Portrait – Martin Lappel est un enseignant spécialisé des élèves handicapés visuels. Il dirige le Centre des Ressources pour Jeunes Aveugles (CRJA). Ce jeune a perdu la vue dès l’âge de 3 ans et depuis lors, il a écarté ce handicap et a su tracer son chemin. Le portrait de celui qui s’est battu pour voir plus loin.

La varicelle lui a arraché la vue à fleur d’âge. Une maladie qui pourrait être évité ou soigné. Mais, bon, Martin ne veut pas perdre pas son temps à ressasser le passé. En cette fin de vacances, il n’a en tête que les préparatifs pour la rentrée scolaire. « Nous avons eu 7 bacheliers dont 4 avec mention l’année passée » se réjouit-il.

Le Centre des Ressources pour Jeunes Aveugles (CRJA) qu’il dirige depuis 2018 lui a sauvé la vie. En 1993, lorsqu’il perdit la vue, Martin, tout petit, vivait avec ses parents et 12 frères à Kebe, un petit village de la Tandjilé Est situé au sud du pays. Le papa militaire et la mère ménagère n’ont pas vu tout de suite l’importance pour un aveugle d’aller à l’école.

Mais c’est l’oncle paternel, juriste, qui lorsqu’il a appris l’existence du CRJA a fait venir l’enfant de 3 ans à N’Djamena pour l’inscrire dans ce centre qui forme les élèves en situation de handicap visuel. « C’est cet oncle qui m’a aidé et encouragé à aller loin dans mes études » reconnait-il.

Grâce à la bienveillance de son oncle, Martin s’acclimate plus facilement malgré son jeune âge. Martin se définit lui-même comme une personne extravertie et entretient toujours des bons rapports avec ses enseignants et camarades – « je fais confiance à tout le monde parce que je me dis que je n’ai pas la vue et la seule manière de mettre les gens en confiance avec moi-même, c’est de leur faire confiance et du coup je gagnais également la confiance de tous ceux qui m’entouraient ».

Il franchit avec brio tous les examens. Il obtient son bac littéraire en 2009 au lycée Sacré-Cœur. Il opte pour la sociologie et s’inscrit à l’institut la Francophonie où il obtient une licence en 2013. « J’aurais pu faire une école professionnelle d’enseignement mais j’ai préféré la sociologie car c’est une discipline polyvalente, qui s’occupe du social, des rapports humains » justifie-t-il.

En 2013, avec l’aide de ses parents, Martin s’inscrit à l’université Catholique de l’Afrique de l’Ouest au Burkina Faso pour se spécialiser en sociologie de l’éducation. « Une spécialité qui me permet de servir plus mes cadets qui sont dans la même situation que moi » souligne-t-il.

L’élève puis directeur du CRJA se bat aujourd’hui pour que les personnes aveugles surtout les plus petites à accéder à une éducation de qualité. Mais son Centre éprouve depuis quelques années, des difficultés d’ordre financières et matériels.

La situation des personnes handicapées reste très difficile même si Martin, reconnait que ces derniers temps, l’État a consenti des efforts à travers la création des directions qui s’occupent des personnes handicapées dans plusieurs ministères.

Membre de plusieurs associations qui militent pour le bien-être des déficients visuels, Martin plaide pour que l’Etat crée un centre professionnel pour former les handicapés qui n’ont pas eu la chance de suivre un cursus scolaire.

Le combat de Martin donne raison à Antoine de Saint-Exupéry lorsqu’il dit qu’ « On ne voit bien qu’avec le cœur. L’essentiel est invisible pour les yeux ».

Tchadinfos

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