Merci à M. Yves Cadiou, ancien commandant de la 1ère compagnie, 3ème RIMa, pour son éclairage personnel sur le conflit.Entre 1978 et 1987, la Libye du colonel Kadhafi, récemment disparu au terme du soulèvement qui précipite la chute de son régime, intervient par quatre fois au Tchad. Si la Libye s’est impliquée dans la guerre civile au Tchad avant même la révolution qui porte au pouvoir Kadhafi en septembre 1969, les interventions militaires du dictateur visent avant tout à mettre la main sur le territoire contesté du nord du Tchad, la fameuse bande d’Aouzou. Kadhafi cherche sans doute à faire du Tchad une « république islamique », à l’image de la Libye, un état-client qui pourrait servir de tremplin à ses ambitions en Afrique centrale. Pour ce faire, Kadhafi s’appuie sur des mouvements rebelles tchadiens qui fournissent plus ou moins grâcieusement une infanterie d’appoint et une force de reconnaissance bien utiles pour une armée libyenne construite selon un schéma conventionnel. La France, de son côté, vient à trois reprises au secours des différents gouvernements tchadiens menacés par des rebelles soutenus par Kadhafi -en 1978, en 1983 et enfin en 1986. Au final, l’armée libyenne, privée de ses alliés tchadiens, est vaincue par les tactiques mises en oeuvre par l’armée d’Hissène Habré, utilisant de nouveaux matériels (automitrailleuses, pick-ups Toyota, missiles antichars MILAN, missiles sol-air Redeyes). Mobilité stratégique, manoeuvres tactiques, attaques « en essaim », effet de surprise, raids en profondeur dans le dispositif adverse, tels ont été les moyens qui ont permis aux Tchadiens de l’emporter dans ce que l’on a parfois baptisé la « guerre en Toyota ». A l’heure de l’intervention française au Mali (opération Serval), il n’est pas ininteréssant de revenir sur ces opérations qui rappellent, par certains côtés, celles se déroulant actuellement aux lisières du Sahel, dans la tradition du rezzou.


La Libye, Kadhafi et le Tchad.

L’implication libyenne au Tchad remonte bien avant 1969, année du coup d’Etat de Kadhafi. En 1965, des rebelles tchadiens créent le FROLINAT contre la présidence autoritaire et de plus en plus isolée de François Tombalbaye. En août 1968, les Toubous de la Garde Nationale et Nomade se mutinent dans l’Aouzou. Les relations entre la Libye et le Tchad sont anciennes en raison des migrations nomades entre les deux pays, et la sénoussiya, confrérie de Muhammad al-Sénoussi née au XIXème siècle en Cyrénaïque, creuset du nationalisme libyen, avait essaimé au sud, dans le Tibesti, près du lac Tchad et jusqu’au Darfour pour contrer la conquête de l’Algérie française et étendre son influence. En outre la Libye a des revendications non satisfaites sur la partie nord du Tchad qui remontent au temps de la colonisation italienne. Cependant, le roi Idriss 1er ne veut pas d’une confrontation avec le pouvoir tchadien soutenu par la France, et ne fournit pas d’armes aux rebelles, simplement une aide logistique et un sanctuaire.
Tout change avec l’arrivée au pouvoir de Kadhafi. Celui-ci revendique rapidement la bande d’Aouzou, au nord, soit un sixième du Tchad, en se référant à un traité non ratifié conclu en 1935 entre l’Italie, qui tient alors la Libye, et la France qui occupe le Tchad. Kadhafi ne s’embarrasse pas des précautions d’Idris et fournit un armement aux rebelles du FROLINAT. En 1971, celui-ci lance un coup d’Etat contre Tombalbaye qui manque de peu de réussir. Le président tchadien, voyant sa position s’affaiblir, convient alors qu’il doit négocier avec Kadhafi. En décembre 1972, il accepte l’occupation de la bande d’Aouzou par la Libye en échange de l’arrêt du soutien au FROLINAT. Six mois plus tard, les troupes libyennes investissent la région et ses principales villes, et créent une base aérienne près de l’oasis d’Aouzou. Pour Kadhafi, l’occupation de la bande d’Aouzou (qui recèle des richesses supposées en uranium) est aussi le moyen de placer la Libye comme pôle de puissance régionale, tout en se protégeant au sud contre l’Egypte avec lesquelles les relations sont au plus mal depuis 1979. Un vrai test de puissance pour la Libye, face à la France, l’ancien colonisateur, qui tente de modérer Kadhafi en augmentant les échanges commerciaux, y compris militaires, tout en restant très circonspecte sur l’intervention libyenne au Tchad.

Le 13 avril 1975, Tombalbaye est renversé et tué par l’armée qui porte au pouvoir le général Félix Malloum. L’un des motifs du coup d’Etat est la reculade devant la Libye : Malloum dénonce aussitôt le traité signé par son prédécesseur et reprend le soutien aux rebelles libyens opérant depuis le Tchad. Kadhafi fait de même de son côté : les rebelles sont organisés désormais au sein de la 1ère armée de libération dirigée par Ahmed Acyl, surtout composée d’Arabes du Tchad, et de la 2ème armée de libération menée par Goukouni Oueddei et Hissène Habré (comprenant des Toubous, mais de différents clans, du nord du Tchad). Cette dernière armée va bientôt se scinder sur la question du soutien libyen : Habré, qui y est hostile, se dégage du FROLINAT et opère seul, tandis que Oueddei crée les Forces Armées Populaires avec le soutien de Tripoli. Kadhafi entame une campagne de communication laissant entendre qu’il pourrait annexer la bande d’Aouzou : à la fin de l’année, l’armée libyenne, aux côtés du FROLINAT, occupe déjà, de fait, le tiers nord du Tchad.
La première intervention libyenne (1978)

 

En 1978, l’armée libyenne aide le FROLINAT à passer à une guerre conventionnelle contre le régime de Malloum et internationalise, en quelque sorte, le conflit tchadien. En janvier, les forces de Goukouni, bien ravitaillées en AK-47, en bazookas, en mortiers de 81 et 82 mm et en canons sans recul, occupent le Tibesti, au nord-ouest du Tchad. Puis le FROLINAT se tourne vers le sud avec le soutien libyen. Les rebelles fournissent la reconnaissance du terrain et l’infanterie, Kadhafi les blindés, l’artillerie et l’aviation. En février, 2 500 rebelles, soutenus par 4 000 Libyens, attaquent la ville de Faya Largeau, au centre-nord du Tchad. Les 5 000 hommes de l’armée tchadienne sont rapidement dépassés par la puissance de feu des chars et des avions libyens : 1 500 défenseurs sont capturés. Les rebelles tchadiens déploient un armement de plus en plus sophistiqué, puisqu’ils sont déjà équipés de missiles sol-air portables SA-7 et de LRM BM-16 qui ont joué un rôle important dans la victoire au sol.

Une force de 800 Libyens reste à Faya Largeau et l’offensive reprend en avril vers N’Djamena. Malloum demande alors l’aide de la France, qui dépêche au total 2 200 hommes et des chasseurs-bombardiers Jaguar: c’est l’opération Tacaud. Les Jaguars opèrent en toute impunité car les MiG et Mirage libyens ont reçu l’ordre de ne pas les affronter directement. Le régime de Malloum bénéficie donc de la supériorité aérienne. En outre, les forces françaises reçoivent l’autorisation d’être engagées dans les combats au sol dès la bataille à Salal (15-25 avril). Dans une série de batailles près de N’Djamena et Ati en mai et devant Djedaa en juin, les troupes gouvernementales soutenues par la France repoussent le FROLINAT, qui a perdu 2 000 hommes et un important matériel, jusque dans la bande d’Aouzou. Les troupes françaises jouent un rôle important lors des batailles d’Ati et de Djedaa : s’ouvre d’ailleurs pour la France, et pour une armée dont le rôle des unités professionnelles s’amplifie, l’ère des opérations dites extérieures, et en particulier celles en milieu désertique.

Malloum s’entend ensuite, fin 1978, avec Hissène Habré, rapidement nommé Premier Ministre, qui a bâti une force solide de 2 000 soldats Toubous. Au sein du FROLINAT, l’échec de 1978 ravive la querelle à propos du soutien libyen. La 1ère armée de libération (appelée aussi armée Volcan) y reste favorable, mais n’est pas très efficace sur le plan militaire. Goukouni, méfiant envers les intentions des Libyens, ne veut s’allier à ces derniers que de manière temporaire. En février 1979, Habré chasse Malloum de N’Djamena et défait l’armée gouvernementale. Goukouni arrive immédiatement vers la capitale pour contester la prise du pouvoir par Habré. Finalement, Habré, Goukouni et le colonel Wadal Kamougue, qui commande les restes de l’armée régulière, s’accordent sur le souhait de chasser les Libyens du Tchad et forment le GUNT.

La deuxième intervention libyenne (1979) Kadhafi réagit en ordonnant l’invasion du nord du Tchad en 1979. Plusieurs milliers d’hommes appuyés par des blindés et un soutien aérien, ainsi que l’armée Volcan, marchent sur Faya Largeau. Mais les Libyens ne disposent plus de l’habileté tactique des Toubous et Goukouni repousse l’assaillant avec le soutien aérien français autour de Faya Largeau entre avril et août 1979. Habré prend cependant l’ascendant sur ses partenaires et chasse le GUNT de N’Djamena le 16 mars 1980, rebaptisant son armée les FAN D’abord battues par Goukouni au nord de N’Djamena, Habré parvient à chasser les forces du GUNT au nord, reprenant Faya Largeau et Ounianga Kebir ainsi que les plaines septentrionales des Toubous. Le 1er avril, Habré écrase le colonel Kamougue au sud de N’Djamena, privant Goukouni de son seul allié possible. Celui-ci doit donc demander, à nouveau, l’appui libyen. Kadhafi souhaite retourner au Tchad, mais a compris que Goukouni n’est pas un allié fiable et qu’il doit accroître son engagement. Le GUNT est regroupé et encadré au sud de la Libye. Goukouni doit accepter qu’un officier libyen, Mansur Abd al-Aziz, prenne la tête des forces du GUNT. En août 1980, Kadhafi concentre des unités régulières et d’autres de la Légion Islamique à Sabha, au sud de la Libye. En octobre 1980, avant qu’Habré ait pu consolider davantage sa mainmise sur le pouvoir, l’armée libyenne, le GUNT et l’armée Volcan passent à l’offensive au Tchad. Kadhafi engage 7 000 soldats réguliers avec 300 chars T-55, plusieurs batteries de LRM BM-21 Grad, une bonne partie de la Libyan Air Force et 7 000 hommes de la Légion Islamique. Pour maintenir à distance l’aviation française, une imposante DCA comprenant des SAM mobiles SA-6 et des canons automoteurs ZSU-23/4 fournit un parapluie antiaérien. Le GUNT et l’armée Volcan rajoutent 6 à 7000 combattants au total. En face, Habré ne dispose que de 4 000 soldats à peine, sans armement lourd.
La troisième intervention libyenne (1980-1981)

Les Libyens commencent leur offensive en aérotransportant des troupes dans la bande d’Aouzou et foncent sur Faya Largeau. Fin octobre, l’attaque se développe et les FAN sont terrifiées par la puissance de feu libyenne. Les hommes du GUNT détectent les positions adverses, puis les Libyens arrivent sur zone, se retranchent et font donner les chars, l’artillerie et l’aviation devant lesquels les FAN sont totalement dépourvues. Les raids aériens libyens, en particulier, sèment souvent la panique parmi les soldats tchadiens ; s’ils ne s’enfuient pas, les chars, ou en dernier recours les hommes du GUNT, achèvent le travail.
Début novembre, les Libyens sont maîtres de Faya Largeau et en font une base logistique. A la fin du mois, ils sont à 60 km au nord de N’Djamena, à Dougia, où Habré a replié ses troupes pour un ultime combat. L’assaut sur la capitale, coordonné par des conseillers soviétiques et est-allemands, commence le 8 décembre et il est d’abord mené par le GUNT. Les Libyens dépêchent cependant en soutien de 3 à 5 000 hommes, 200 chars T-55 et toute leur artillerie, LMR compris. Les combats sont acharnés et les Libyens expédient pas moins de 10 000 obus pendant les trois derniers jours de la bataille. La ville tombe le 15 décembre. Kadhafi a réalisé son objectif : Goukouni est maître de N’Djamena mais doit sa position à la Libye, et aux 15 000 soldats libyens présents au Tchad. La campagne représente un véritable succès logistique pour l’armée libyenne mais s’est révélée coûteuse : 1 500 tués et probablement de 4 à 6 000 blessés dans le camp de Kadhafi.

En janvier 1981, celui-ci tente de forcer la main à Goukouni venu à Tripoli en lui proposant une fusion entre le Tchad et la Libye. Goukouni, rentré à N’Djamena, rejette violemment les offres de Kadhafi et les troupes du GUNT affrontent les Libyens près d’Abéché en avril 1981. Réalisant qu’il est allé trop loin, Kadhafi retire ses troupes dans la bande d’Aouzou en octobre – un autre exploit logistique de la part des Libyens. Mais Habré, lui, a reconstruit les FAN au Soudansoutenu par plusieurs Etats occidentaux et arabes (France, Etats-Unis, Egypte) qui voient d’un mauvais oeil la mainmise libyenne sur le Tchad. En mai 1982, les FAN reviennent au Tchad et le 5 juin, à Massaguet, au nord de N’Djamena, Habré écrase les troupes du GUNT. Celles-ci se replient vers leur place forte du Tibesti tandis que Oueddei se réfugie au Cameroun. Le 7 juin, Habré entre dans N’Djamena et se proclame président du Tchad. Kadhafi recueille les troupes du GUNT mais ne contre-attaque pas tout de suite : il veut se préserver le soutien de l’Afrique et hésite à investir tant d’efforts pour un gain politique jusque là assez faible. Il préfère consolider ses troupes dans la bande d’Aouzou.
La quatrième intervention libyenne (1983-1986)

C’est en 1983 seulement que Kadhafi se sent prêt pour une nouvelle offensive au Tchad. 11 000 hommes sont déployés dans la bande d’Aouzou, surtout des réguliers car la Légion Islamique n’a pas donné satisfaction en 1981. Mais Kadhafi n’envoie que quelques milliers d’hommes, surtout des unités l’artillerie et de logistique, et cherche à faire porter le gros des combats sur le GUNT. En avril 1983, les Libyens et le GUNT défont la garnison de Dirbali : 142 hommes des FAN sont tués et 252 capturés sur 1 700 au total. Le 25 juin, le GUNT prend Faya Largeau, puis Abéché et marche sur N’Djamena. Habré rallie le reste de son armée, désormais baptisée FANT, et affronte le GUNT près d’Abéché en juillet. Il écrase les troupes du GUNT, reprend Abéché puis Faya Largeau et menace d’entrer dans la bande d’Aouzou.

La défaite de Goukouni pousse Kadhafi à intervenir, cette fois-ci en force. Sans l’appui des chars et de l’aviation libyenne, le GUNT est condamné à l’échec face aux FANT. Or Kadhafi ne peut se permettre de laisser Habré l’emporter : outre la perte de prestige que cela occasionnerait, Habré soutiendrait aussitôt les mouvements rebelles libyens pour le déstabiliser. Ainsi, en août 1983, une autre invasion du Tchad a lieu, éclairée par les hommes du GUNT. Les Libyens engagent 11 000 hommes, presque tous réguliers, des chars, des véhicules blindés, de l’artillerie, 80 avions de combat, mais qui restent encore dans un rôle de soutien derrière le GUNT. Habré, de son côté, a concentré ses 5 000 hommes autour de Faya Largeau, le long de la route traditionnelle d’invasion. Le 10 août, les Libyens et le GUNT passent à l’assaut précédés d’un déluge d’artillerie, de LRM et de chars, et d’un pilonnage effectués par les Su-22 et les Mirages opérant depuis la bande d’Aouzou et par les Tu-16 décollant de Sabha. Les FANT sont rapidement débordées par les attaques du GUNT appuyées par les chars libyens. Habré ordonne la retraite après avoir perdu 700 tués, mais parvient à s’échapper sur N’Djamena.Habré, à l’image de Malloum en 1978, demande alors l’appui français, d’autant plus facilement accordé que les Etats-Unis eux-mêmes sont alors aux prises avec Kadhafi, et poussent Paris dans ce sens. L’opération Manta, lancée le 10 août, déploie rapidement 3 500 hommes et plusieurs escadrilles de Jaguars au Tchad. Quand les Libyens et le GUNT se remettent en marche, les Français ont établiune ligne défensive le long du 16ème parallèle, de Salal à Abéché d’ouest en est. Habré se sert de la protection française pour contre-attaquer : début septembre, à Oum Chalouba, au centre du Tchad, au sud-est de Faya Largeau. Assuré du parapluie aérien français, les FANT reprennent Oum Chalouba le 6 septembre et Faya Largeau quelques semaines plus tard. Kadhafi répond en envoyant ses appareils larguer du napalm et du phosphore blanc, qui tuent de nombreux civils dans les deux localités. Habré lance une incursion dans la bande d’Aouzou, mais la France refuse de mener des opérations aériennes offensives en soutien. En outre les FANT s’essoufflent : Habré s’est assuré le concours de 2 000 soldats zaïrois, mais la force réunie ainsi manque de cohésion. Et les Libyens défendent davantage la bande d’Aouzou qu’ils considèrent maintenant comme faisant partie du territoire national.

En avril 1984, la guerre étant dans l’impasse, la France propose à la Libye un retrait mutuel des troupes au Tchad. Un accord est signé en septembre et les troupes françaises partent en novembre. Les Libyens maintiennent cependant secrètement 6 000 de leurs soldats dans le nord du Tchad. Loin de se retirer, ils améliorent les routes entre leur territoire et la bande d’Aouzou et construisent une nouvelle base aérienne à Wadi Doum, au nord-est de Faya Largeau, pour mieux appuyer les opérations au-delà de la bande d’Aouzou. Dès décembre 1984, les Libyens reprenent l’offensive au Tchad. Ils demeurent cependant prudemment au nord du 16ème parallèle. A la mi-1985, les Libyens alignent 7 000 hommes, 300 chars et 60 avions de combat. Le GUNT, qui a supporté l’essentiel des pertes dans les dernières années de guerre, ne compte plus que 2 à 3 000 combattants. Les Libyens doivent donc assumer davantage les opérations militaires et se reposent sur leur puissance de feu pour l’emporter.
L’équilibre des forces se renverse

Alors que l’armée libyenne est engagée au Tchad, Kadhafi continue d’être lui-même victime de tentatives de coups d’Etat. En janvier 1983, une tentative ratée conduit à l’exécution de 5 officiers supérieurs dont le commandant adjoint de la milice populaire. En mai 1984, un autre soulèvement mène à des combats à Tripoli devant une caserne où Kadhafi avait l’habitude de passer la nuit. 5 000 personnes sont arrêtées, torturées et plus d’une centaine exécutée. En mars 1985, un nouveau complot est déjoué au sein de l’armée et 60 officiers supérieurs sont arrêtés. Finalement, en novembre, le colonel Ishkal, gouverneur de la province de Syrte, celle d’où vient Kadhafi, est passé par les armes sous motif de s’être opposé à la politique étrangère et militaire du dictateur.

En conséquence, celui-ci sépare plus étroitement les fonctions militaires de celles de sécurité en multipliant les services de renseignement et autres organismes de surveillance. Il étend les « comités révolutionnaires » similaires aux « cellules » du parti communiste à l’armée. Il crée ensuite la Jamahiriyyah, une véritable garde prétorienne de plusieurs milliers d’hommes de sa tribu d’origine équipée des meilleurs armements dont des missiles sol-air SA-8. Kadhafi n’autorise pas la création de divisions au sein de son armée et tout commandement au-dessus de la brigade doit être constitué pour ainsi dire ad hoc. La milice et les unités de réserve sont fréquemment attachées aux unités régulières pour renforcer la loyauté à sa personne. Kadhafi multiplie les chaînes de commandement, restreint la taille des exercices et interdit de se servir de munitions réelles, de peur qu’elles ne soient retournées contre lui ! Au Tchad, en revanche, il laisse des officiers compétents sur le terrain, se sentant peu menacé en raison de la distance. Mais les garnisons sont parfois alimentées avec des bataillons venant de différentes brigades, chacun obéissant à son unité-mère, ce qui rend difficile une défense coordonnée…
L’équilibre des forces en présence se renverse, pourtant, et pas en raison des changements propres à l’armée libyenne. Les tactiques qu’elles emploient -utilisation massive de la puissance de feu, éventuellement assauts frontaux, plutôt lents- peuvent être menées à bien par l’armée même après les choix faits par Kadhafi. Le changement majeur intervient dans les FANT.

Les Etats-Unis, en effet, sous le président Reagan, deviennent de plus en plus hostiles à la Libye et s’apprêtent à soutenir activement Hissène Habré. En 1985, ils fournissent armes, renseignement, financement et soutien diplomatique. Avec la France, ils offrent aussi des équipements plus modernes, un entraînement et un soutien logistique. Habré et ses lieutenants ont l’intelligence de choisir ce qui peut les servir au mieux : ils déclinent les chars, véhicules blindés et l’artillerie lourde et optent pour des automitrailleuses, des pick-ups, des armes automatiques, des lance-grenades, des fusils sans recul, des mortiers, des missiles antichars et des armes antiaériennes. Les FANT demandent en particulier des missiles sol-air FIM-43 Redeye et des missiles antichars MILAN.

Les forces de Hissène Habré vont pouvoir ainsi mettre au point de nouvelles tactiques et contrer l’emploi des chars et des avions libyens. Une des grandes difficultés des FANT était, de fait, de passer des tactiques de guerre du désert à celle d’une infanterie classique opérant en masse. Le nouvel équipement, et en particulier les pick-ups Toyota combinés à des armes collectives, permet aux hommes des FANT de revenir à leurs tactiques traditionnelles tout en y ajoutant la mobilité et la puissance de feu. Mouvements rapides, puis concentration des forces redeviennent le credo des guerriers Toubous. Ces véhicules redonnent une mobilité stratégique et une manoeuvrabilité tactique qu’avaient perdu les Tchadiens lorsqu’ils avaient adopté un armement moderne. Désormais, dans les combats, ils opèrent selon la tactique de « l’essaim », frappant les véhicules libyens de flanc et sur plusieurs directions simultanément. Ils maintiennent un rythme soutenu dans leurs opérations, pour dépasser les Libyens trop lents à réagir, pour isoler leurs petites unités et les détruire par des attaques multidirectionnelles. Les FANT se déplacent sans cesse, empêchant le recours à la puissance de feu, attaquant les blindés et les fortifications de flanc ou sur l’arrière. Des conseillers militaires occidentaux se chargent aussi de la logistique d’Hissène Habré qui entravait beaucoup jusque là les opérations. Enfin, Habré peut compter sur des cadres rompus au combat contre le GUNT et les Libyens : Idriss DébyAhmed Gorou, Muhammad Nouri et surtout Hassan Djamous, qui commande l’armée principale des FANT en 1986 et que certains observateurs occidentaux comparent alors à Rommel ! Ces chefs organisent les FANT en compagnies de 150 hommes avec une douzaine de pick-ups : avec les appuis, des unités plus grandes sont formés de la taille du bataillon, voire de la brigade.La défaite libyenne (1986-1987)

Pour les Libyens, ces changements passent inaperçus. Kadhafi pense qu’une nouvelle offensive en 1986 suffira à obtenir la décision comme les années précédentes. Le choc face aux tactiques du FANT, qui ne sont pas soutenues au départ par un appui aérien ou une intervention étrangère, n’en sera que plus dur. Début février 1986, les Libyens et le GUNT passent à l’attaque en direction du sud. L’ampleur de l’offensive est sans précédent : les Libyens engagent 5 000 hommes avec des chars et de l’artillerie, de l’aviation, appuyés par 5 000 hommes du GUNT ou de l’armée Volcan. Le 10 février, ils attaquent Kouba, Olonga, Kalait et Oum Chalouba et s’emparent des deux dernières localités. Mais le 13 février, les FANT, utilisant leurs nouveaux équipements et leurs nouvelles tactiques, contre-attaquent et chassent le GUNT et les Libyens. Ceux-ci sont forcés de se replier jusqu’à la bande d’Aouzou et incapables de reprendre l’offensive jusqu’en mars. Habré persuade aussi la France, humiliée par le retrait inutile de 1984, d’engager à nouveau 1 500 hommes et des Jaguars au Tchad : c’est opération Epervier. Dès le 16 février 1986, les avions français attaquent les bases aériennes libyennes et en particulier celle de Wadi Doum. Le lendemain, un bombardier Tupolev Tu-22 libyen attaque N’Djamena en représailles, mais s’écrase au retour, peut-être victime de la DCA tchadienne au-dessus de la capitale ; le 18 février, un MiG-25R libyen fait une passe d’intimidation au-dessus de N’Djamena. Le dispositif français s’articule surtout autour de sa composanteaérienne et antiaérienne, mais les Libyens, sur le plan aérien, ne sont pas immédiatement surclassés.

Kadhafi réagit en renforçant son dispositif pour le porter au même niveau que lors de l’invasion de 1983. Cette fois-ci les Libyens disposent même d’armes plus modernes : des chars T-62, des véhicules blindés BMP-1. Mais au lieu de s’adapter face aux nouvelles tactiques des FANT, ils privilégient le nombre et la puissance de feu : Kadhafi double l’effectif et expédie chars, artillerie et avions pour renforcer le corps expéditionnaire. Avant que l’armée libyenne ne soit prête, pourtant, le GUNT, qui ne compte plus que 2 000 combattants, déserte le camp de Kadhafi et se réfugie dans sa place forte du Tibesti, chassant les garnisons libyennes de Bardai, Wour et Zouar. Début décembre, les Libyens envoient un détachement de 2 000 hommes avec des chars T-62 et de l’aviation pour déloger le GUNT. Les Libyens reprennent les trois localités ; Hissène Habré envoie rapidement 2 000 hommes des FANT pour appuyer Goukouni. Les opérations sont difficiles dans un terrain montagneux qui prive les FANT de leur capacité manoeuvrière, les Libyens se montrant plus efficaces en défense statique. Les Tchadiens réussissent malgré tout à reprendre Zouar et Wour en janvier 1987, mais les Libyens ne sont chassés de la région qu’en mars, après la victoire tchadienne à l’est. Ceux-ci sont néanmoins privés de leur infanterie d’appoint des Toubous et surtout de sa capacité de reconnaissance, et vont devoir engager directement les FANT, qui vont exceller dans la mise en oeuvre des tactiques « en essaim » .

Au début 1987, Kadhafi aligne au nord du Tchad 8 000 hommes, 300 chars, plusieurs centaines de pièces d’artillerie et de LRM, des hélicoptères de combat Mi-24 Hind et 60 avions de combat. 2 500 hommes sont engagés dans le Tibesti (Groupe opérationnel sud), le reste étant concentré dans le Groupe opérationnel Est basé à Faya Largeau. Le QG de théâtre est à Wadi Doum. En face, Habré a bâti une force régulière de 10 000 combattants soutenus par 20 000 irréguliers locaux. La force principale des FANT, 4 à 5 000 hommes, est conduite par Hassan Djamous et Ahmed Gorou. Elle dispose de 70 automitrailleuses Panhard ou V-150 américaines et de plus de 400 pick-ups Toyota armés de mitrailleuses, de canons sans recul, de mortiers, de lance-grenades et de missiles antichars MILAN.

Le 2 janvier 1987, Habré prévient l’offensive libyenne en attaquant Fada, défendue par 1 200 Libyens, des chars et de l’artillerie. Utilisant les tactiques « en essaim », les FANT emportent la place en 8 heures, tuent 784 Libyens et en capturent 81 tout en détruisant 92 chars T-55 et 33 BMP-1 (29 véhicules capturés), perdant de leur côté de 18 à 50 tués et de 50 à 100 blessés, et 3 véhicules. La défaite à Fada surprend les Libyens, qui croyaient leurs positions fixes invulnérables. En outre, pour gêner l’action de leur aviation, les appareils français attaquent à nouveau les pistes de Wadi Doum le 7 janvier et détruisent également les installations radars avec des missiles appropriés. En conséquence, Kadhafi dépêche plusieurs bataillons de renfort, dont des unités de la Jamahiriyyah, pour appuyer Faya Largeau et Wadi Doum. En mars, 11 000 soldats libyens sont installés au nord du Tchad. Habré vise ensuite Faya Largeau, mais comprend que s’il prend d’abord Wadi Doum, les Libyens seront forcés d’abandonner la première ville, faute de pouvoir assurer son ravitaillement.

Wadi Doum est tenue par une garnison de 6 à 7 000 Libyens équipés de 200 à 300 chars ou véhicules blindés. Les défenses s’étalent sur 6 km autour de la base, qui comprend une piste aérienne avec plusieurs escadrilles de chasseurs-bombardiers et d’hélicoptères. Les Libyens la considèrent comme imprenable : les FANT vont donc chercher à affaiblir psychologiquement et numériquement l’adversaire avant d’attaquer la place directement. Elles harcèlent la garnison pour l’inciter à conduire une contre-attaque sur Fada. Mi-mars, la garnison tombe dans le panneau et envoi un détachement de 1 500 hommes avec des blindés pour relever le gant. Des éclaireurs tchadiens suivent la colonne. Le soir du 18 mars, les Libyens forment un camp en cercle autour de B’ir Kora. Djamous encercle de nuit la position libyenne avec les FANT. Le 19 mars, à l’aube, celles-ci passent à l’attaque. Un diversion lancée d’un côté du camp libyen provoque la panique du commandant de l’unité qui dépêche ses réserves sur ce point. Les FANT lancent ensuite l’assaut principal de l’autre côté du camp et pénètre le périmètre, semant la confusion chez les Libyens en les attaquant sur leurs arrières, tandis que la force de diversion continue ses attaques frontales. Les Libyens demandent des renforts à Wadi Doum, finalement expédiés trop tard et qui sont anéantis par les FANT dans la nuit du 19 mars, au nord de B’ir Kora. Au total, les Libyens déplorent 800 morts et comptent 86 chars T-55 détruits et 13 capturés.

Wadi Doum est mûre pour la curée. Les 4 à 5 000 hommes restants sont démoralisés par la perte de leurs camarades à B’ir Kora. Fin mars, les FANT, 2 à 3 000 hommes menés par Djamous encerclent la base. Contrairement aux Libyens qui ignorent tout de leurs positions, les Tchadiens reconnaissent soigneusement les approches de Wadi Doum et en particulier les avenues praticables dans les champs de mines. Le 22 mars, l’attaque commence. Les combats les plus durs sont menés pour percer le périmètre défensif extérieur, mais les FANT attaquent sur deux points ce qui leur facilitent la tâche. Les Libyens engagent leur réserve trop tardivement et par la brèche qu’elles ont créée, les FANT se répandent dans la base. L’artillerie libyenne, prise de cours, ne peut tirer un seul obus ! Quatre heures après le début de l’attaque, la défaite est consommée. Les Libyens tentent de contre-attaquer pendant la nuit mais échoue. L’aviation n’est que de peu d’utilité contre les colonnes de pick-ups tchadiens roulant vite et se dispersant aisément, car elle doit voler au-dessus de 3 000 m en raison de la menace des Redeyes. Les Libyens laissent dans l’affaire 1 269 tués, 438 prisonniers dont le colonel Haftar, commandant le Groupe Opérationnel Est, 89 chars T-55, 120 BMP-1, 11 avions légers L-39, deux bombardiers Tu-22B, deux SF-260W, 4 Mi-24 et plusieurs batteries de SA-6 et de SA-13. Les unités de la Jamahiryyah ont partculièrement souffert. Les Tchadiens ne comptent que 29 tués et 58 blessés !

La perte de Wadi Doum est un coup terrible pour les Libyens, forcés d’évacuer le centre du Tchad et la base de Faya Largeau, devenue intenable. Kadhafi envoie des renforts pour gonfler la défense dans la bande d’Aouzou. 12 à 13 000 hommes, un tiers de l’armée libyenne, s’y trouvent finalement stationnés. Pour relancer leur appui aérien, les Libyens remettent en chantier la base de Maatan as-Sarrah dans le sud du pays. Mais, fin juillet 1987, les FANT prennent des positions dans le Tibesti pour sécuriser leur flanc ouest en vue de l’attaque sur la bande d’Aouzou. Début août, une brigade libyenne contre-attaque dans le Tibesti. Le 8, elle reprend Bardai mais est interceptée à Oumchi par une force équivalente des FANT, à 80 km au sud de la bande d’Aouzou. Utilisant les mêmes tactiques que précédemment, les Tchadiens pulvérisent la force libyenne et la défaite se transforme en véritable déroute : Djamous entre bientôt dans la ville d’Aouzou, tuant 650 Lybiens, en capturant 147, ainsi que 111 véhicules, sans compter les 30 chars et véhicules blindés détruits durant les combats.

Kadhafi ne se laisse pas démonter pour autant et porte les effectifs libyens à 15 000 hommes. Il envoie aussi le meilleur général de l’armée libyenne, Ali ash-Sharif, pour organiser la contre-attaque afin de reprendre Aouzou. Précédées par un bombardement d’artillerie et d’aviation, la contre-offensive libyenne échoue le 14 août avec 200 tués et blessés. Ash-Sharif renouvelle l’assaut, en vain : il faut dire qu’il ne fait pas beaucoup preuve d’imagination tactique, multipliant les attaques frontales, en pure perte. Le général libyen soumet la ville à un pilonnage encore plus violent et place des unités de commandos et de la Jamahiriyyah dans le dispositif. Utilisées comme troupes de choc, ces forces chassent finalement les Tchadiens d’Aouzou le 28 août. Le succès libyen est malheureusement dû pour eux au fait que les commandants expérimentés des FANT ont été retirés du front pour préparer une autre offensive… la Libye a néanmoins perdu 1 225 tués et 262 blessés en août dans les combats autour d’Aouzou.
Habré, qui tient absolument à reprendre la bande d’Aouzou, projette de renverser la situation en attaquant les bases de Kadhafi dans le sud libyen. Il a déterminé avec ses officiers que le principal atout des Libyens était leur aviation : bien que relativement inefficace, elle effraie encore les FANT et conduit à disperser fréquemment les effectifs pour éviter les projectiles. Pour éliminer cette menace, Habré prévoit d’attaquer la grande base de Maatan as-Sarrah. Les Libyens, pendant ce temps, souhaitent capitaliser sur leur succès à Aouzou : début septembre, une brigade attaque Ounianga Kebir. Djamous, de son côté, mène plusieurs milliers d’hommes des FANT dans un raid à 200 km à l’intérieur de la Libye vers Maatan as-Sarrah. Les Libyens sont défaits devant Ounianga Kebir dès le 5 septembre. Le même jour, Djamous, qui s’est approché de la base libyenne sans être repéré, lance l’assaut. Les Tchadiens, renseignés par les photos satellites américaines, ont progressé jusqu’au nord de Maatan as-Sarrah pour faire croire à la garnison qu’il s’agit d’un renfort arrivant sur place. Celle-ci compte 2 500 hommes, une brigade de chars, de l’artillerie et des fortifications, ce qui ne l’empêche pas de succomber rapidement. Les Tchadiens détruisent les installations, les pistes et emportent tout le matériel possible avec eux, repartant dès le 6 septembre. Ils ont tué 1 700 défenseurs, en ont capturé 300, ont détruit 26 avions ou hélicoptères (dont 3 MiG-23, 4 Mirages et 1 Mi-24), 70 chars, 30 véhicules blindés, des batteries de SAM, des radars et de l’équipement électronique, au prix de 65 tués et 112 blessés. Kadhafi envoie alors, le 7 septembre 1987, deux bombardiers Tu-22 sur les aérodromes d’Abéché et N’Djamena, en représailles de la destruction de sa base aérienne. L’un des deux bombardiers est abattu au-dessus de N’Djamena par un missile antiaérien Hawk tirée par une batterie du 403ème régiment d’artillerie français et l’autre fait demi-tour.

Fort heureusement pour Kadhafi, Paris commence à s’inquiéter des ambitions tchadiennes et force Habré à accepter un cessez-le-feu avant que celui-ci n’ait pu lancer sa contre-attaque sur la bande d’Aouzou, de crainte que les Tchadiens ne transportent la guerre en Libye. Pour l’année 1987, les Libyens ont perdu au moins 7 500 tués, 1 000 prisonniers, 28 avions de combat et plus de 800 chars et véhicules blindés détruits, tout en n’éliminant qu’à peine un millier d’hommes des FANT.
Conclusion

Les relations entre le Tchad et la Libye vont progressivement revenir à la normale. Kadhafi reconnaît Hissène Habré comme chef d’Etat du Tchad en mai 1988. Les négociations sur la bande d’Aouzou, en revanche, se terminent par une impasse à partir d’août 1989. Les relations s’améliorent lorsqu’Idriss Déby, ancien lieutenant d’Hissène Habré soutenu par la Libye, chasse celui-ci du pouvoir en décembre 1990. Déby conserve cependant la position de son prédécesseur sur la bande d’Aouzou. Finalement, en février 1994, la Cour de Justice Internationale proclame à une écrasante majorité que le territoire doit revenir au Tchad. En conséquence, les troupes libyennes quittent la bande d’Aouzou en mai 1994. Les rêves d’expansion de Kadhafi ont été définitivement brisés dans les sables du Tchad. Quant à Idriss Déby, devenu président du Tchad, il s’emploie à favoriser les Zaghawa du Darfour qui l’ont aidé à évincer Hissène Habré. Inamovible, ayant fait modifier la constitution pour se maintenir au pouvoir, Déby provoque l’entrée en rébellion de Zaghawas déçus par son attitude et qui s’organisent au Darfour, depuis toujours le sanctuaire des mouvements de rébellion tchadiens. Soutenu par la France, Déby a jusqu’ici repoussé toutes les offensives lancées par les mouvements rebelles -en 2005, en 2006, en 2008- et a conclu un accord avec le Soudan, qui soutenait officieusement l’opposition tchadienne, en janvier 2010. Et par-dessus la guerre civile tchadienne et le conflit avec le Soudan s’est ajouté le drame du Darfour.

Pour en savoir plus :

R. BUIJTENHUIS, « Le FROLINAT à l’épreuve du pouvoir. L’échec d’une révolution africaine », in Politique Africaine n°16, 1984, p.15-29.
Colonel SPARTACUS, Opération Manta 1983-1984. Les documents secrets, Paris, Plon, 1985.

Tom COOPER, « 45 Years of Wars and Insurgencies in Chad », in Truppendienst n°312, 6-2009 (merci à Adrien Fontanellaz de me l’avoir signalé).
Kenneth M. POLLACK, Arabs at War. Military Effectiveness, 1948-1991, University of Nebraska Press, 2002.
R. OTAYEK, « La Libye face à la France : qui perd gagne », in Politique Africaine n°16, 1984, p.66-85.
Répertoire typologique des opérations, tome 2 Afrique, CDEF/DREX.

 
 

 

 

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