COORDINATION DES PARTIS POLITIQUES POUR LA DEFENSE DE LA CONSTITUTION

(CPDC)

POINT DE PRESSE SUR LA SITUATION FINANCIERE ET SES CONSEQUENCES SUR LE PLAN SOCIAL : LE TCHAD SOUS LE REGIME DU MPS : LA FAILLITE D’UN ETAT

Présenté par GALI NGOTHE GATTA, Porte-parole

N’Djamena, le 13 octobre 2016

 

Mesdames et Messieurs les Représentants de la presse nationale et internationale,

Chers camarades représentants des partis politiques et des organisations de la société civile,

Je voudrais tout d’abord vous remercier, au nom de tous les partis politiques membres de la Coordination des Partis politiques pour la Défense de la Constitution (CPDC), d’avoir pris de votre temps pour honorer de votre présence ce point de presse qui porte sur cette situation cauchemardesque que vit l’ensemble de la population tchadienne.

Tout a été dit de la situation financière et sociale actuelle. Mais les manques de conclusions nous auront privés de décisions pratiques. C’est pourquoi nous devons revoir certains sujets abordés.

Nous commencerons par le pétrole dont les recettes couvrent 73% des dépenses de l’Etat.

1-En tant sources de revenus, nous ignorons totalement nos exportations depuis 2013, année du début de la baisse du cours du Brent et des gains subséquents. C’est lorsque mi-2014, ce prix de référence a chuté drastiquement jusqu’à atteindre 50 § le baril que notre gouvernement a commencé à s’inquiéter.

La gestion des flux financiers générés par notre pétrole est d’une telle opacité qu’a l’heure actuelle dite des « vaches maigres », nous ne savons pas quel est le montant résiduel qui échoit au Trésor, après que GLENCOR ait vendu notre production et encaissé son dû, en raison de tous les prêts que nous avons contractés auprès de ce géant mondial de Trader de matières premières. Il paraît que notre pétrole est gagé jusqu’à 20022-2025 ? Alors que plusieurs puits ont été mis en exploitation après 2014, qui sait combien nous rapporte notre pétrole aujourd’hui ? Ne devons-nous pas commencer par répondre à cette question ?

2-Et puisqu’il s’agit de recettes, le Gouvernement nous a-t-il informés sur les véritables ressources que nous procurent les douanes, les impôts, les domaines, les autres recettes administratives, sans oublier les structures parapubliques telles que l’OTRT, le FONAS, le BNF, l’ADAC, etc. ?

S’il faut optimiser les recettes, il y a impérieuse nécessité d’auditer et de maîtriser toutes les poches de recettes. Le népotisme qui fait des cousins chefs de bureaux, régisseurs, collecteurs des amendes arrondissements doit être corrigé.

3- Au niveau des dépenses, la crise actuelle n’est-elle pas l’opportunité de revoir toutes les structures et tous les postes qui ont été démultipliés à dessein pour justifier les dépenses déraisonnables ? ne faut-il pas revoir l’organigramme de la Présidence de la République, de la Primature, des ministères afin de supprimer les postes et les directions inutilement budgétivores ?

Quant à la structure gouvernementale, à la Conférence Nationale Souveraine, il avait été recommandé que notre pays pouvait très bien être gouverné avec seulement seize (16) ministères. Nous sommes actuellement à 40 membres du gouvernement.

La révision de la structure de l’administration territoriale pour un ajustement budgétaire et une efficacité technique supprimerait cette cohorte de gouvernorats, départements et sous-préfectures clientélistes.

Crise étant synonyme de mesures d’ajustement, la réduction des représentations diplomatiques et leur regroupement seraient tout indiquée.

Pourquoi le gouvernement n’a-t-il pas examiné toutes ces possibilités ?

4- Lorsqu’on examine les circuits des dépenses, il est curieux de constater que dès l’engagement jusqu’à l’émission des mandats et du visa « Vu bon à payer », ce sont les mêmes gens complices des surfacturations et des pourboires qui sont aux postes. Aucun paiement du Trésor ne s’effectue sans les fameux 10% qui sont devenus le fifty-fifty, c’est-à-dire 50% – 50%.

Toutes ces pratiques dolosives ont fait de notre pays une terre de grande corruption et de vie chère.

5- Quant aux bases légales des activités financières, c’est-à-dire le budget et le collectif, ce sont des chiffons de papier destinés à tromper les bailleurs de fonds internationaux et la population.

Depuis 2003, date des premiers revenus pétroliers, aucun budget n’a été exécuté conformément aux dispositions réglementaires. Aucune Loi de règlement n’a été présentée au parlement. La Gestion non orthodoxe de la Loi organique permet aux responsables politiques et financiers de « jongler, de jouer » avec la loi. La délinquance judiciaire développe ainsi l’impunité générale qui engendre à son tour toutes les malversations puisque personne n’a peur ni du gendarme, ni de la loi, démentant ainsi cet adage français selon lequel « la peur du gendarme, c’est le commencement de la sagesse ».

6- Ces remarques préliminaires nous permettent d’analyser les fameuses 16 mesures du gouvernement.

Premièrement, elles ne sont pas légales parce que non prévues par le Collectif budgétaire d’août 2016. Le budget est une loi organique. Il ne peut pas être tripoté comme une comptabilité de quincaillerie ! Et voilà que la session budgétaire est ouverte et le gouvernement veut faire un autre Collectif pour prendre en compte ces mesures, avec effets rétroactifs, oubliant qu’aucune loi n’est rétroactive. On n’adopte pas une loi aujourd’hui pour prendre en compte un  fait datant d’hier. Et puis, le bon sens voudrait qu’à un mois de l’adoption du budget 2017, que toutes ces mesures y soient intégrées, si judicieuses soient-elles ? Mais ces mesures sont financièrement insignifiantes. Tout calcul fait, les experts, disent qu’elles représentent une économie de 9 milliards de francs CFA sur un an, alors que le budget dans sa globalité est d’environ 1 200 milliards de francs CFA.

A-t-on songé à estimer le coût financier d’une année blanche, avec tous ses effets collatéraux ? que dira-t-on de la fermeture des hôpitaux et de l’administration ? Imagine-t-on qu’il peut y avoir recrudescence des braquages, et du phénomène de coupeurs de route du fait du non paiement des salaires des militaires et autres policiers ?

Deuxièmement, le gouvernement a transféré aux banques primaires sa méthode de mauvaise gestion. Il a demandé aux banques de payer à crédit les salaires. Certaines banques ont exécuté cette « demande obligée », payant 6 à 7 mois de salaires restés non remboursés. Lorsque quelques banques ont protesté, les Directeurs Généraux ont été menacés. C’est ainsi que le gouvernement s’est anormalement endetté vis-à-vis du système bancaire.

Aujourd’hui, l’Etat doit des dizaines de milliards aux banques primaires de la place. Si ce trou béant n’est pas renfloué par le gouvernement, il n’est pas possible que les fonctionnaires soient payés ; peut-être va-t-on recourir au système de billetage.

7- Nous sommes donc devant une catastrophe financière insoluble, sauf si le gouvernement gagne à la loterie ! Car, disent les spécialistes, notre endettement est hors normes, c’es-à-dire dépasse notre capacité de remboursement. D’aucuns disent qu’il faut 5 000 milliards au Tchad pour retrouver un niveau de fonctionnement normal, en tant qu’économie et Etat, c’est-à-dire pour pouvoir rembourser notre dette à court et moyen termes, et disposer des crédits de fonctionnement courant. Où trouver cette somme ? Nous avons emprunté partout et nous ne pouvons pas faire un 2ème tour !

8- Pour que notre pays puisse faire tourner son économie, juguler la crise financière actuelle et mettre fin à la tension sociale, il faut des réformes profondes et courageuses.

Pour le régime, prendre ces mesures de redressement, c’est scier la branche sur laquelle il est assis. Toucher aux privilèges des nantis, saisir les biens et les fortunes frauduleusement constitués sur le dos de la nation, auditer la gestion des structures et punir les gestionnaires indélicats. C’est tout simplement impossible ! Et pourtant, mettre les hommes qu’il faut à la place qu’il faut, c’est çà le balai de l’assainissement. Il doit passer là où l’intérêt général l’exige ; à commencer par la présidence de la République !! Ca semble être un rêve irréalisable avec le régime MPS.


Mesdames et Messieurs,

Chers camarades et amis,

Ce qui se passe à nos yeux, je veux parler de la situation du non respect des obligations financières de l’Etat, est le symptôme de ce que les spécialistes appellent un Etat failli. En effet, on définit les situations de fragilité lorsqu’un Etat a des "structures faibles ou défaillantes et des situations dans lesquelles le contrat social est rompu du fait de l’incapacité ou du refus de l’Etat d’assurer ses fonctions de base et d’assurer ses obligations et responsabilités en ce qui concerne la fourniture des services, la gestion des ressources, l’Etat de droit, l’égalité d’accès au pouvoir, la sécurité de la population, ainsi que la protection et la promotion des droits et libertés des citoyens ".

Faillite financière ! Comment tout cela est arrivé? Au commencement il y’a la mauvaise gestion. Le régime a mis aux postes de responsabilités des régies financières des pillards ou " personne qui vit sur des rapines, de butins " en amont, au cœur et en aval de l’économie nationale. Ils ont donc mis en faillite  les entreprises parapubliques, puis ont émigré aux finances publiques en prenant le contrôle des régies financières.

Toutes les institutions de l’Etat sont peuplées des hommes aux ordres pour tirer à hue et à dia sur les critiques, sur les opposants. Le régime se dote ainsi d’une élite à sa dévotion avec les moyens de la République. Ça s’appelle la corruption. Des reformes profondes en amont c’est çà le redressement du pays.

 

 

Mesdames et Messieurs,

Chers amis et camarades

Après cette brève description du cauchemar dans lequel IDI, le MPS et leurs alliés nous ont plongés, il est légitime de se demander s’il est possible d’en sortir et comment en sortir.

Les voies de sortie de crise, il faut en parler puisqu’en tant que patriotes, nous n’avons pas le droit de désespérer de notre pays : il s’agit certes de nous sortir nous-mêmes de la tragédie humanitaire qui s’est amorcée, mais il s’agit surtout de sauver ces jeunes générations désemparées, qu’on a déjà sacrifiées en abrogeant la disposition de la loi sur les revenus pétroliers qui prévoyait la constitution des fonds de réserve de 5%, à qui on vient d’assener un deuxième coup de massue en supprimant purement et simplement la bourse, une bourse déjà difficilement perceptible, et dont on vient par l’ensemble de ces mesures d’amorcer un processus de liquidation de leur pays, de leur nation.

Pout faire court, nous disons à la CPDC que la seule issue à cette dramatique impasse, c’est la tenue urgente d’un dialogue inclusif. Pas un nième ne dialogue, pour un nième accord, une nième désillusion. Il s’agit d’un forum où les principaux acteurs politiques et sociaux débattront et arrêteront les thérapeutiques de choc à même de relever l’Etat et le pays ; des mesures d’équité où ceux qui ont détourné, pillé et ruiné le pays doivent rendre des comptes.

Il va sans dire que les participants au dialogue n’épargneront pas le fonctionnement des institutions, ainsi que ceux qui les incarnent et qui ont précipité la nation dans cette ruine.

Cela est urgent, car le malade qu’est le Tchad doit être conduit au Pavillon des urgences, faute de quoi, le chaos qu’on voit déjà à travers ces scènes de rue, à travers ces courses-poursuites entre forces dites de l’ordre et les étudiants, va se répandre et rien ne sera à l’abri, parce que rien ne pourra l’arrêter !

Que Dieu Tout-puissant sauve le Tchad !

 

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