Alors que Paris va accueillir le 17 mai un sommet extraordinaire des chefs d’Etat des pays limitrophes du Nigeria, le Cameroun peine à endiguer l’extension des agissements de la secte Boko Haram sur son sol. Décryptage.

Passées inaperçues après l’enlèvement de près de 200 lycéennes le 14 avril au Nord-Est du Nigeria, deux attaques de Boko Haram ont ciblé coup sur coup le Cameroun. Dans la nuit du 4 au 5 mai, un commando surarmé a pris d’assaut le commissariat de Kousséri, ville jouxtant le fleuve Logone à la frontière du Tchad, pour y déloger l’un de ses membres incarcéré la veille. Le 9 mai, le même mouvement "islamo-satanique" dirigé parAbubakar Shekau s’en est pris à un commissariat de Maroua, capitale de l’Extrême-Nord. Cette région – qui abrite les départements du Logone-Chari, du Mayo-Tsanaga et du Mayo-Sava – apparaît désormais comme une zone de prédilection pour les cellules dormantes de la secte. Elle représente également son principal couloir d’approvisionnement en armes venues du Soudan et du nord de la Centrafrique. 

Après avoir longtemps maintenu une situation de "non guerre", estimant ne pas être concerné par l’activisme de ce mouvement, Paul Biya a désigné son ministre de la défense, Edgar Alain Mebe Ngo’o, ainsi que le chef d’état-major des armées, le général René Claude Meka, pour conduire des opérations sur le terrain. Plusieurs centaines d’éléments venus de Yaoundé ont été acheminés à Kousséri. Des dizaines de suspects ont alors été interpellés – souvent violemment – et emmenés vers d’autres prisons du pays, celle de Kousséri étant trop exiguë pour les accueillir. 
 


L’armée camerounaise a par ailleurs renforcé son dispositif aux frontières dites sensibles. En revanche, aucune cellule spéciale n’a été créée à la présidence ou à la primature pour gérer spécifiquement ce dossier. La riposte du palais d’Etoudi est sujette à caution. Les habitants de la zone se confondant d’un côté comme de l’autre de la frontière nigériane, il est difficile d’identifier clairement des membres ou des complices de Boko Haram. En outre, ces mêmes populations, majoritairement désœuvrées, ne se risquent pas à informer les forces de sécurité de peur de représailles. Il est par ailleurs avéré que la secte fait tourner l’économie locale, notamment par l’achat du zoua-zoua, essence nigériane issue de la contrebande.

La Lettre du Continent.

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