L’ex-président du Burkina Faso a tenté de faciliter le dialogue entre le chef de l’État ivoirien et son ancien premier ministre. Une initiative qui s’est heurtée à la méfiance mutuelle des deux hommes.

C’est sur un échec que Blaise Compaoré s’est envolé pour Dubaï, puis Abu Dhabi, où il est soigné depuis plusieurs semaines au LLH Hospital. Ces derniers mois, l’ancien chef de l’État du Burkina Faso (1987-2014) s’est pleinement mobilisé pour faciliter le dialogue, voire un rapprochement, entre le président ivoirien Alassane Ouattara et son ancien premier ministre Guillaume Soro, devenu son opposant le plus radical et exilé depuis 2019. En vain.

Blaise Compaoré, qui était le mentor de Guillaume Soro lorsqu’il dirigeait la rébellion ivoirienne (2002-2010), s’est démené pour tenter de convaincre Alassane Ouattara d’accepter d’ouvrir un canal de discussion. Pour ce faire, le Burkinabè s’est appuyé sur l’ancien directeur de protocole de Guillaume Soro, Souleymane Kamaraté, alias « Soul to Soul« , qui lui a rendu visite courant mars à sa résidence de Cocody Ambassade, dans le nord d’Abidjan.

Au cours de cet entretien confidentiel, Blaise Compaoré a insisté auprès de Soul to Soul – libéré quelques semaines plus tôt – pour que l’initiative de reprise de contact souhaitée par Guillaume Soro aboutisse à un processus de normalisation et à une rencontre directe. Quelques jours plus tôt, l’ex-chef d’État burkinabè avait transmis à Guillaume Soro, via Soul to Soul, le numéro de téléphone direct du président ivoirien. Ce qui a permis à l’ancien premier ministre d’appeler Alassane Ouattara, avec qui il a longuement échangé pour la première fois depuis près de cinq ans, le 28 mars dans la soirée, puis deux jours plus tard, comme nous l’avions révélé (AI du 04/04/24).

Des relations redevenues exécrables

La reprise des échanges n’a toutefois pu se poursuivre et les efforts de Blaise Compaoré ont achoppé sur des positions figées et une méfiance qui ne s’est pas dissipée de part et d’autre. Guillaume Soro s’est senti trahi par Alassane Ouattara, qu’il suspecte d’avoir volontairement ébruité leurs conversations téléphoniques. Aujourd’hui installé entre Niamey et d’autres capitales ouest-africaines – il a poliment décliné la proposition du président togolais, Faure Gnassingbé, de s’établir à Lomé –, Guillaume Soro n’a pas calmé ses troupes. Son mouvement, Générations et peuples solidaires (GPS), multiplie les critiques à l’encontre du président ivoirien et, plus largement, du parti présidentiel, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP).

De son côté, le chef de l’État ivoirien ne croit plus en la sincérité de la démarche entreprise par son opposant via Blaise Compaoré et est revenu à une posture d’intransigeance. La reprise d’un dialogue constructif et l’éventualité d’une rencontre pouvant finaliser le processus de « réconciliation nationale » lancé en 2020 ne sont plus à l’ordre du jour. Les relations entre les deux hommes et leurs mouvements sont redevenues exécrables.

Soul to Soul reste poursuivi par la justice ivoirienne dans le cadre de l’affaire de l’acquisition de la résidence de Guillaume Soro à Marcory Résidentiel, au cœur de la capitale, et son procès a été reporté à la rentrée. Blaise Compaoré, dont la santé est fragile, prévoit de revenir d’Abu Dhabi à Abidjan début août. Mais son dessein de réconcilier le président ivoirien avec son meilleur ennemi appartient au passé.

Africa intelligence

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