Mes chères/chers compatriotes,

Le dimanche 11 août, le Tchad a fêté ses 53 ans d’indépendance. Comme d’habitude, il y a eu des manifestations festives ; des gens s’en sont donnés à cœur joie. Puis tout est redevenu comme avant. On aurait dit la surface d’un cours d’eau, un moment dérangé par un jet de pierre mais qui retrouve son calme habituel.

 


Comme se demandait un tchadien, « 53 ans dans la vie d’un Etat, ce n’est peut-être pas grand-chose mais sur le plan de la construction d’une nation, cela représente quelque chose. Et qu’avons-nous fait pendant ce temps pour la nation » ?

 


Comme peuple nous devons nous poser quelques questions. Où en sommes-nous avec notre pays ? Avons-nous relevé les premiers défis de la construction nationale qui s’imposent à nous ? Avons-nous réussi à construire un mieux-vivre ensemble tchadien ? Où en étions-nous avec le baromètre de notre amour de la patrie qui devrait conduire nos actes et notre engagement pour le Tchad ?

 


Ne nous faudrait-il pas retrouver et consolider la cohésion sociale après la grande muraille de haine qui nous avait été dressé le 12 février 1979 ? Voilà des questions de politique intérieur qui se posent à nous comme un défi à relever. C’est un défi pour les hommes politiques mais aussi pour la société civile. Chaque citoyen se doit de s’engager à ce défi qui est l’édification d’une nation tchadienne, moderne. Nous devons nous y engager avec foi en notre Dieu le créateur !

 


En même temps que nous nous sommes posé ces questions de défi, nous ne devons pas oublier le moment présent. Notre pays traverse depuis 23 ans maintenant des pires moments qu’il n’est jamais donné à un peuple de connaître en ce début du 3ème millénaire.

 


En effet, les festivités commémoratives des 53 ans de notre indépendance se  sont déroulées dans un contexte d’échecs cuisants pour notre pays, mais aussi de crises profondes et généralisées sans précédent, dont les conséquences actuelles et à venir sont et seront extrêmement dures pour notre pays ; pour notre peuple ; pour notre jeunesse, pour les générations futures.

 

 

Mais au de-là de ces souffrances inqualifiables infligées à notre peuple ; au-delà des discours creux, vides de sens ; au-delà du matraquage et de l’étouffement de notre jeunesse; au-delà de la corruption et des malversations de toutes sortes ; au-delà des inquiétudes   et d’interrogation de nos populations laborieuses à qui on a enlevé tout espoir du bien-être et du confort matériel et moral ; au-delà des peurs et des divisions claniques et confessionnelles savamment orchestrées, nous tchadiennes et tchadiens de  la génération présente, nous avons néanmoins un devoir historique en commun : assumer notre responsabilité  pour les tchadiennes et les tchadiens, et en particulier pour ceux qui ont le plus besoin de nous.    

 


Notre jeunesse est livrée à elle-même dans le désœuvrement. Du nord au sud, partout, nos régions,  nos villes, nos campagnes et villages sont divisés sur des bases claniques et confessionnelles. Les élus du peuple sont arrêtés à tour de bras comme de vulgaires criminels et ce, en toute violation arrogante de notre loi fondamentale. Des journalistes emprisonnés sans ménagement et sans qu’aucune inculpation ne soit prononcée à leur encontre. Battus, violé(e)s, humiliés, tétanisés et apeurés, ces tchadiennes et tchadiens qui ne font que leur travail ne se sentent plus en sécurité pour le faire. En l’absence de toute règle de droit et de justice, l’Etat tchadien est par terre. Je dirais qu’il est redescendu au 5ème sous-sol pour la vaste majorité de tchadiennes et tchadiens que nous sommes. Ça suffit !

 


Mes chers compatriotes, je m’adresse à vous tous sans distinction aucune. Face à ce régime de bandits formatés de quel disque dur, nul ne le sait ; face au pillage de nos ressources nationales, face au banditisme d’Etat organisé par Idris Deby,  notre tâche est ardue et notre responsabilité très immense. Nous avons besoin de rassembler nos énergies. Ne dispersons pas nos forces. Nos concitoyennes et concitoyens ont besoin d’une direction claire, d’une opposition forte, constitutive d’une alternance crédible- Notre pays a besoin d’une opposition socialement et politiquement musclée, généralisée, à la hauteur des attentes de notre peuple. Nous avons besoin d’un engagement ferme et ambitieux. Le Tchad, notre pays, notre peuple a besoin d’une opposition non clanique, non sectaire, mais d’une opposition fédératrice de nos diverses sensibilités, capable de s’opposer avec foi, clairvoyance, combativité et de représenter une force alternative crédible, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du Tchad. Nous devons  être capables d’offrir à nos concitoyens des repères exigeants et constants en cette période où dominent le doute et la confusion idéologiques au sommet de notre Etat.

Je ne vous le cache pas. Le peuple Tchadien est en ce moment en état de putréfaction. Les kalachnikovs du régime sont plus effarantes et meurtrières pour les non-opposants que pour les opposants. Ceux qui ne sont en rien concernés dans cette entreprise sont plus victimes. Ce sont les populations civiles, durement touchées sans égard de caractères organiques et d’âges.

Les enfants, les femmes, nos personnes âgées subissent régulièrement les olfactifs corporels et sont inexorablement terrifiés dans leur humanité morale, sans quoi toujours dans leur existence du moins dans leur inexistence complètement troublés. Le présent reste en eux et pour eux des massacres, des arrestations arbitraires. Cette ambiance de calvaire ou de gangstérisme plonge notre pays dans une situation alarmante. C’est dans cette couche gazeuse de saleté repoussante et d’atrocités généralisées que naissent, grandissent et prennent contact avec la vie nos enfants. Partout à travers notre territoire, on apprend à ces enfants, les jeunes de demain, la haine infernale, la discrimination et la criminalité. Autour d’eux nos jeunes ne voient que cadavres, ossements. Ils n’entendent rien d’autres que les bruits d’armes. C’est ça la renaissance selon Idriss Deby et ses complices. C’est ainsi que le Tchad brûle : terre brûlante, pays de charniers, ciel pollué de sang, fleuves infectés de cadavres. Le cadavre de tout un peuple est étalé là, depuis 23 ans sur les marches de la civilisation. Et le monde dit civilisé, le monde des valeurs démocratiques se tait. Il est complice de la barbarie. Je ne sais pas comment rendre la criminalité haïssable au bellicisme ou belliciste Tchadien ? C’est à nous de relever ce défi d’humanisme.

Voilà pourquoi je dis à ceux qui ressassent sans cesse le passé : le Tchad n’a plus besoin de mouvements claniques, ayant comme seul projet de société quelques kalachnikovs. Le temps des révolutions claniques est révolu. Libérez vos esprits de l’idéologie de la haine. Les postures claniques, confessionnelles et les logiques individualistes, ces vieilles recettes des grottes d’Aramkolé ou de Bamina ne font plus recette. Elles ne peuvent  répondre aux enjeux et  objectifs actuels du Tchad. Seul, un grand rassemblement démocratique ; un engagement national désintéressé et conséquent qu’il revient à chacun de nous de mettre en œuvre avec sincérité, nous donnera une crédibilité, une force et une cohérence agissantes, indispensables à notre libération. Tournez le dos au passé clanique et inscrivez-vous dans un engagement national pour le Tchad.

 


Avec gravité, détermination, mais désintéressement, je m’y engage devant Dieu et devant le peuple tchadien à conduire ce mouvement national de libération contre la barbarie. Je suis donc résolu à contribuer à un tel processus, sur la base d’une ligne politique claire et responsable. Dans une opposition énergique, crédible et nationale pour une nouvelle espérance au Tchad. Je m’y engage au nom du peuple tchadien et pour le Tchad. Je vous appelle à ce rassemblement national contre la barbarie.

 


Que ce soit dans un processus politique ou par la force nous devons mettre fin aux souffrances de notre peuple. Nous le devons au Tchad, notre patrie bien aimée. Les Forces de Redressement et d’Actions Populaires (les FRAP) doivent assumer leurs responsabilités devant Dieu et devant la Nation. Le Tchad, notre pays, le mérite. Il mérite mieux que ce qu’on lui sert depuis un certain nombre d’années maintenant.

 


Pourquoi moi ? Vous allez vous poser la question. Eh bien la réponse est que je suis là et que je m’y étais engagé depuis me tendre jeunesse- Parce que la somme de mes expériences de vie me le prédestine. Et surtout parce que je suis prêt à ce sacrifice ultime pour mon pays.

Ce message je l’adresse en particulier à toi, jeunesse tchadienne. Où que tu te trouves, quelle qu’en soit ta déception,  je comprends ta désillusion. Cesse tes larmes et engage-toi pour la nouvelle espérance.

 


L’efficacité de ton engagement, doit être à la hauteur de ton choix pour ta liberté. Il ne s’agit pas de t’engager parce que c’est moi. Non. Engage-toi pour une idée, pour des valeurs auxquelles tu crois. Ce choix doit être celui de ton combat ultime pour la paix et les libertés. Le combat de ton  rêve, de ta passion. La défense de ton existence en tant qu’être humain, sur la terre de tes aïeux. Le combat de ton rêve, celui de construire et bâtir ensemble, notre pays dans ses frontières internationalement reconnues ; dans son intégrité territoriale de 1284000 km2. Ni plus, ni moins. Cet engagement ce sera le tien. Ton engagement pour des valeurs de solidarité, de justice, de respects des droits fondamentaux de l’homme et de la femme : le droit à la vie. Ce sera un engagement pour le Tchad, notre commun destin.

 


Ton engagement doit être celui du choix sans équivoque de la laïcité irrévocable pour notre pays qui doit se construire dans un état et une république démocratiques qui respecte les droits de la minorité et des femmes ; le choix d’un développement économique  au service de l’emploi et du bien-être de nos concitoyennes et concitoyens. Ton choix ce sera celui d’un présent heureux pour nous-mêmes, tous ensembles, mais aussi celui d’un avenir radieux, plus heureux encore pour nos descendants. Je t’invite à t’investir avec passion et détermination dans ce rêve !

 


Oui, nous avons besoin d’un projet de société cohérente pour notre pays et nous ne pourrons le réaliser qu’avec toutes les forces progressistes de notre pays ; avec toutes les forces vives de notre pays, débarrassées de toutes idéologies de haine.

 


Refuser cette dynamique, ce serait renoncé à trouver une solution nationale à la crise sociale, économique et morale que connaît notre pays depuis un quart de siècle maintenant. Or, cet édifice Tchad doit être le patrimoine commun à léguer aux générations futures. C’est le sens de ce message humain de la construction nationale et de la dignité de l’homme tchadien que je t’adresse aujourd’hui. 

Mes chers compatriotes,


Toute vie perdue est une vie humaine, sans distinction. Une femme qui devient brutalement veuve, est un être humain qui a droit à une vie familiale heureuse. Les enfants innocents qui sont privés, du jour au lendemain, de soins et de l’affection de leurs parents sont les nôtres, qu’ils viennent de Mbaïbokoum, de Zoumri, de Bagasola ou d’Araz-Mangueïn. Ils nous imposent la plus haute responsabilité pour leur procurer une vie heureuse aujourd’hui et demain.

 


Nous n’atteindrons pas cet objectif si nous ne nous débarrassons pas de cette vermine installée à la tête de notre pays. De même, nous n’atteindrons pas ces buts si nous ne clarifions pas notre conception du combat politique qui nous engage. La crise morale et identitaire sans précédent que connaît en ce moment notre pays exige de nous un renouvellement total de la classe politique et des réponses éprouvées. La jeunesse tchadienne ne doit pas être otage en perpétuité de la vieille classe politique, sans renouvellement politique.


Nous devons aller à un engagement patriotique, militant et combatif, où chacun doit avoir sa place ; un renouvellement politique où la liberté de parole ne doit jamais porter atteinte à notre unité nationale ; où partout, l’exigence éthique s’appliquera à notre démocratie laïque et où sera réaffirmé avec force la laïcité irrévocable de notre Etat et République.      

Nous devons ouvrir les portes de notre engagement démocratique  à toutes les forces vives, syndicales et associatives de notre pays, pour qu’il redevienne un lieu privilégié de réflexions, d’échanges et de débats politiques consensuels, dans le respect de notre diversité culturelle et de nos opinions.                                                                                                                

Sur la question majeure de notre vouloir vivre ensemble, nous n’avons pas le droit d’être ambigus. Je pense que l’échange avec ses convenances est essentiel entre les êtres humains. Il permet de lever les incompréhensions et les idées reçues et nous amène à mieux nous connaître pour s’apprécier et s’aider mutuellement. La réussite de la mission de l’être humain sur cette terre est liée inéluctablement à ce bon échange et à ce respect mutuel. Le Coran, de par son intemporalité et son universalité, a posé les bases d’un dialogue qui s’adresse à toutes les créatures. La Parole divine respecte les spécificités de chacun, en appelant à la reconnaissance mutuelle et en œuvrant par la sagesse, la douceur et la preuve argumentative, sans renier l’autre ni le mépriser et en mettant en avant l’amour du croyant pour toutes les créatures. Nous ne voulons ni de la Mecque, ni de Jérusalem, ni de Rome à N’Djamena. Notre foi nous suffit. Le Tchad est et restera un Etat et une République démocratique et irrévocablement laïque. Notre loi fondamentale issue de notre conférence nationale consacre la liberté de conscience pour tous les tchadiens. Nous devons respecter notre constitution. Les étrangers que nous accueillons chez nous doivent respecter nos lois et institution républicaines. C’est l’occasion ici pour moi de mettre en garde tous ceux qui foulent aux pieds les choix de liberté du peuple tchadien : ne réveillez pas le démon. Vous n’avez pas le monopole de la foi !

 


Notre objectif est de colmater notre jarre brisée. C’est un projet honorable, ambitieux et légitime ! Or, nous ne pouvons porter un tel projet de société que si nous bâtissons notre avenir sur des valeurs éthique et morale. Notre éducation nationale et notre école doivent être une éducation et une école créatrices de valeurs communes. Une population bien éduquée, instruite, en bonne santé et qui mange à sa faim. Tel est l’objectif majeur de notre engagement pour le Tchad.

 


Une vie politique saine basée sur des principes éprouvés de justice et de démocratie ; animée par des formations politiques qui se reconnaissent durablement dans des valeurs communes du mieux vivre ensemble. Donner à notre jeunesse les moyens de mettre à l’épreuve son génie créateur. Tels sont aussi  nos objectifs de premier plan dans notre rêve de construire le Tchad. C’est pourquoi, dès que l’occasion nous en sera donnée, nous inscrirons dans notre constitution « l’égalité de chance » comme droit constitutionnel pour chaque citoyen tchadien. Cela nous permettra de jeter les bases de la construction nationale.     

Notre responsabilité collective et individuelle doit être engagée sur ces points. Elle est dédiée aujourd’hui aux attentes aux souffrances des tchadiennes et tchadiens.    

Je ne prends pas rendez-vous seulement avec des militantes et militants du Rdpl, mais avec l’ensemble du peuple tchadien, en particulier avec la jeunesse tchadienne. L’enjeu est plus large et de taille puisqu’il s’agit de donner au Tchad la nouvelle espérance. Donner à notre pays, à notre peuple, la force de croire au changement pour le mettre en œuvre le moment venu. Soyons conscients de ce défi. Soyons-en dignes. Pour ma part, je vous pends en témoins. Je m’y engage de toute mon âme, de toutes mes forces et avec toute votre aide, votre engagement.

 

Vive le Tchad.

 

Kingabé De Tapol Michelot Yogogombaye

Président du RDPL 
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