À l’appel de l’Union des syndicats du Tchad, de nombreux fonctionnaires ont repris lundi 5 novembre leur grève pour une durée de trois jours, afin de réclamer une hausse de 115 % de leur salaire. Le régime d’Idriss Deby avait accédé en partie à leurs revendications l’an dernier, mais n’a pas tenu toutes ses promesses. Si bien que la situation est devenue intenable selon notre Observateur.
 
Le conflit est larvé, et dure depuis plus d’un an. En novembre 2011, après plusieurs mouvements de grèves, le gouvernement tchadien avait fini par conclure avec les syndicats une augmentation graduelle des salaires de la fonction publique de 40 % jusqu’en 2014. Mais selon les syndicats, les salaires n’ont pas bougé, et certains titulaires de la fonction publique ne perçoivent même plus leur revenu depuis plusieurs mois.
 
En conséquence, la grève a repris cet été, avec néanmoins un service minimum. Des leaders religieux ont proposé une médiation pendant le moins de septembre, au cours duquel la grève a été suspendue. Mais les tentatives de conciliation entre syndicats et gouvernement ont échoué, entraînant la reprise des débrayages en octobre, cette fois sans service minimum.
 
Le président tchadien Idriss Deby, au pouvoir depuis 1991, assure pour sa part que l’augmentation annoncée n’est en fait pas tenable car elle nécessiterait que le Tchad trouve de nouvelles ressources, notamment des puits de pétrole supplémentaires. Ou bien que le gouvernement revienne sur des investissements entrepris dans le domaine des infrastructures et de la santé pour moderniser le pays. Le Tchad est considéré comme l’un des pays les plus pauvres d’Afrique, classé 183e à l’Indice de développement humain (IDH).

"Nous souhaiterions une hausse d’au moins 50 % du salaire"

Mahamat (le prénom a été changé) est fonctionnaire. Il possède un diplôme de professeur de sciences politiques, mais est contraint d’enseigner dans une école primaire de N’djamena, faute d’emploi à l’université.

Nous sommes tous en grève depuis deux mois. Le régime de Deby ne verse pas les salaires de beaucoup de fonctionnaires, et ceux qui sont payés sont très mal payés. Par exemple, certains militaires ne gagnent que 250 000 francs CFA par mois [381 euros], c’est une somme ridicule, ça ne sert à rien, que vont-ils faire avec si peu ? Pour les enseignants, c’est pire encore. Le salaire est autour de 60 000 francs CFA [91 euros] par mois, c’est très insuffisant pour vivre. À N’djamena par exemple, un sac de riz coûte 40 000 francs CFA. [60 euros]
 
À l’université où je travaille, plusieurs professeurs n’ont plus de salaires depuis six mois. Moi, pour continuer de le toucher, je dois corrompre les services de paye de l’État en leur versant une commission chaque mois. Je paye un agent entre 10 000 et 15 000 francs mensuels pour obtenir mon salaire de 70 000 francs CFA, qui du coup est amputé de près de 25 %.
 
Nous sommes prêts à négocier, mais je ne crois pas que le régime acceptera. Nous souhaiterions une hausse d’au moins 50 % du salaire. Et même si le régime accepte de négocier et accepte la hausse, nous ne savons pas s’il tiendra parole, puisqu’il ne l’a pas fait pour ses engagements pris l’an dernier.
 

  

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