Notre pays le Tchad vit un moment historique exceptionnel, pour donner suite au décès subit du Président Idriss Déby Itno, à la menace des groupes rebelles et à la nullité des dernières élections présidentielles.

Nous réitérons nos condoléances à la famille naturelle du feu Maréchal Idriss Déby Itno et aux familles de tous les tchadiens tombés sur les champs de batailles fratricides ces derniers jours et appelons au pardon mutuel en ce mois sacré de Ramadan. 

Nous saluons d’abord la sécurité relative assurée par les FDS nationales et les exhortons à poursuivre leur mission régalienne en conformité avec la Constitution.

Nous saluons la volonté manifeste des acteurs politiques et de la société civile d’aller résolument vers une solution concertée impliquant toutes les forces vives nationales.

Nous saluons et encourageons la position patriotique des responsables de la contestation armée en faveur d’un processus de transition issu d’un dialogue inclusif auquel ils sont disposés à apporter leurs contributions.

Nous saluons l’implication des courants de la diaspora tchadienne dans la recherche de solutions durables pour le Tchad.

Nous exhortons les autres acteurs civils restés silencieux, à savoir les religieux, la chefferie traditionnelle et les personnalités indépendantes, à sortir de leurs réserves pour s’impliquer dans l’impératif de sauver la nation de la menace d’un chaos éventuel.

Dans ces circonstances, quelles que soient les griefs et les fixations des uns et des autres, aucune solution durable et fiable de sortie de crise n’est possible sans la recherche d’un nouveau consensus national sur la gouvernance du Tchad, après celui de la CNC de 1993 qui avait jeté les bases du processus de démocratisation actuelle. 

Cependant, il y a des préalables incontournables, si l’on veut réellement éviter que le sang ne coule encore et que le chaos s’installe, avec les conséquences désastreuses pour toute la région sahélienne et centrale : 

  • Accepter qu’une ère historique est passée, avec ses hauts et ses bas, et qu’il faille dépasser ce qui pourrait être des motifs de déchirements ou des obstacles à un nouveau consensus politique national ;
  • Respecter la Constitution en vigueur, dans la première période d’intérim du pouvoir :

– Le Président de l’Assemblée assure provisoirement les fonctions de Chef de l’Etat ;

– La gestion des affaires courantes de l’administration publique sera assurée par les directeurs généraux et que toutes les activités reprennent dans un climat apaisé de sécurité ;

– Le Comité Militaire de Transition (CMT) soit remanié en Conseil National de Défense et de Sécurité et chargé de gérer toutes les questions sécuritaires, notamment la libre circulation des personnes et biens, la défense de l’intégrité territoriale et de l’Indépendance nationale, l’implication des éléments tchadiens dans les missions de maintien de la paix, l’intégration des éléments des ex-rebellions armées après la conclusion d’un cessez-le-feu irrévocable, la révision de la chaine de commandement militaire pour éviter le fractionnement des FDS dans les tendances tribales armées avec risques d’affrontements sanglants pour le pouvoir ;

– Le CMT remanié soit ouvert aux représentants des groupes armés acceptant d’intégrer définitivement un processus démocratique inclusif et l’abandon de l’option des armes ;

  • Sous l’égide du Président intérimaire et avec l’appui du CMT remanié, une équipe de personnalités hors de tout soupçon soit mise en place, avec pour mission d’organiser dans les meilleurs délais, une table-ronde de dialogue inclusif pour définir les modalités d’une transition aux normes et devant effectivement sortir le pays du cycle des violences et des contestations récurrentes.

4) A cette table-ronde inclusive participeront sans entrave et dans un esprit d’égalité citoyenne et de respect mutuel de la différence positive :

– Le cadre de dialogue politique actuel (CDP) ;

– Les partis exclus du processus précédent ;

– Les représentants des groupes armés contestataires ;

– Les représentants des diversités de la société civile militante (adh, syndicats, réseaux des jeunes, y compris des diplômés sans emploi, etc.), les responsables des presses, les personnalités indépendantes de référence (anciens grands commis de l’État, sages) ;

– Les représentants des FDS ;

– Les réseaux actifs de la diaspora tchadienne ;

– Les représentants des cultes et de la chefferie traditionnelle ;

– Autres ( ?)

  • Les participants à cette table-ronde inclusives doivent être dûment mandatés ou reconnus dans leurs rôles, pour éviter une rencontre folklorique coûteuse, à la recherche des positionnements individuels ;
  • La table-ronde inclusive doit être limitée dans son ordre du jour et sa durée :

– aux questions qui n’avaient pas fait l’objet d’un vrai consensus dans les rendez-vous passés ou qui avaient été remises en cause unilatéralement dans le glissement vers la personnalisation et la patrimonialisation du pouvoir d’État ;

– à la définition des organes d’une transition consensuelle de courte durée, consignés dans une charte de transition ;

– à la fixation de la durée de ladite transition et des prochaines élections générales pour la normalisation totale et définitive de la situation du Tchad ;

– à la désignation consensuelle de l’organe exécutif devant superviser cette transition, sans subir un diktat étranger ou une pression de groupes détenant les armes ; 

– une session extraordinaire de l’actuelle assemblée nationale sera convoquée pour entériner cette charte de transition consensuelle issue du dialogue inclusif et mettre un terme, dans l’ordre et la sécurité, à la période flottante actuelle ; 

– ainsi, cette assemblée nationale, dont le mandat a été maintes fois prorogé, sera dissoute une bonne fois !

  • Il appartiendra aux organes de transition de toiletter le code électoral et de créer les conditions des élections incontestables, mettant un terme à toutes les formes de contestations violentes et récurrentes des institutions de la république.
  • Les organes de transition opteront pour, soit le retour à la Constitution de 1995 issue de la CNS, ou d’une nouvelle Constitution à soumettre à un référendum populaire ;
  • L’organe exécutif de la transition est le Gouvernement provisoire chargé de garantir et de mettre en œuvre les termes du nouveau consensus national, sans la frustration d’un courant, d’un groupe, d’une composante sociologique de la nation ;
  • Le Gouvernement de transition sera dirigé par un civil désigné par consensus Premier Ministre ?) et qui disposera, avec son équipe des pouvoirs les plus élargis pour mener à bon terme sa mission ;
  • Pendant la période de transition, les forces politiques et les acteurs sécuritaires se feront violence pour réserver leurs ambitions et projets propres aux élections et apporter leur ferme soutien à la réussite de cette transition dont ils se déclarent tous comptables ;
  • Le lobby sécuritaire français devra enfin accepter que le Tchad ne peut plus être considéré comme un réservoir de troupes de la coloniale, et il doit composer avec les forces vives de ce pays pour consolider les liens historiques et la coopération dans la lutte anti-terroriste sans l’individualiser, car c’est l’ensemble du peuple tchadien qui supporte ces sacrifices, depuis la réponse historique à l’appel du Général De Gaulle !
  • Le MPS et l’ex-majorité devrait plutôt s’impliquer dans une dynamique constructive de l’État de droit et d’un nouveau consensus national, tout en étant légitimement fidèle à la mémoire du feu MIDI ;
  • Les groupes de contestation armée devraient prendre en compte le traumatisme profond de la population tchadienne du fait de la loi des armes, avec les terribles conséquences sur le classement de notre chère patrie, saisir l’opportunité de cette période exceptionnelle pour contribuer sincèrement à une guérison collective, un apaisement et un désarment des esprits, car nous sommes tous d’accord sur les diagnostics, même si les divergences subsistent sur les appréciations (à cause de notre diversité nationale !) ;
  • Les acteurs influents de l’opinion devraient considérer que la sortie définitive de crise prime sur leurs ambitions personnelles de pouvoir car il faut que tous participent à la restauration, certes difficile mais pas impossible, des conditions consensuelles et durables de la bonne gouvernance du Tchad
  • Les malins esprits qui utilisent les réseaux sociaux pour diffuser des Fakes-news, dans le seul but d’augmenter la psychose de la population, devraient savoir que c’est une épée à double tranchant contre eux-mêmes, en plus d’être condamnable avec les conséquences déplorables sur les citoyens qui ne demandent qu’à vivre paisiblement et en sécurité !

Chers compatriotes, après avoir volontairement contribué en première ligne, au consensus de la Conférence Nationale Souveraine (CNS) de 1993, qui avait permis malgré tout à notre pays d’avancer à petits pas, et dans une préoccupation désintéressée, pacifique et patriotique, voilà notre modeste contribution citoyenne à la sortie de crise actuelle, pour le seul bien de notre chère patrie, le Tchad !

Cette contribution se voudrait, tout en prenant acte des derniers évènements, de faciliter les pistes objectives et acceptables de sortie de crise et d’inciter les principaux acteurs à dépasser leurs divergences et fixations actuelles, qui ne permettront pas au pays de s’en sortir sans casses fratricides et inutiles !

Plus jamais la violence et le sang ! Plus jamais les discriminations et frustrations entre tchadiens ! Pensons à nos enfants qui nous regardent ! Réveillons-nous et élevons le Tchad notre héritage commun éternel !

Fait à Ndjamena le 21 avril 2021

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