15 mai 2023 #Afrique #Sénégal : Troisième mandat – la mission secrète de Barack Obama auprès de Macky Sall.
Selon les informations d’Africa Intelligence, l’ex-président des Etats-Unis Barack Obama s’est entretenu dans la plus grande confidentialité par téléphone avec le chef de l’Etat sénégalais pour évoquer l’élection présidentielle de février 2024. L’échange s’est tenu en étroite coordination avec l’administration Biden, au moment où le scénario d’un troisième mandat de Macky Sall se dessine chaque jour un peu plus. Révélations.
Alors que l’ancien président américain Barack Obama fait les gros titres de la presse people pour son escapade en compagnie de sa femme Michelle Obama et du réalisateur Steven Spielberg, à Barcelone, où ils ont assisté fin avril au concert de Bruce Springsteen, en coulisses, c’est un tout autre dossier, bien loin de la capitale catalane et des riffs du « Boss », qui mobilise l’ex-pensionnaire de la Maison blanche.
Africa Intelligence est en mesure de révéler que Barack Obama s’est entretenu dans le plus grand secret par téléphone, au mois d’avril, avec le chef de l’Etat sénégalais, Macky Sall. L’appel, qui s’est tenu à l’initiative de l’Américain, a duré un peu moins d’une heure. Au cœur des discussions : l’élection présidentielle sénégalaise qui doit se tenir au mois de février 2024. Durant l’entretien, le sujet du troisième mandat a été directement évoqué par Barack Obama. Ce dernier a fait part de sa préoccupation, ainsi que de celle de l’administration de Joe Biden, sur l’impact qu’aurait une nouvelle candidature du président sénégalais.
Relation particulière
L’appel téléphonique a été facilité par la relation personnelle qu’ont nouée les deux hommes au cours de la dernière décennie. En juin 2013, l’ancien locataire de la Maison blanche avait choisi le pays de la Teranga pour commencer sa première grande tournée africaine. L’ex-sénateur de l’Illinois avait effectué une étape très symbolique sur l’île de Gorée, haut lieu de mémoire de la traite des esclaves vers les Amériques. Une visite qui avait particulièrement marqué l’ex-First Lady Michelle Obama, dont la famille descend d’esclaves victimes du commerce triangulaire.
Ce séjour sénégalais avait largement contribué à rapprocher Barack Obama et Macky Sall. Encore aujourd’hui, le président sénégalais ne cache pas son « émotion » à l’évocation de cette entrevue. Un an après, le chef de l’Etat sénégalais avait par ailleurs été l’un des invités de marque du Sommet Etats-Unis-Afrique présidé par Obama en août 2014. S’ils ne sont pas pour autant intimes, les deux hommes ont gardé un canal de communication direct, et ce même après le départ d’Obama de la présidence, en janvier 2017.
Dans l’ombre de Joe Biden
Pour toutes ces raisons, Barack Obama offre aux yeux de l’administration Biden le profil idoine pour mener cette délicate mission de bons offices auprès de Macky Sall. L’échange du mois d’avril s’est ainsi tenu en étroite collaboration avec le secrétaire d’Etat, Antony Blinken, lui-même ancien collaborateur d’Obama à la Maison blanche, de 2013 à 2015. Celui-ci a déjà pu évoquer le sujet à plusieurs reprises avec Macky Sall depuis cet hiver.
Officiellement opposé aux troisièmes mandats sur le continent, Washington ne cache pas sa crainte quant aux desseins du président sénégalais pour l’élection de 2024, dans un climat social déjà tendu. Un sentiment amplifié par la place particulière que joue le Sénégal dans le dispositif africain de Washington : depuis le début des années 2000, le pays est devenu le principal allié des Etats-Unis en Afrique francophone, tant sur le plan diplomatique que militaire. Il est un passage obligé pour tous les secrétaires d’Etat, démocrates comme républicains. Une position favorisée par l’excellente image dont jouit jusqu’à maintenant Dakar outre-Atlantique : le Sénégal est régulièrement présenté comme une exception démocratique dans une Afrique francophone plus que jamais fragilisée par la question de l’alternance politique.
C’est la première fois depuis 2017 que Barack Obama sort de sa réserve pour s’impliquer directement dans un dossier international. Depuis son départ de la Maison blanche, l’ancien président américain avait honoré son souhait de se retirer de la vie politique. Outre Joe Biden et Antony Blinken, seule une poignée de collaborateurs de la Maison Blanche et du Département d’Etat ont été mis dans la confidence. Contactés, ni le cabinet de Barack Obama, ni le Département d’Etat n’ont souhaité commenter les informations d’Africa Intelligence.
Macron avant Obama
Avant Barack Obama, Emmanuel Macron s’était déjà employé à essayer de convaincre Macky Sall de renoncer à se représenter à un troisième mandat en 2024 (voir nos révélations). Lors d’un déjeuner de travail, le 31 janvier, à l’Elysée, le président français avait abordé le sujet sans détour. Entre les lignes, il avait mis l’accent sur les nombreuses possibilités de reconversion qui s’offraient au président sénégalais sur la scène internationale. Un message sensiblement similaire à celui transmis par Barack Obama, lui-même à la tête de sa propre fondation, The Obama Foundation, depuis qu’il a quitté le pouvoir.
De longue date, Paris et Washington voient dans le président sénégalais une figure à même d’incarner la lutte contre les troisièmes mandats en Afrique de l’Ouest. Un rôle aujourd’hui assumé presque exclusivement par l’ex-chef de l’Etat nigérien, Mahamadou Issoufou, ardent défenseur d’une limitation à deux mandats pour les pays de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et ce, alors que les projets de l’organisation régionale en ce sens sont plus que jamais fragilisés. Outre le sujet de la gouvernance, Washington et Paris souhaitent également pousser le chef de l’Etat sénégalais à s’impliquer – en cas de retrait de la vie politique sénégalaise – sur les sujets environnementaux à l’échelle du continent. Depuis fin 2022, hantées par le spectre des violentes manifestations de 2021 consécutives à l’arrestation de l’opposant Ousmane Sonko, Paris et Washington coordonnent étroitement leurs efforts de persuasion auprès de Macky Sall.
Candidature en préparation
Pour autant, le plaidoyer des diplomaties américaines et françaises n’a pour le moment eu que peu d’effets. A chacun de ses échanges avec Emmanuel Macron comme avec Barack Obama, Macky Sall est resté évasif sur ses intentions. Il a, à chaque fois, évoqué le délicat contexte régional, entre explosion de la menace djihadiste et émergence de juntes militaires. Une situation qui pousserait plusieurs de ses pairs de la Cedeao à vouloir le voir rempiler au nom de la « stabilité régionale », selon ses mots.
Depuis plusieurs semaines, une poignée de cadres de la majorité préparent discrètement la candidature de Macky Sall à un troisième mandat. Son parti de l’Alliance pour la République (APR) a d’ores et déjà organisé une série de meetings, et doit en tenir un ce 13 mai, à Paris, afin de mobiliser la diaspora. En coulisses, une partie de son premier cercle chuchote même désormais que le président sénégalais pourrait officialiser sa candidature avant la fin du mois de mai.
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