Communiqué du Collectif de solidarité avec les luttes sociales et politiques en Afrique,
Paris, le 22 avril 2021
Pendant 30 ans, Idriss Déby n’a jamais été « élu » correctement de manière démocratique. A la présidentielle de 1996, il a fraudé massivement en faisant substituer de nombreux procès-verbaux; en 2001, il a utilisé surtout les votes multiples pour s’imposer. En 2005, il a fait supprimer de la constitution la limite de deux mandats présidentiels. En 2006, le processus électoral était si peu valable qu’il a été boycotté. En 2008, il a fait assassiner le leader de l’opposition Ibni Oumar Mahamat Saleh, et, la présidentielle de 2011 a été de nouveau boycottée. En 2016, en corrigeant de nombreux procès-verbaux du premier tour, il s’est attribué un score fictif au-dessus de 50%, échappant à un second tour où il était presque sûr d’être vaincu par l’alliance de l’opposition et par Saleh Kebzabo, procédant ainsi à une inversion du résultat par suppression du second tour. Cette année, la présidentielle au processus électoral encore contesté en amont, a de nouveau été boycottée par les principaux partis d’opposition. Ainsi, Idriss Déby s’est maintenu au pouvoir par des élections non démocratiques pendant 30 ans. Il a réprimé la liberté de la presse et interdit toutes les manifestations dans la rue. Par son obstination à conserver le pouvoir de cette manière, il a fourni la motivation à l’origine, à partir des années 2000, de la multiplication des rébellions, composées d’hommes qui considéraient que les processus électoraux n’étaient pas crédibles et qu’aucune alternance n’était possible.
Après la mort de son père, le 20 avril, le fils d’Idriss Déby, Mahamat Idriss Déby, a suspendu la constitution de 2018 et installé au pouvoir un Conseil militaire de transition composé de 15 officiers de haut-rang. La constitution dans son article 81, prévoit que le pouvoir doit revenir au « Président de l’Assemblée Nationale et, en cas d’empêchement de ce dernier, par le 1er Vice-président » et une élection entre 45 et 90 jours après la vacance. Il s’agit donc d’un coup d’Etat militaire. Ce coup d’Etat, rapidement accepté par l’Elysée, fait craindre une fausse transition aboutissant à un processus électoral non démocratique à son issue. Une succession de type dynastique comme au Togo en 2005 ou au Gabon en 2009 est ainsi à craindre.
Le Collectif de Solidarité avec les Luttes Sociales et Politiques en Afrique rappelle que l’élection des 10 et 11 avril 2021 était boycottée et qu’elle n’avait pas plus de valeur démocratique que les précédents scrutins présidentiels du Tchad.
Le Collectif de Solidarité avec les Luttes Sociales et Politiques en Afrique condamne le coup d’Etat militaire du 20 avril 2021 et soutient tous les appels des opposants politiques et de la société civile pour le respect de la constitution.
Le Collectif de Solidarité avec les Luttes Sociales et Politiques en Afrique demande au gouvernement français et au Service européen pour l’action extérieure d’employer leurs moyens diplomatiques pour garantir la sécurité des militants des partis d’opposition et de la société civile, et pour aider à la mise en œuvre d’une véritable transition vers la démocratie au Tchad, qui permette des processus électoraux incontestables, issus d’un dialogue inclusif, garantis par une commission électorale acceptée par l’opposition et par de l’observation internationale crédible.
Collectif de solidarité avec les luttes sociales et politiques en Afrique

6 signataires : Union nationale pour le développement et le renouveau (UNDR, Tchad), Alliance Nationale pour le Changement Ile-de-France (ANC-IDF, Togo), Alliance républicaine pour le développement (ARD) Amicale panafricaine, Parti de Gauche, Europe Écologie les Verts (EELV).

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