Le 8 Mars de chaque année est célébrée la journée internationale de la femme. Institutionnalisée par les Nations-unies en 1977, cette journée vise à promouvoir l’égalité des droits des femmes dans tous les pays du monde.

Il nous semble pertinent d’utiliser cette opportunité à dimension internationale pour partager avec vous cette modeste contribution sur la place de la femme en Islam à travers la Sîra du Prophète. Nous tenterons de revisiter ce moment passionnant d’Histoire en insistant sur ses nombreuses qualités – de musulmane avant-gardiste, d’intellectuelle de haut niveau, de pratiquante vertueuse, mais aussi de femme influente dans la cour du Prophète avec souvent des idées purement féminines (S.65) et non féministes.

Que pouvons-nous en déduire dans le contexte actuel de plaidoyer médiatisé d’égalité des sexes et de parité pour inspirer la démarche à suivre selon les enseignements du Qur’ân et de la Sunna ?

Dans un précédent article, nous avons mis en évidence la vie du prophète de l’Islam qui est très édifiante, profonde et lumineuse. Elle est incontestablement l’histoire de la foi, de la mystique et de l’engagement. L’histoire de la simplicité, de la conviction, de la patience, de l’ouverture, de l’humanisme, de la tolérance, du pardon, de la sagesse et de la détermination. Un modèle à suivre. Chacune des étapes de sa vie est une leçon de responsabilité et d’amour. Aïcha, son épouse nous a offert la belle formule. Son comportement, sa morale, son caractère étaient le Qur’àn, c’est-à-dire une lumière.

A partir de cette dimension prophétique et sortie de l’école du prophète, les musulmanes de l’époque ont non seulement affirmé leur féminité en parfaite adéquation avec leur spiritualité, mais aussi et surtout contribuer dans la vie sociale, politique et économique de la cité. La Sira du prophète, regorge d’exemples édifiants de femmes qui ont participé activement à la libération islamique de la femme à tel point qu’on se demande aujourd’hui, pourquoi cette régression dans certains pays majoritairement musulmans.

Dans la Sîra du Prophète et particulièrement dans le contexte de Médine, Seyyidatouna Aïcha a certainement été la femme la plus remarquable, non seulement de par son aura intellectuel, qui lui valait d’enseigner aux croyants les règles et pratiques de la Religion, mais aussi et surtout de par sa personnalité exemplaire à l’encontre des suspicions publiques et des calomnies gratuites lors du Hadithatul Ifk (Vs 11 – 20., S.24). Aicha épouse du prophète, femme savante, exégète, politicienne, qui en plus d’avoir réglementé une grande partie de la Sunna a exercé durant 40 ans la fonction de Mufti, notons en passant que le terme au féminin n’existe pas en arabe, alors qu’elle a été parmi les premières a l’avoir personnifié a fait observer dans un de ses article Asma Lamrabet. Ce ne fut pas auprès d’un mari ou d’un père opprimant, insensible et dénué d’amour pour le savoir que Aicha a pu s’épanouir.

Khadidja, appelé aussi Tâhira (la pure) ; première épouse du prophète était une femme pieuse, d’une qualité morale et humaine exceptionnelle mais aussi une grande opératrice économique, chef d’entreprise qui maitrisait parfaitement les règles du marché, du commerce et de l’économie. Elle fût très respectée et écoutée par ses concitoyens.
Notre sœur Asma Lamrabet, médecin hématologiste à l’hôpital d’enfants de Rabat au Maroc, intellectuelle musulmane engagée dans la réflexion sur la problématique de la femme en islam ; Auteure notamment de « Musulmane tout simplement » aux éditions Tawhid a également mis en exergue quelques exemples parmi tant d’autres :

Oum Salama, a été conseillère politique du prophète lors du traité de « Al Hudaybia », toutes les « Sahabyates » de la première heure qui en faisant acte d’allégeance au prophète (lors de Bayaat Al Akaba) ont incarnées le premier engagement politique de la femme musulmane.

Zaynab, la fille du prophète qui un jour lors de la prière de l’aube « Al Fajr » dans la mosquée de Médine, va déclarer solennellement, juste avant le début de la prière, à toute l’assistance hommes et femmes, qu’elle a décrété la protection de son ex mari – non musulman à l’époque et dont la tribu était en guerre contre les musulmans de Médine- et que ce dernier se trouvait sous son auspice. Après la prière, le prophète s’assura de la nouvelle et accepta que cette personne soit laissée libre de circuler dans la cité malgré le contentieux avec sa tribu. Toute la communauté respecta la protection assurée par une femme à un mécréant. C’est un acte de responsabilité sociale pris par une femme en pleine prière, dans la mosquée, au vu et su de toute la communauté. Peut-on imaginer un tel acte aujourd’hui dans nos mosquées modernes ?

Asma Bint Yazid Bin Sakan, la première femme à revendiquer le droit au Jihad. C’était une femme qui a prêté serment d’allégeance au prophète, qui était connue pour sa foi et son abnégation pour la cause de l’islam. Elle a été désignée comme déléguée des femmes auprès du Messager de l’islam. Un jour alors que le prophète était parmi ses compagnons, Asma vint le voir et lui dit : « Je suis la déléguée des femmes auprès de toi prophète. Allah t’as envoyé auprès de tous les hommes et de toutes les femmes de ce monde, nous avons cru en toi et en ton Dieu. Mais les femmes sont limitées de par leur fonction et sont vraiment impuissantes.

Confinées chez elles, objets de vos désirs, enceintes de vos enfants, tandis que vous êtes vous les hommes favorisés par rapport à nous, par vos assemblées, par votre participation sociale et politique, par le pèlerinage, et plus que tout cela par le Jihad dans la voie de Dieu. Pendant que nous les femmes, nous tissons vos habits et éduquons vos enfants. Ne pourrions-nous pas partager avec vous tous ces bienfaits comme celui du Jihad, auquel vous avez, vous les hommes apparemment un droit exclusif ? » Le prophète émerveillé par l’éloquence de cette femme, se retourna vers ses compagnons : « Avez- vous jamais entendu un propos qui témoigne de la dévotion d’une femme à sa religion aussi meilleur que celui là ? » leur demanda t-il ; « Certes non, nous n’aurions jamais cru qu’une femme serait capable de tenir pareil propos ! » Répondirent les compagnons vraisemblablement abasourdis par le discours de cette femme. Asma Bint Yazid au nom de sa foi a dénoncé les privilèges des hommes au Messager de Dieu !! Elle n’avait aucun embarras à le faire car c’est ainsi que l’islam le lui enseigna.

Fatima, fille du prophète, morte à l’âge de vingt-six ans, a instruit et éduqué ses deux enfants, Hassan et Hussein, de telle manière qu’ils devinrent, aux dires de tous, les plus doués et les plus jeunes savants de leur époque. Jamais sans leur mère, ils n’auraient pu être les hommes qu’ils devinrent par la suite.

Hafsa, fille de Oumar, fut considérée par les musulmans des premiers temps comme la secrétaire du Prophète ; c’est à elle que l’on confia le seul manuscrit de la première compilation du Coran, constitution de la société naissante. Une confidente, une femme d’exception qui, aux côtés puis après le Prophète, aida à la préservation de la Révélation.

Les musulmanes de cette époque, convaincues que l’islam les traitait à part égales avec les hommes, ne lésinaient pas à revendiquer cette égalité dans la foi et l’action, haut et fort, devant la plus haute autorité de l’islam, à savoir notre prophète Muhammad ! Elles inspirent toujours les musulmanes d’aujourd’hui.

Les exemples sont donc multiples mais dans quelle mesure sont-ils réellement effectifs dans notre pratique quotidienne d’aujourd’hui ?

Dans certaines sociétés musulmanes, les pratiques faites à l’égard des femmes ne sont pas fidèles aux enseignements de l’islam. La situation des femmes reste parfois gravissime en matière d’accès à l’enseignement, à l’éducation, au droit et à la participation sociale. Il est un devoir de dénoncer, au nom des références musulmanes, le système de discrimination méthodique qui exclut les femmes de l’enseignement ou du travail. Il ne s’agit pas ici que ce problème reste l’affaire des femmes seulement. C’est l’affaire des femmes et des hommes, au nom de leur référence spirituelle, de lutter contre cela. L’implication des femmes dans les projets réformateurs et leur réappropriation du débat religieux est nécessaire.

Comme disait Asma, le vrai problème qui se pose en fait ce n’est pas tant le Coran mais ce que l’on a fait du Coran à travers une lecture et des interprétations sexistes envers la femme. Des interprétations rigoristes et complètement fermées du religieux qui ont légitimé durant toute l’histoire musulmane, volontairement ou non, une véritable discrimination à l’encontre des femmes. Il faut donc retrouver et réapproprier l’esprit du départ, la dynamique historique des époques de la révélation.

Il appartiendra aussi aux femmes de façon générale de se départir du modèle qui tend à faire de l’image de la femme un objet de commercialisation et un produit marketing. De ce point de vue, la réplique efficace est certainement dans la recherche humble et méthodique du savoir.

Talha Mahamat Allim 

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