Le Tchad pourrait fournir une aide précieuse pour reconquérir le nord du Mali, mais la participation de N’Djamena fait débat. Elle comporte des risques à la fois pour le Tchad et pour la communauté internationale.
Dans le nord du Mali, il y a du sable. Du sable à perte de vue. Alors, pour combattre dans cette région, il faut des soldats aguerris au désert. Et les hommes de l’armée tchadienne en sont.
Mais le Tchad, c’est aussi le régime d’Idriss Déby Itno, connu pour ses violations massives des droits de l’Homme : presse muselée, répression musclée de toute velléité d’opposition, détentions arbitraires. Christian Mukosa, d’Amnesty International, estime qu’une telle alliance, même de raison, avec N’Djamena renforcerait encore les autorités tchadiennes dans leur impression d’impunité :

« Désormais, on traduit les journalistes et les voix critiques en justice pour les intimider, leur faire peur. C’est nouveau et assez inquiétant, comme évolution. Avant, les intimidations étaient informelles. Dorénavant, elles se font ouvertement : le gouvernement utilise la justice pour tracasser les opposants et les faire taire. »

La menace de Boko Haram
Que le Tchad soit évoqué pour participer à la mission au Mali tient surtout à ses liens privilégiés avec la France, en dépit de la fin de la « Françafrique » proclamée par François Hollande après son élection.
Malgré leur expérience du désert, la politologue Helga Dickow, de Fribourg, n’est pas favorable non plus à la participation de soldats tchadiens à une mission au Mali. Outre les bénéfices que pourrait en retirer le président Déby, réputé fin stratège, la chercheuse craint que le conflit malien n’ait des répercussions sur le nord musulman du Tchad :

« Il y a déjà des islamistes à N’Djamena aussi. Ils ne se montrent pas encore trop, et on ne les a pas tout à fait identifiés. Ils sont étroitement liés à Boko Haram, au Nigeria. Apparemment, Boko Haram aurait déjà menacé indirectement le président Déby d’une déstabilisation du Tchad, en cas d’envoi de troupes tchadiennes au Mali. »
Autre armée expérimentée dans les combats sahariens : celle de l’Algérie. Mais cette fois, c’est Alger qui rechigne à s’engager, de peur de voir aussi déborder le conflit sur son territoire. Le concept international pour l’intervention au Mali doit être terminé fin novembre. D’ici là, les tergiversations vont continuer en haut lieu. Tout comme les violences sur le terrain.

Écoutez par ailleurs l’interview qu’Alassane Dicko, de l’Association malienne des expulsés (AME), a accordée à Audrey Parmentier. 
Depuis la mi-janvier 2012, la crise au nord du Mali a fait près de 450.000 déplacés selon l’OCHA, le bureau des Nations unies pour la coordination des Affaires humanitaires. Et ce chiffre ne cesse d’augmenter. L’AME tente de leur apporter une assistance médico-sociale.

Source
dw.de 
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