Les présidents de la sous-région ont donné aux exploitants pétroliers et miniers jusqu’au mois d’avril pour trouver un terrain d’entente avec la Banque centrale concernant le rapatriement de leurs fonds de réhabilitation. D’ici là, des sessions de négociation doivent se tenir chaque mois.

Le communiqué issu du sommet extraordinaire de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) du 16 décembre à Yaoundé est revenu sur le dossier du rapatriement des fonds de restauration des sites miniers et pétroliers par les industries extractives. Alors qu’ils souhaitaient que ce rapatriement soit effectué au 1er janvier 2025, les chefs d’État ont été contraints de repousser l’échéance. La Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) et le joint working group, qui représente les intérêts des opérateurs actifs dans la sous-région, principalement américains – dont ExxonMobil, Marathon Oil, Chevron –, ont désormais jusqu’au 30 avril 2025 pour se mettre d’accord.

Un terrain d’entente a cependant très peu de chances d’être trouvé d’ici là. Les discussions achoppent notamment sur la question de la rémunération des futurs comptes séquestres logés à la BEAC, les industries demandant à ce qu’elle soit supérieure aux frais de tenue des comptes. Actuellement, les pétroliers privilégient des banques domiciliées hors de la Cemac, dans des zones où les taux d’intérêt bancaires sont plus élevés.

Les exigences de la Cemac se heurtent par ailleurs à un principe de réalité : dans les faits, peu d’opérateurs immobilisent effectivement l’argent destiné à la future réhabilitation des sites (soit plusieurs millions d’euros) sur des comptes séquestres, préférant le réinvestir. Ces fonds n’étant pas immédiatement disponibles, le seul moyen à disposition de la BEAC pour les rapatrier sera de négocier un échéancier.

Équilibre fragile

Les pétroliers sont représentés, entre autres, par l’avocat londonien Steven Galbraith dans ces discussions (AI du 05/11/24). Ce dernier était présent le 14 décembre à Douala, pour un nouveau tour de négociations en présence du gouverneur de la BEAC, Yvon Sana Bangui, toujours sous l’égide du directeur Afrique de la Chambre de commerce américaine, Guevera Yao (AI du 23/07/24).

Pour parvenir à s’accorder, un scénario encore hypothétique, les deux parties sont convenus de se rencontrer à chaque fin de mois. La prochaine session se tiendra en janvier à Libreville et la suivante en février à Brazzaville, sous observation des bailleurs (Fonds monétaire international et Banque mondiale), ainsi que des représentants des gouvernements.

Les États de la Cemac veulent continuer de pousser le dossier, y voyant une opportunité de donner de l’air aux réserves de change et d’équilibrer les indicateurs monétaires de la zone franc. Si la politique de contrôle des changes entamée depuis 2018 a permis de monter les réserves de devises à 4,6 mois d’importation de biens et services, l’équilibre reste fragile. Le FMI table sur une « tendance baissière », et craint que le non-respect des critères de convergence par la plupart des États, notamment au niveau de l’endettement, n’aggrave la situation (AI du 13/12/24).

L’immunité de la BEAC, l’autre pomme de discorde

Outre les fonds de réhabilitation, les discussions entre le joint working group et la BEAC achoppent sur la question de la levée de l’immunité de la banque centrale, exigée par les opérateurs privés. Le gouverneur centrafricain a récemment fait un pas vers une éventuelle levée de l’immunité de juridiction, ouvrant la voie à des poursuites à l’encontre de la BEAC. En revanche, il refuse de renoncer à l’immunité d’exécution, qui protège la Banque centrale d’éventuelles saisies.

Africa Intelligence

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