Cet article fait suite à un cri de cœur lancé par quelques jeunes de la région du Tibesti organisés en collectif, et qui m’ont contacté via la messagerie « Whatsup » afin de transmettre leur colère à travers les réseaux sociaux. N’ayant trouvé aucun interlocutoire attentif tant à Bardai qu’au niveau de leurs « représentants élus » à N’Djamena, ils espèrent qu’une vulgarisation de ce qu’il convient d’appeler un phénomène mafieux fera prendre conscience et ouvrir un débat. L’éloignement de la région; la distance N’djamena-Bardai par exemple et de… 2700 Km; l’absence d’associations organisées et le soudoiement par les entrepreneurs en charge des travaux des contrôleurs dépêchés de N’Djamena crée cette situation dramatique qui tue à petit cette population déjà victime de la crise en Libye et de son éloignement du reste du pays.

 

Le phénomène en question est l’abandon des infrastructures publiques lancées (hôpitaux, écoles, administrations etc.), certains à peine commencé et d’autres laissées inachevé, après avoir bien-sur encaissé au niveau du trésor public la totalité du montant alloué par l’Etat, d’autres infrastructures ne répondent à aucune norme tant technique que juridique, à l’exemple de « l’hôpital » et du Lycée de Bardai et ce qui est appelé le « château d’eau » de Zouar, dont la seule vue prête à rire si le département n’est pas l’un des rares du Tchad à n’avoir pas accès à l’eau courante, ce dernier ouvrage qui a coûté plus de cinq cent millions de nos Francs soit un million d’euros, ressemble plus à une fontaine qu’à une infrastructure hydraulique digne de ce nom. Selon nos informations, une dizaine de chantiers seraient soit à l’arrêt soit auraient des défauts graves de conception : fissure à l’inauguration, terrain mal choisi, équipements de mauvaise qualité ou tout simplement chantier abandonné et entrepreneur en fuite, l’ironie et la tragédie auraient voulu que la majorité de ces « entrepreneurs» sont des « fils» de la… région.

 

Toutes ces infrastructures ont coûté des milliards de FCFA au contribuable Tchadien. Les marges, pharaoniques, dans certains chantiers frisent l’indécence, elles peuvent aller de 80 à 90 % du budget alloué, du jamais vu. Des milliards amassés sous le dos des pauvres populations, de l’argent utilisé pour construire d’immenses villas à N’Djamena et acheter des maisons à l’étranger. Malgré l’abondance du sable de construction et du gravier et surtout le coût moindre des matériaux de construction en provenance de la Libye où ils sont subventionnés, ces entrepreneurs véreux et boulimiques s’enfoncent dans des logiques défiants toute raison économique, à titre d’exemple, le ciment importé de la Libye coûte quatre fois moins chères que le ciment produit au Tchad ou importé du Cameroun voisin.

 

Toute cette tragi-comédie commença en 2009, lorsque l’Etat Tchadien décida de débloquer 30 milliards de FCFA pour pallier au manque criant d’infrastructure de base dans une région isolé et longtemps miné par les guerres, dans la foulée une commission fut crée afin de gérer cette somme et attribuer via des appels d’offre les marchés de construction de ces infrastructures vitales. La composition partisane et familiale de la commission et sa gestion calamiteuse et mafieuse des trente milliards a précipité sa fin, en 2012 elle a été dissoute et la somme intégralement reversé au trésor. Mais c’était trop tard, la somme faramineuse de neuf milliards de FCFA a été purement et simplement détourné et distribué entres cousins sous forme de marché accordé de gré à gré la nuit autour du thé, la plus part a des individus n’ayant ni les compétences ni l’expérience de conduire des travaux publics. Pendant ce temps, la population vit dans le dénuement le plus total, le Tibesti est la seule région du Tchad où il n y a aucune infrastructure hydraulique digne, c’est aussi la seule région qui ne possède pas d’hôpital répondant aux normes nationales et surtout la seule région qui ne possède de Lycée de manière effective.

 

L’inspection générale de l’Etat qui s’agitent à produire de la littérature et suspendre occasionnellement des bureaucrates à N’Djamena pour des sommes ridicules doit s’intéresser à ce scandale et les ministères de tutelle (Infrastructures, Education, Santé, Eau) doivent chacun à leur niveau ouvrir des enquêtes pour savoir pour quoi tant de chantiers sont à l’arrêt malgré le payement intégral de l’argent dû.

 

Une enquête plus poussée, avec des images et des documents est en production et sera publiée partout où besoin sera.

 

Charfadine Galmaye Salimi.

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