Sa candidature rejetée par la Cour constitutionnelle, François Bozizé a vu ses rêves de reconquête du fauteuil présidentiel s’évanouir. Il compte bien cependant peser sur les débats et a annoncé soutenir un autre opposant : Anicet-Georges Dologuélé.
 
Chacun se posait la question depuis le 3 décembre, date à laquelle la Cour constitutionnelle avait invalidé sa candidature à l’élection présidentielle, qu’allait faire François Bozizé ? Son parti, le Kwa Na Kwa (KNK) a levé le voile ce 16 décembre : l’ancien président a décidé de soutenir officiellement Anicet-Georges Dologuélé.
Selon le KNK, Bozizé et le patron de l’Union pour le renouveau centrafricain (Urca) se sont accordés, lors d’une rencontre à Bossangoa, « sur une alliance en vue du scrutin présidentiel du 27 décembre ». « Le KNK soutient la candidature du leader de l’Urca et appelle donc ses militants à se mobiliser pour faire élire l’ancien Premier ministre », ajoute le parti.

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La veille, le 15 décembre, François Bozizé n’avait pas souhaité soutenir un candidat de la Coalition de l’opposition démocratique (COD-2020, qu’il préside) plutôt qu’un autre. Il avait appelé les « présidentiables de la COD-2020 » à désigner « un candidat unique de consensus », lequel disposerait « de la base électorale la plus étendue et de moyens financiers conséquents ».

Dologuélé numéro un, Bozizé faiseur de rois.

Mais sa proposition n’avait pas séduit outre mesure au sein de la coalition, dont les principaux candidats – Anicet-Georges Dologuélé, Nicolas Tiangaye, Mahamat Kamoun, Karim Meckassoua ou Alexandre Ferdinand Nguendet -, sont décidés à s’engager chacun de leur côté dans la bataille du premier tour.
 
« Nous nous étions mis d’accord, lorsque Bozizé était encore candidat, pour ne nous rassembler complètement qu’au second tour, expliquait ainsi un lieutenant de la COD-2020. Maintenant qu’il est hors course, il veut changer la règle. Mais ce qui l’intéresse, c’est de reprendre la main et de pouvoir dire que notre candidat aura été élu grâce à lui. »
 
Devant le peu de chances de voir aboutir sa demande de candidature unique, François Bozizé a donc choisi de soutenir celui qui faisait selon lui figure de favori au sein de la coalition, à savoir Anicet-Georges Dologuélé, qui avait échoué au second tour de la dernière présidentielle, en 2016. « Faustin-Archange Touadéra fait le forcing pour être réélu au premier tour. Nous avons intérêt à ne pas disperser les forces de l’opposition pour pouvoir lutter efficacement contre les tentatives de fraude », confie-t-on au KNK.
 
De plus, Anicet-Georges Dologuélé n’avait pas ménagé ses efforts depuis le retour à Bangui de l’ancien président centrafricain. Il était en effet convaincu qu’une alliance avec le patron du KNK ferait de lui le favori face à Faustin-Archange Touadéra. « C’est du gagnant-gagnant : Dologuélé gagne l’appui du KNK et de Bozizé, essentiel dans l’Ouham, ce qui fait de lui le poids lourd incontesté de l’opposition. Quant à Bozizé, il se place en potentiel faiseur de rois et en tombeur de Touadéra », analyse un membre de la COD-2020.
Médiation de la CEEAC
Quelques jours avant sa communication du 15 décembre, François Bozizé avait reçu à Bossangoa une délégation régionale composée du président de la Commission de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC), l’Angolais Gilberto Da Piedade Veríssimo, et du représentant spécial du secrétaire général des Nations unies pour l’Afrique centrale, le Guinéen François Louncény Fall.
 
L’ancien président centrafricain avait dans un premier temps misé sur une médiation de l’organisation régionale pour obtenir des concessions de Faustin-Archange Touadéra. Ces dernières semaines, inquiète des risques de violence et des recrutements de troupes constatés sur le terrain, la CEEAC avait suggéré au président centrafricain plusieurs aménagements.

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L’organisation, qui en avait encore discuté à Libreville lors de son dernier sommet en novembre, conseillait de repousser la date des élections, d’organiser une concertation nationale et de permettre aux anciens chefs d’État, dont Michel Djotodia s’il le souhaitait, de déposer leur candidature à la présidentielle. Mais Touadéra, arguant des avis de l’Agence nationale des élections et de la Cour constitutionnelle, n’a pas donné suite.

Un duo Sassou-Lourenço pour la Centrafrique ?

Denis Sassou Nguesso (par ailleurs président de la CEEAC) a tenté de rallier son homologue centrafricain aux recommandations de l’organisation. Début décembre, il a envoyé des émissaires à Bangui, mais Touadéra serait resté sourd à leurs arguments. Une visite du président congolais, initialement prévue dans la semaine du 7 décembre, aurait même été annulée devant le manque d’avancées.
Depuis, François Bozizé a quelque peu perdu foi en une intervention régionale et estime avoir été, une nouvelle fois selon lui, abandonné par ses anciens homologues. D’après un connaisseur du dossier, le Tchadien Idriss Déby Itno ne souhaite pas s’y impliquer, tandis que le Gabonais Ali Bongo Ondimba et le Camerounais Paul Biya restent en retrait, comme Félix Tshisekedi, occupé en RDC.
 
En revanche, l’Angolais João Lourenço serait de plus en plus actif dans ce dossier au côté de Denis Sassou Nguesso, avec qui il entretient par ailleurs de bonnes relations et à qui revient la prérogative de nommer un médiateur régional d’ici le premier tour de la présidentielle, le 27 décembre. C’est entre ces deux hommes que se jouera le choix dudit médiateur – qui pourrait être le président congolais lui-même.

Jeune Afrique.com

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