N’DJAMENA – Les fidèles musulmans du Tchad célébrent l’Aid-el-Kébir ou Tabaski ou encore « fête du mouton » vendredi, alors que les prix du précieux mouton pour le sacrifice et des denrées de première nécessité ne cessent de flamber sur les marchés de la capitale.

A vingt-quatre heures de la fête de Tabaski, les clients ne se bousculent guère au marché de bétail de Karkandjié, dans le 5ème arrondissement de la capitale tchadienne, comme d’habitude à la veille de la fête de mouton. Ici comme dans les autres marchés de N’Djaména, les prix des moutons varient selon leur provenance et leur forme.

« Les béliers importés du Soudan coûtent plus cher parce qu’ils ont de l’embonpoint », explique Ahmat Tahir, vendeur de bétail. Ils valent entre 80.000 et 100.000, voire 120.000 F CFA. Les moutons ordinaires, acheminés des provinces, sont vendus entre 30.000 et 80.000 F CFA.

 

Ahmat Tahir justifie ces prix que beaucoup de clients jugent  » exorbitants » par les frais de transport élevés des bêtes.

« J’achètent mes béliers à Moussoro (à 300 km au nord de la capitale, Ndlr). Je paie des bergers qui les acheminent jusqu’ici. Souvent, des moutons disparaissent en chemin ou sont écrasés par des véhicules », affirme-t-il.

Il y a également les taxes que nous sommes tenus de payer chaque jour à la collectivité et aux autres structures impliquées dans le circuit commercial, ajoute le vendeur. « Ce sont tous ces facteurs qui déterminent le prix d’un mouton », conclut-il.

Selon Moctar Moussa, agent du ministère de l’Elevage et des Ressources halieutiques, la flambée des prix du bétail est intentionnellement entretenue par tous ces intermédiaires qui pullulent le circuit.

« Tous ces hommes qui vous abordent dès votre entrée au marché ou qui vous vendent un mouton dans les quartiers, ne sont pas les vrais propriétaires. Ils ne sont que des intermédiaires qui cherchent toujours à vendre plus que le prix proposé par le légitime propriétaire, voire le doubler, à leur profit », indique-t- il.

Mme Khadidja Adoum, secrétaire de direction, ne comprend qu’à chaque fête, les prix des denrées alimentaires grimpent, alors que les salaires ne sont pas à la hauteur.

« Nous n’avons même pas perçu les salaires du mois d’octobre. C’ est très difficile pour nous de trouver un mouton et des habits pour les enfants », se plaint-elle.

 

Après un mois de trève, les travailleurs du secteur public et parapublic viennent d’observer une grève sèche de trois jours en début de semaine, pour réclamer une révalorisation des salaires. Ils menacent de reconduire le mouvement la semaine prochaine.

La « fête du mouton » intervient également alors que des centaines des milliers de Tchadiens subissent encore conséquences des graves inondations qui ont durement frappé le pays cette année. A cela s’ajoutent les séquelles économiques des préparatifs de la fête du ramadan et de la rentrée scolaire, autant d’évènements qui occasionnent des dépenses ostentatoires.

En dépit de cette précarité économique, les pères de familles font pieds et mains pour se procurer l’indispensable mouton de sacrifice.

« Qu’importe le prix du mouton, nous n’avons pas le choix. L’Aïd- el-Kébir arrive une fois seulement par an et le fidèle musulman doit s’acquitter du sacrifice d’Abraham, signe de sa soumission à Allah », estime Hassan Fadoul.

A l’instar de ce professeur arabophone, de nombreux fonctionnaires ont fondé leur espoir sur le paiement par anticipation du salaire d’octobre pour faire une bonne fête de mouton. Mais ils ont été déçus. Beaucoup ont dû prendre des crédits pour acheter le mouton, de préférence la veille de la fête, craignant que le bélier ne soit volé comme c’est souvent le cas.

A ces prix élevés du mouton, il faut ajouter celui des denrées alimentaires. « Tout est cher. Les commerçants augmentent d’un simple coup de tête les prix des produits. Tu peux venir au marché et rentrer bredouille. C’est lamentable », se plaint Mme Khadidja Adoum.

Au marché des céréales de la N’Djaména, le sac de maïs est vendu depuis trois mois à 27.000 F CFA, alors qu’en temps normal, on pouvait l’acquérir à 14.000 francs. Le sac de mil pénicillaire, quant à lui, vaut 25.000 F CFA.

Le bidon d’huile végétale importée, de dix litres, est vendu entre 12.500 et 14.000 F CFA, contre 11.000 F CFA il y a quelques semaines. Le litre d’huile d’arachide locale est également passé de 800 à 1.250 ou 1.300 francs.

Le prix du sucre fabriqué localement stagne depuis quelques mois autour de 1.200 F CFA le paquet de 1 kg, bien plus cher que celui importé du Cameroun et vendu à 1.100 F CFA.

L’Etat a défiscalisé et subventionné les produits de première nécessité (riz de 50 kg, huile végétale, lait et pâtes alimentaires) afin de minimiser les prix sur le marché. Mais c’est l’effet contraire qui se produit. Les commerçants, véreux, créent des pénuries artificielles en constituant des stocks, puis imposent des prix exorbitants, au grand dam des consommateurs.

Source: Xinhua

 

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