Face au danger et l’avancée vers Bamako des djihadistes qui étaient sur le point d’atomiser l’Etat malien, la France, tel un preux chevalier de la table ronde, avait volé au « secours » de ce pays en désintégration avancée en expédiant son armée au charbon avec l’appui du contingent tchadien. Quatre mois plus tard, la menace djihadiste, loin d’être réduite, s’est muée en guerre asymétrique qui, comme partout où elle se fait, a pour caractéristique constante de virer à l’enlisement. Cerise sur ce gâteau dégoulinant de sang, voilà que la même France se mêle d’imposer des élections – on ne sait pour quelle urgence – dans ce Mali qui demeure toujours dans la périphérie du néant !

 

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L’intervention musclée des troupes Françaises dans le cadre de l’opération Serval, le 11 janvier dernier, suivie de l’appui du contingent tchadien dans cette offensive avait contraint les djihadistes de procéder à une retraite précipitée vers l’extrême nord du Mali, histoire de se planquer au beau milieu du domaine des combattants d’Aqmi.


 Les deux troupes avaient traqué sans désemparer les djihadistes dans les massifs des Ifoghas où les soldats tchadiens, faisant office d’éclaireurs – chair à canon, subissent sans cesse des misères diverses.


L’objectif secret de la France était en fait de retrouver les otages français détenus par les terroristes d’Aqmi vivants.


Jusqu’ici, les otages restent introuvables. Les recherches n’ont rien donné, la dernière actualité étant en tout cas constituée par la petite guéguerre entre la France et le Tchad à propos de la mort supposée d’Abou Zeid.


Par contre, la situation est loin de l’apaisement : la guérilla s’intensifie et se manifeste durement jusque dans la ville de Tombouctou et Gao situées loin des théâtres de combats, et supposées sécurisées. La France prise dans l’engrenage et l’étranglement budgétaire de l’opération Serval, a décidé de retirer les trois quarts de ses troupes d’ici juillet pour sauver les meubles.


Pensant user de la solution absolue pour traquer les djihadistes, la France avait cru juste et bon de pactiser avec le MNLA qui, contre toute attente, avait obstinément refusé la présence des troupes maliennes à Kidal, ne désirant juste que celles du Tchad. En somme un curieux diktat installant une partition de fait !


Et c’est justement – mais malheureusement – à Kidal que le contingent tchadien a été victime de deux effroyables récents attentats kamikazes dont le dernier a coûté, en fin de semaine dernière, la vie à quatre soldats de son armée, et en en blessant quatre autres.

Le comble dans toute cette mélasse c’est qu’en dépit de la situation qui s’obstine à demeurer confuse, Paris exige – ni plus ni moins –  de Bamako,  l’organisation des élections législatives et présidentielle en juillet, soit dans trois mois. Ce qui relève tout simplement de l’impossible !


Impossible pour trois raisons
 :


Primo – le pays demeure sous la psychose de menaces et d’attaques perpétuelles des djihadistes. Pire, les forces sans cesse attendues de la MISMA sont loin d’être prêtes pour prendre la relève des troupes françaises et tchadiennes.


Secundo
 – Des dizaines de milliers de maliens n’ont eu pour seule extrémité que de trouver refuge dans les pays voisins.


Tertio
 – le problème du capitaine Sanogo, faisant indubitablement partie du grand problème malien, demeure entier. Ainsi son influence –  que bon nombre d’observateurs jugent néfaste pour la cohésion de l’Armée malienne – pourrait obérer toute démarche de sortie de la crise malienne constituée de plusieurs dilemmes.


Pour que le Mali sorte de ces grands bourbiers, il faudrait absolument une réconciliation entre tous les fils de ce pays.

 

L’interventionnisme du Tchad

 

Soldats-tchadiens-se-preparent--le-14-mars-2013--dans-le-d.jpgMais au-delà de toutes ces considérations, on n’en finit toujours pas de se poser toute une foule de questions, notamment pourquoi le Tchad s’est précipité d’intervenir au Mali alors qu’il n’était ni membre de la Cédéao et encore moins affilié à la Misma ?


Deuxième question : quel  bilan peut-il arborer après trois mois de présence de ses troupes sur les champs de bataille du Mali ?


Autre question : Pourquoi Deby,  qui a pompeusement fait intervenir plus de 2000 hommes au Mali, vient-il de décider dimanche 14 avril dernier leur retrait maintenant – du moins le bataillon de l’escadron de la première ligne, et le reste progressivement ?


«Nous avons déjà procédé au retrait du bataillon d’appui lourd qui a déjà quitté hier Kidal pour rentrer au pays. Le reste des éléments, progressivement, vont rentrer au pays», a affirmé le président tchadien, alors qu’il était l’invité de l’émission Internationales organisée le dimanche 14 avril 2013 par RFI, TV5 Monde et Le Monde.


Par ailleurs, a ajouté l’homme fort de Ndjamena, «les combats à visage découvert face aux islamistes sont terminés au Mali, l‘armée tchadienne n’a pas de compétence réelle pour faire face à une nébuleuse, de type guérilla, comme celle qui a lieu désormais dans le nord de ce pays. »


Aveu d’impuissance, défaitisme à peine voilé, ou fuite en avant pour sauver la face vis-à-vis de son armée qui ne se contente plus seulement de grincer des dents ? Selon des indiscrétions dans l’entourage du dernier cercle des fidèles au président Deby, la décision du retrait du contingent tchadien du Mali, a été déjà prise juste après la débâcle des troupes tchadienne le 22 février dans le massif de Ifoghas.


Côté cirque : comme on s’y attendait depuis quelques semaines, le parlement tchadien – la chambre d’enregistrement MPS – a voté lundi 15 avril 2013 un projet de résolution en faveur du retrait du contingent tchadien du Mali.


Pour mieux comprendre cette machination, il sera aisé de trouver des réponses pertinentes à ces questions en consultant nos précédents articles.


Ce qui est en tout cas indiscutable est que la principale cause de cette dernière pirouette du potentat tchadien trouverait son explication dans le malaise qui bouillonne au sein de son armée clanique où la conviction s’installe de plus en plus profondément que Deby n’aurait envoyé leurs frères d’armes à l’abattoir, loin des frontières du Tchad, que pour des raisons d’égo, du racolage pour affrioler le président français Hollande et de la quête d’un leadership factice.


Ce qui suscite, à l’heure qu’il est, des tensions que Deby se trouve bien incapable de calmer malgré sa façon rusée habituelle de régler la grogne dans les rangs de son armée : distribution d’argent et de grades à l’emporte pièce.


Et la situation n’est pas simple, car depuis plus de deux mois, il a été dénombré une vingtaine d’officiers supérieurs et environ 600 soldats proches du régime ayant fait défection, selon les sources recueillies auprès des déserteurs.


Le régime est très affaibli. La population est lassée de la cherté de la vie, du manque d’eau potable et d’électricité dans la capitale, et surtout de la mégalomanie absolument surdimensionnée ces derniers temps d’Idriss Deby Itno – l’intervention de ses troupes au Darfour pour traquer la rébellion soudanaise et celle qui a contribué à la chute du régime de Bozizé en Centrafrique – qui semble commencer à se prendre pour un petit dieu!


L’heure est donc venue de dresser le bilan et tirer les enseignements de ces interventions intempestives qui ont endeuillé le Tchad. Et aussi aux maliens d’ouvrir les yeux sur les causes réelles de la crise que traverse leur pays depuis plusieurs années afin d’y trouver des solutions adaptées. 

Par D.D  

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