De plus en plus sollicités, les présidents africains ont formé un cordon autour d’eux pour mieux filtrer leurs audiences. Mais si leurs agendas relèvent désormais davantage du protocole, émissaires et lobbyistes de tout poil préfèrent approcher les missi dominici de ces chefs pour mieux contourner les voies officielles. Enquête dans trois "dynasties" d’Afrique centrale. 

Incontournable Accrombessi – 

A Libreville, le carnet des audiences présidentielles, autrefois géré par Pascaline Bongo, échoit entièrement à Maixent Accrombessi, le directeur de cabinet d’Ali Bongo. Surchargé de travail, celui-ci s’appuie sur le chef de cabinet, Liban Souleymane. Cette "légion étrangère", comme la surnomment les Gabonais (Accrombessi et Souleymane sont respectivement d’origine béninoise et somalienne), forme la tour de contrôle du Palais du bord de mer. Le duo coordonne tout. Au grand dam des hommes d’affaires et responsables politiques. Pour ne pas avoir observé ce passage obligé, le président de la commission anti-corruption, Vincent Lebondo Le-Mali, a failli voir une audience annulée en janvier, alors qu’il était accompagné du premier ministre, Raymond Ndong Sima. Peu de conseillers, à l’exception du Français Eric Chesnel, second secrétaire général adjoint du palais, qui a connu Ali Bongo jeune, peuvent approcher le chef de l’Etat sans en référer à son puissant "dircab". Toutefois, certains canaux permettent de tromper sa vigilance. La mère d’Ali, Patience Dabany, est parfois sollicitée par les parents tékés etobamba du président afin de faire passer des messages. Ceux-ci recourent également à l’oncle paternel Fidèle Andjoua. Chargé du protocole et de la sécurité, le général Alioune Ibaba constitue une autre porte d’entrée. Moins influente que sous Omar Bongo, la secrétaire générale du palais,Laure Olga Gondjout, demeure toutefois le contact privilégié des réseaux étrangers et des responsables de médias ayant connu l’ancien patriarche gabonais. 

Brazzaville en famille ! – 

Au Congo-B, mieux vaut connaître les membres du premier cercle familial de Denis Sassou Nguesso, à commencer par son épouse Antoinette, pour espérer un entretien rapide. Là où Sylvia Bongo exerce peu d’influence, la première dame congolaise représente un relais pour les opposants. Comme elle, la plupart sont originaires du Sud du pays. Patron du Conseil national de sécurité (CNS) et neveu du chef de l’Etat, Jean-Dominique Okemba s’avère également un précieux missi dominici, notamment pour les réseaux maçonniques. Le ministre délégué aux grands travaux, Jean-Jacques Bouya, cousin de Sassou, assure l’interface avec les hommes d’affaires. Il joue en duo avec le ministre des finances, Gilbert Ondongo. Du côté des enfants, Denis Christel Sassou Nguesso, DGA à la SNPC, ouvre les portes du palais du Plateau aux pétroliers et aux traders. Sa sœur Claudia, dite "Coco", responsable des relations publiques à la présidence, est le point d’ancrage des journalistes et des communicants. Julienne Sassou Johnson et Cendrine Ottonello, les deux autres filles de Sassou, usent de leur influence de femmes d’affaires pour introduire de nombreux lobbyistes.
 

Président sous influence à Malabo – 

Aux palais de Malabo et de Bata, les visiteurs ne désemplissent pas depuis que
 Teodoro Obiang Nguema a obtenu le statut de "grand argentier" d’Afrique centrale. Ce rôle autrefois endossé par Omar Bongo fait du président équato-guinéen, par ailleurs doyen des chefs d’Etat africains, l’un des plus prisés de la sous-région. Sans fonction officielle, son conseiller de l’ombre, le Libanais Hassan Hachem, demeure un point d’accès privilégié au chef, malgré un accident de la route l’ayant contraint, l’an dernier, à une longue convalescence. Reste que la première dame, Constancia Mangue Nsue de Obiang, gagne chaque jour en influence. Elle vient d’obtenir la nomination deTeodoro Biyogo Nsue Okomo, son frère "même père-même mère", à la tête du protocole d’Etat. A ce titre, il gère l’emploi du temps d’Obiang. Cette nomination souligne l’encerclement progressif de l’émir de Malabo par sa famille. 


La Lettre du Continent

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