Si le Tchadien Moussa Faki est assuré de garder la présidence de la Commission de l’UA, le poste de vice-président, qui gère les finances, et celui de commissaire « politique et sécurité » font l’objet d’une très vive concurrence. Africa Intelligence révèle les noms des principaux prétendants, leurs chances d’arriver et les officiels à la manœuvre.

A Addis Abeba, au siège de l’Union africaine (UA), tous les regards se tournent désormais vers le « panel d’éminents Africains » nommés par la conférence des chefs d’Etat du continent en début d’année. La mission de ce groupe, dirigé par l’ancien premier ministre camerounais Philémon Yang : présélectionner, parmi quelque 90 candidatures, les hommes et les femmes qui prendront leurs fonctions en 2021 aux six postes de commissaires et à celui de vice-président.

Philémon Yang sera épaulé dans cette mission par trois autres « éminents Africains » issus de toutes les régions du continent (lui-même représentant l’Afrique centrale). Il s’agit, pour l’Afrique de l’Est, de Konjit Sinegiorgis (ambassadrice éthiopienne ayant participé à la création de l’Organisation de l’Union africaine en 1963) ; pour l’Afrique australe, de Tuliameni Kalomoh (conseiller pour les affaires étrangères du président namibien) et, pour Afrique de l’Ouest, de Hassan Bubacar Jallow (Chief Justice de la Gambie). L’Afrique du Nord, quant à elle, n’a pas encore désigné son représentant. L’essentiel du travail d’examen des candidatures sera assuré par le cabinet d’audit PwC, qui doit, avant le sommet de l’UA de janvier à Addis Abeba, établir un premier classement des dossiers pour que les délégués puissent voter sur un nombre plus limité de personnalités.

Une vice-présidence au féminin

Dans la liste transmise début septembre aux ambassades des pays membres de l’UA, à laquelle a eu accès Africa Intelligence, le président actuel de la commission, le Tchadien Moussa Faki, n’a pas de concurrent. Il sera de fait, sauf coup de théâtre de dernière minute, élu début 2021 pour un nouveau mandat (Africa Intelligence du 16/09/20).

En revanche, huit candidats se disputent le poste de vice-président, qui a notamment la haute main sur les finances et les nominations à l’UA. Parmi eux, trois hommes : Awale Kullane, actuel ambassadeur de Somalie en Chine, Ndumiso Ndima Ntshinga, qui fut jusqu’en 2019 l’ambassadeur de l’Afrique du Sud en Ethiopie et Edward Maloka, directeur général du secrétariat du mécanisme d’évaluation par les pairs africains, ces deux derniers étant présentés par Pretoria. Ils n’ont, sur le papier, aucune chance d’être désignés car, selon la réforme de l’institution menée par le président rwandais Paul Kagame, le vice-président de la commission doit obligatoirement être une femme si le président est un homme.

Le choix devrait par conséquent se faire parmi les cinq candidates en lice : Martha Ama Akyaa Pobee, ambassadrice du Ghana à l’ONU, Fatoumata Tambajang, ancienne vice-présidente de la Gambie, Hasna Barkat Daoud, avocate et ancienne ministre de Djibouti, Pamela Mbabazi, professeure et présidente de l’Autorité nationale de planification ougandaise et Monique Nsanzabaganwa, vice-gouverneure de la National Bank of Rwanda.

Bataille pour le poste de « président bis »

Un troisième poste concentre toutes les attentions : le commissariat des affaires politiques, paix et sécurité. Pour la première fois depuis la réforme, les affaires politiques ne constituent plus un portefeuille à part entière et sont adjointes à la paix et à la sécurité. Cela conférera au premier titulaire de cette fonction une latitude considérable, certains dans les couloirs de la commission n’hésitant pas à évoquer une sorte de « président bis ». Aucun candidat d’Algérie ne figure sur la liste des quinze postulants alors que, depuis 2003, le commissaire paix et sécurité a toujours été citoyen de ce pays. Alger n’a d’ailleurs présenté personne dans le cadre de ce renouvellement.

Le Maroc, toujours en opposition avec son voisin algérien sur la question du Sahara occidental, souhaite voir l’ancien ambassadeur en France et en Italie, Hassan Abouyoub, succéder à l’Algérien Smaïl Chergui. Alger devrait cependant peser de tout son poids pour que ce ne soit pas le cas. Comme nous l’avions révélé dès le mois de juin, le candidat ayant les plus grandes chances de remporter le trône est l’ancien ambassadeur nigérian à Addis Abeba jusqu’en 2019, Bankole Adeoye (Africa Intelligence du 10/06/20). Ancien haut cadre du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), Adeoye n’a pas vraiment de concurrent en zone Cedeao, à part le Guinéen Mamady Condé, ancien ambassadeur à Washington et ex-ministre des affaires étrangères. L’actuelle commissaire aux affaires politiques, la burkinabée Amina Samaté, aurait assez peu de chance d’être reconduite. En dehors de l’Afrique de l’Ouest, le président mozambicain Filipe Nyusi compte sur son ex-vice-ministre des affaires étrangères Maria Manuela dos Santos Lucas et l’Afrique du Sud mise tout sur l’actuel représentant spécial de l’ONU et de l’UA dans leur mission conjointe au Darfour (Minuad), Jeremiah Kingsley Mamabolo. Enfin, le président nigérian Muhammadu Buhari fait de la victoire de son candidat une affaire personnelle depuis plusieurs mois, mais le combat avec d’autres géants du continent risque d’être âpre.

Rabat se contenterait de la santé

Revenu au sein de l’UA en 2017, le Maroc, qui présente des candidats pour cinq des six postes de commissaires, pourrait largement être comblé par le portefeuille de la santé pour lequel il présente le patron de l’Institut Pasteur du Maroc, le professeur Abderrahmane Maaroufi. Le royaume se démène depuis plusieurs mois pour accueillir le Centre de contrôle des maladies de l’Union africaine. Maaroufi s’est d’ailleurs déjà déplacé plusieurs fois à Addis Abeba pour faire avancer ce dossier.

Tchadanthropus-tribune avec la lettre du Continent

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