Depuis l’instauration de la transition, Mahamat et Abdelkerim Idriss Déby mènent une intense campagne diplomatique. Voici les détails de cette initiative.

Le 10 mai, Mahamat Idriss Déby a quitté N’Djamena pour Niamey, où il s’est entretenu dans la matinée avec le président Mohamed Bazoum. Le président du Conseil militaire de transition (CMT) était accompagné pour ce premier voyage officiel à l’étranger par son ministre de la Défense, Daoud Yaya Brahim, et par Mahamat Ismaïl Chaïbo. Tous deux sont des généraux et d’anciens fidèles du défunt maréchal Idriss Déby Itno (IDI). 

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Le chef de l’État nigérien était assisté de ses ministres Hassoumi Massaoudou (Affaires étrangères) et Alkassoum Indatou (Défense). Selon nos informations, Mahamat Idriss Déby et Mohamed Bazoum ont fait le point sur la situation sécuritaire au Tchad et le long de la frontière avec le Niger, région par laquelle étaient descendues les colonnes de rebelles du Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (FACT) au milieu du mois d’avril dernier.

Libye et G5 Sahel au menu

Après des combats dans le Kanem (ouest du Tchad), une partie des insurgés tchadiens avaient réussi à prendre la fuite vers le territoire nigérien. Le patron du CMT, en première ligne sur les questions militaires, a souligné auprès de Mohamed Bazoum la nécessité pour N’Djamena de coopérer avec Niamey, notamment en matière de renseignements, dans l’épineux dossier des groupes rebelles tchadiens présents à la frontière avec la Libye.

En outre, Bazoum est l’un des deux chefs d’État – avec le Mauritanien Mohamed Ould Ghazouani – chargés par le G5 Sahel de superviser la transition tchadienne. Mahamat Idriss Déby a d’ailleurs réitéré l’engagement de son pays de conserver son contingent au sein de la force conjointe sahélienne (notamment dans la zone dite des trois frontières) et de la mission des Nations unies au Mali (Minusma).

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Selon nos sources, le patron du CMT a tenu le même discours à N’Djamena – et à plusieurs reprises depuis sa prise de fonction – devant les chefs d’État de la sous-région, mais aussi face au Français Emmanuel Macron, ou encore avec le représentant spécial de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, le Tchadien Mahamat Saleh Annadif. Il a affirmé à chacun de ses interlocuteurs que le Tchad honorerait les engagements pris par Idriss Déby Itno en matière de lutte contre le terrorisme.

Abdelkerim Idriss Déby, un autre fils en tournée diplomatique avec le DG de l’ANS Kogri Ahmed.

Au-delà des questions purement sécuritaires, les nouvelles autorités de N’Djamena se sont lancées dans une campagne diplomatique afin de rassurer les chefs d’État africains influents au sujet de la transition en cours, de leur volonté d’organiser des élections libres et crédibles dans moins de dix-huit mois. Abdelkerim Idriss Déby, directeur de cabinet adjoint et demi-frère de Mahamat Idriss Déby, est à la manœuvre.

Ce diplômé de l’académie militaire de West Point, qui a travaillé au sein du ministère des Affaires étrangères avant de prendre les rênes de la présidence sous Idriss Déby Itno, a rencontré le Rwandais Paul Kagamé le 6 mai dernier, puis, le lendemain, le Congolais Denis Sassou Nguesso et le Camerounais Paul Biya (lequel entretenait d’excellents rapports avec IDI).

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Ces trois chefs d’État ne s’étaient pas rendus aux obsèques du maréchal le 23 avril et n’avaient pas pu y rencontrer Mahamat Idriss Déby, à l’inverse du Togolais Faure Gnassingbé, du Guinéen Alpha Condé, du Congolais Félix Tshisekedi, du Centrafricain Faustin-Archange Touadéra, du Malien Bah N’Daw, du Burkinabè Roch Marc Christian Kaboré et enfin, de Mohamed Bazoum et de Mohamed Ould Ghazouani.

Les chefs de la transition espéraient notamment obtenir le plus de soutiens possibles alors que l’Union africaine doit encore décider d’appliquer ou non à N’Djamena des sanctions pouvant aller jusqu’à la suspension de l’organisation panafricaine. Le Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l’UA se réunissait lundi 10 mai pour examiner les conclusions d’une mission envoyée au Tchad fin avril. Si certains pays d’Afrique australe souhaitaient l’application de sanctions, la majorité des membres du CPS semblait plus clémente.

Rassurer la banque africaine de développement

Un autre front, plus économique, est également ouvert pour les autorités de la transition et par le gouvernement dirigé par Albert Pahimi Padacké. Alors que la Banque africaine de développement (BAD) a suspendu temporairement ses activités à N’Djamena, le ministre de l’Économie Issa Doubragne a été chargé de rassurer le représentant de la BAD au Tchad, Ali Lamine Zéine. Le ministre des Finances, Tahir Hamid Nguilin fait, quant à lui, de même auprès des bailleurs tels que le FMI.

Tchadanthropus-tribune avec Jeune Afrique

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