coloniale, des massacres, des dictatures, des privations de toutes sortes pendant 121 ans, et qui veulent instaurer une paix durable permettant la reconstruction de leurs communautés.

Le Tchad est l’ensemble de territoires, de pays, et de plus d’une centaine de communautés négro-africaines des bassins du lac Tchad et du Charilogone, qui passèrent par des traités et des armes, sous la domination de la France à partir de 18921. Cet ensemble était constitué de protectorats et de territoires militaires de 1892 à 1919. Il devint colonie à part entière, intégrée à l’Afrique équatoriale française (AEF) en 1920. Sa participation à la Deuxième Guerre mondiale a un impact décisif sur son émancipation politique. Devenu une république autonome en 1958, il accéda à l’indépendance le 11 août 1960.

Le Tchad prit son envol à l’indépendance sous François Ngarta Tombalbaye, premier président du pays. Il entra dans l’Organisation des Nations Unies (ONU), et dans des institutions internationales d’Afrique et du monde, aux côtés des autres pays. Le coup d’état militaire du 13 avril 1975 qui tua le président Tombalbaye marqua le début des temps d’incertitudes. La situation sécuritaire, et économique du pays se détériora considérablement sous Félix Malloum Bendi (1975-1979). Elle s’empira avec des guerres civiles entrecoupées des conférences (4) de le Cornec Jacques. Histoire politique du Tchad de 1900 à 1962, 359 pages, Préface de Léo Hamon, Paris R. Pichon et R. Durand-Auzias. 1963. Page 31.

Réconciliation de Kano et de Lagos au Nigéria (29 août 1978 – 26 avril 1980) sous Lol Mohamed Shawna et Goukouni Weddeï. Elle fut marquée par des massacres de populations, et par la guerre avec la Libye au sujet de la bande d’Aouzou, sous Hissène Habré (octobre 1982- 10 novembre 1990). Elle s’assombrit pendant les 31 ans de dictature de Idriss Deby Itno (décembre 1990 – 18 avril 2021). Elle est loin de s’améliorer avec le coup d’état militaire du 19 avril 2021 de Mahamat Kaka Deby soutenu par la France et l’Union Africaine (UA). Tous les pouvoirs : législatif, judiciaire, exécutif, et militaire sont dans les mains de Mahamat Deby entouré de conseillers en majorité de son clan ! Des milliards de pétrodollars prirent des destinations inconnues de 2003 à 2021 ! Il n’y a plus de séparation des pouvoirs exécutif, législatif, et judiciaire depuis 31 ans ! Le pays est vraiment mal parti durant les 61ans de violences de toutes sortes et de tâtonnement, pour reprendre l’expression de l’agronome français René Dumont (1904-2001) au lendemain de l’indépendance des pays africains en 1960.

Pour avoir une paix durable, le projet de conférence nationale souveraine inclusive (CNSI) au Tchad, vise les objectifs suivants :

1) Faire signer un contrat social par les nombreuses communautés du pays pour un vivre-ensemble durable, et

2) Qu’elles s’entendent sur :

  1. a) une forme de l’état qui permet de vivre ensemble malgré leurs différences (ethnies et races, religions, géographie etc..) ;
  2. b) une constitution dans le cas d’un état unitaire, ou sur des constitutions dans le cas d’une fédération ou d’une confédération ;
  3. c) des institutions démocratiques (pouvoirs exécutif, législatif, judiciaire, et types d’administration centralisée ou décentralisée) ;
  4. d) des langues de travail et de culture ;
  5. e) des systèmes économiques, socio-culturels, et de sécurité sociale :

Vieillesse, handicapées, retraites

  1. f) des systèmes et des politiques d’éducation et des langues d’enseignement ;
  2. g) des systèmes et des politiques de santé et d’hygiène
  3. h) des systèmes et de politiques de sécurité : armée et police ;
  4. i) des systèmes de relations internationales
  5. j) des régimes domaniaux et fonciers
  6. k) des systèmes de citoyenneté et d’immigration ;
  7. l) des politiques de l’environnement et de changement climatique.
  8. Participation des populations à la Conférence nationale souveraine

Le tableau ci-dessous présente les populations du Tchad de 2018 dans les différentes régions du pays :

Population du Tchad par région selon le sexe en 2018 (scénario tendanciel)

Région Masculin Féminin Total Poids démographique
Batha 311 659 335 005 646 664 4,2
Borkou 69 048 60 227 129 275 0,8
Chari Baguirmi 391 301 397 325 788 626 5,2
Guéra 296 385 314 515 610 900 4,0
Hadjer Lamis 384 037 384 175 768 212 5,0
Kanem 228 332 236 148 464 480 3,0
Lac 300 412 295 656 596 068 3,9
Logone Occidental 466 567 494 936 961 503 6,3
Logone Oriental 526 529 555 875 1 082 404 7,1
Mandoul 421 906 445 196 867 102 5,7
Mayo Kebbi Est 511 684 556 191 1 067 875 7,0
Mayo Kebbi Ouest 380 577 405 367 785 944 5,2
Moyen Chari 406 023 412 236 818 259 5,4
Ouaddaï 482 105 515 152 997 257 6,5
Salamat 205 964 213 882 419 846 2,8
Tandjilé 441 734 485 058 926 792 6,1
Wadi Fira 338 900 363 776 702 676 4,6
N’Djaména 773 982 680 689 1 454 671 9,6
Bahr El Gazal 186 771 162 450 349 221 2,3
Ennedi Ouest 46 002 37 581 83 584 0,5
Sila 260 972 265 318 526 290 3,5
Tibesti 18 953 16 373 35 326 0,2
Ennedi Est 81 380 66 576 147 956 1,0

Les populations du Tchad sont estimées à 15 692 969 en 2019 comprenant 7 820 817 personnes de sexe masculin et 7 872 152 de sexe féminin. Elles passent à 16 244 513 en 2020 dont 8 103 402 de sexe masculin et 8 141 111 de sexe féminin. Elles atteindront à la fin de l’année 2021 un total de 17 076 969 dont 8 492 384 de sexe masculin et 8 588 583 de sexe féminin. Ces populations sont :

https://www.inseed.td/index.php/thematiques/statistique-demographique/population réparties dans 23 régions et dans la capitale Ndjamena. On peut estimer le nombre d’hommes et de femmes à l’âge de voter à environ 10 millions, répartis dans les 23 régions et la capitale. Leurs représentations à la CNSI sont basées sur les deux principes suivants : l’égalité et la justice ! Ces principes doivent s’appliquer à tous, sans exceptions aucunes !

Ils ne s’étaient pas appliqués à la conférence nationale de 1993, et ne semblent pas s’appliquer à celle de 2021 en préparation par le pouvoir militaire en place. Le CMT et son gouvernement établissent des quotas de délégués uniquement à partir des effectifs connus de l’armée, des fonctionnaires, des partis politiques et des associations professionnelles des secteurs publics et privés, qui représentent au maximum 20 pour cent de la population ; ils ne prennent pas en considération les 80 % qui sont des exploitants agricoles et des éleveurs sur qui repose la création des richesses dans le pays. Nous voici donc devant une grande injustice ! Ils sont pourtant les plus concernés par la CNSI qui débattra des questions de vivre-ensemble. D’aucuns disent qu’il s’agit des gens analphabètes qui ne savent rien et qui n’ont rien à dire à cette plateforme, parce qu’ils ne parlent ni le Français ni l’Arabe, les deux seules langues officielles du Tchad ! Ils sont pourtant sur leurs terres depuis des siècles parlant leurs langues ! D’autres disent qu’ils seront représentés par des députés ou par leurs chefs de canton ! Les députés sont hors mandat depuis 10 ans, et ne représentent plus personne sauf les membres de leurs partis. Les partis ont leurs membres, tout comme les syndicats et les associations et organisations professionnelles, tous des gens qui travaillent en ville ou dans des centres urbains ! Les chefs de cantons et de villages sont sous la coupe des partis politiques, notamment du MPS. Cette question d’exclusion des classes populaires ou rurales fut au centre des préoccupations de Paulo Freire pour la mobilisation des classes populaires au Brésil dans les années 1960 :

Partisans de l’exclusion des analphabètes – donc de la plus grande classe des classes populaires – les groupes de droite n’ont jamais caché leur hostilité à l’égard de toutes tentatives d’augmenter le nombre d’électeurs.

En effet, si la participation des masses alphabétisées modifiait déjà notablement le schéma des relations de pouvoir, qu’arriverait-il si l’on permettait la participation de toutes les classes populaires ? Pour les groupes de droite, la perte de leur privilège, et pour le peuple, le commencement d’une véritable démocratie ?3 Paulo Freire.

Paulo Freire, Conscientisation, Document de travail INODEP 1971, page 14

Que faire ? A la fin de l’année 2021, le Tchad aura 17 millions d’habitants dont 10 millions d’hommes et de femmes à l’âge de voter. Au total, 80 % des 10 millions de Tchadiens à l’âge de voter sont des exploitants agricoles et des éleveurs, soit 8 millions. Ils vivent dans des régions, circonscriptions électorales ou administratives, dans des gouvernorats, départements, sous-préfectures et cantons. Ils éliront leurs délégués et les enverront à la CNSI. Les 20 % des populations qui vivent dans les villes et dans les centres urbains, ou qui vivent à l’étranger, au nombre de 2 millions, travailleurs de l’État et des secteurs privés, et membres des associations enverront également leurs délégués à la CNSI. On déduit des quotas de délégués de la manière suivante : x y = 10 millions, où x est la variable « nombre de délégués à la CNSI », et y « les nombres d’habitants représentés par un délégué ».

Six = 1000, Y = 10 000 habitants : un délégué représente 10 000 habitants Si x = 2 000, Y = 5 000 Habitants : un délégué représente 5 000 habitants 80 % de 10 millions = 8 millions dans des zones rurales, soit 800 délégués sur 1 000, ou encore 1 600 délégués des zones rurales sur 2 000.

Conclusions Les populations tchadiennes ont souffert pendant 121 ans de la conquête et de la colonisation françaises, des guerres civiles, des dictatures et des privations de toutes sortes. Le coup d’état et la confiscation du pouvoir par les armes opérées par le général Mahamat Deby surviennent à la suite de la mort de son père au champ de mars le 19 avril 2021. Il s’est mis à la tête d’un Conseil militaire de transition (CMT), et s’est donné 18 mois pour le transfert du pouvoir aux civils. Il a mis en place un gouvernement de transition qu’il a chargé entre autres de l’organisation d’une Conférence nationale souveraine et inclusive (CNSI). Mais la gestion opaque de la transition et de la préparation peu transparente de la CNSI, cachent mal sa volonté de conserver le pouvoir pour plus longtemps, comme l’avait fait son père.

Si le général Mahamat Deby veut vraiment une transition transparente et une Conférence nationale souveraine inclusive sans accroc, il doit laisser à la Société civile la charge de recruter parmi des professionnels tchadiens de haut niveau et de bonne moralité un responsable du Comité d’organisation de la conférence nationale souveraine assisté d’un consultant international et d’une quinzaine de cadres tchadiens pour préparer et réaliser la dite CNSI. Les nombres de délégués des exploitants agricoles et des éleveurs à la CNSI doivent être proportionnels à Leurs nombres au sein des populations du pays. Une règle de trois simple permettant de déterminer les effectifs de délégués est présentée plus haut : 800 délégués sur 1 000, ou encore 1 600 délégués des régions rurales sur 2 000, dépendant du scénario qui sera considéré par le Comité d’organisation de la CNSI. A l’issue des travaux de la CNSI, un gouvernement de transition sera mis en place. Le gouvernement nommera une commission pour rédiger un projet de constitution qui sera soumis au référendum. Il organisera des élections municipales, législatives, et présidentielles.

DR BE-RAMMAJ MIARO-II A-102, rue de Lorimier Gatineau (Québec) J8Y 3E6 Canada WhatsApp : +1 819 743-1692 Courriel : brmiaro20@gmail.com

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