Dans le bras de fer qui oppose le président sénégalais à son Premier ministre, ils ne sont pas nombreux à apporter publiquement leur soutien à Bassirou Diomaye Faye. C’est une guerre intestine, par courrier et communiqué interposés, qui divise la majorité présidentielle depuis le 11 novembre. En guise de casus belli, la volonté de Bassirou Diomaye Faye de nommer Aminata Touré (ancienne Première ministre de Macky Sall) à la tête de la coalition Diomaye Président en lieu et place d’Aïda Mbodj, une transfuge du Parti démocratique sénégalais (PDS) bénéficiant du soutien d’Ousmane Sonko. Demeuré à la tête des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef, au pouvoir), le Premier ministre semble déterminé à engager un bras de fer avec le chef de l’État.

Depuis le clash, un constat s’impose. Au sein de Pastef, les quelques ténors qui se sont exprimés jusqu’ici affichent leur soutien à Ousmane Sonko, tandis que Bassirou Diomaye Faye compte ses rares supporters parmi les anciens alliés d’un parti devenu entre-temps hégémonique.

Du côté d’Ayib Daffé, le président du groupe Pastef à l’Assemblée nationale, pas de réaction ostentatoire, mais une reprise sur sa page Facebook du communiqué incendiaire de son parti désavouant le choix du président de la République.

Si El Malick Ndiaye, le président de l’Assemblée nationale, s’est jusqu’ici tenu à l’écart de cette querelle au sommet de l’exécutif, ce n’est pas le cas d’Abass Fall, le maire de Dakar. « Aucune usurpation ne sera faite de notre victoire, acquise de haute lutte », commente ce dernier sur les réseaux sociaux. Et de renvoyer ses followers à une publication explicite rédigée en août 2018, quand Aminata Touré était encore un pilier du parti de Macky Sall. Laquelle débutait ainsi : « Mimi, la pauvre petite envoyée spéciale [du président Macky Sall], est décidément prête à tout pour arrêter sa descente aux enfers et revenir aux affaires pour continuer à savourer les délices du pouvoir. »

Dans une longue vidéo, la députée Maimouna Bousso (Pastef) ne fait pas, elle non plus, dans la dentelle. « J’indexe le président de la République, Bassirou Diomaye Faye, parce que c’est lui le gardien de la Constitution. Ousmane Sonko a du tempérament, c’est vrai, il a des défauts, mais aussi de nombreuses qualités. S’il y a un supposé conflit entre vous deux, c’est vous [Diomaye] qui avez tort, parce que Sonko est votre aîné, votre mentor en politique et [qu’il] vous a légué le “Projet”. Avec tous les sacrifices qu’il a faits, vous n’aurez jamais raison sur lui. »

Dans une longue vidéo, la députée Maimouna Bousso (Pastef) ne fait pas, elle non plus, dans la dentelle. « J’indexe le président de la République, Bassirou Diomaye Faye, parce que c’est lui le gardien de la Constitution. Ousmane Sonko a du tempérament, c’est vrai, il a des défauts, mais aussi de nombreuses qualités. S’il y a un supposé conflit entre vous deux, c’est vous [Diomaye] qui avez tort, parce que Sonko est votre aîné, votre mentor en politique et [qu’il] vous a légué le “Projet”. Avec tous les sacrifices qu’il a faits, vous n’aurez jamais raison sur lui. »

Membre du cabinet d’Ousmane Sonko au sein de Pastef et abonné aux saillies provocatrices – mais parfois absconses –, le président du Port autonome de Dakar, Waly Diouf Bodiang, a lui aussi choisi son camp. « Je ne me sens nullement concerné politiquement par tout ce qui se fait en dehors de Pastef. Mon périmètre et mon horizon politiques se limitent uniquement à Ousmane Sonko », lâche-t-il sur X, signifiant à mots couverts que son allégeance va en premier lieu à son parti et à celui qui le dirige.

« J’ai tellement de questions, je garde mon sang froid. J’ose espérer que ce document est un faux car le président Diomaye ne [saurait] être l’auteur de ce communiqué », commente de son côté, incrédule, Galissa Boully, responsable de Pastef dans la diaspora.

De rares plaidoyers en faveur de Diomaye

Pour trouver un plaidoyer en faveur du chef de l’État dans le cadre de cette rixe politique, il faut se tourner vers les alliés de Pastef, qui avaient apporté leur soutien à la coalition Diomaye Président avant l’élection de 2024.

Coordinateur national de Gox Yu Bees-Les Bâtisseurs, Ameth Diallo en retrace l’historique. « Dire que le président Bassirou Diomaye Faye n’était pas le président de la coalition [Diomaye Président] est une aberration totale. Ousmane Sonko lui-même l’a présenté publiquement [ainsi] lors de la réunion du 6 avril 2024. Les vidéos et les témoins de cette séance en attestent », assure-t-il sur Facebook. Une mise au point adressée aux partisans d’Osmane Sonko qui ont mis en cause la légitimité de l’actuel chef de l’État à se positionner comme tel dans le courrier à l’origine de la querelle.

Mais, précise encore Ameth Diallo, les partis alors alliés au sein de la coalition Diomaye Président auraient ensuite été sèchement éconduits à la veille des législatives de novembre 2024 : « À quelques jours seulement du dépôt des listes, Ousmane Sonko a annoncé de manière unilatérale que le Pastef irait seul aux élections législatives. Les alliés pouvaient, selon lui, “[le] suivre s’ils le souhaitaient”. »

Quant au député (non-inscrit) Thierno Alassane Sall, devenu détracteur de Pastef depuis l’alternance, il avait pris les devants avant même le clash récent. « Ce térameeting [organisé le 8 novembre par le Premier ministre] montre qu’il y a une guéguerre au sein du régime. Sonko veut montrer sa force au président Diomaye », prédisait-il à la veille de l’événement.

Tchadanthropus-tribune avec Jeune Afrique

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