Faut-il dire commémoration de son assassinat ou anniversaire de sa disparation ? Je me suis dit fait ce que tu fais le mieux : écrit chaque 3 février une chronique pour souligner cette grande perte pour le Tchad. Écrit pour saluer ce grand monsieur. Mais à chaque chronique la tristesse m’envahie. L’émotion me submerge. Et la colère, encore la colère bouillonne dans mes entrailles contre ce pays, le Tchad. Contre une partie de ces « soi disant intellectuels », lâches. Contre une partie de cette opposition, incohérente. Contre certains compagnons de lutte d’Ibni, à peine audibles. Contre toute cette injustice. Ma colère décuple, lorsque je pense aux conditions dans lesquelles, Ibni serait mort.

Son corps n’a jamais été restitué. J’étouffe de rage lorsque j’entends, le président tchadien Deby Itno balayé du revers de la main toutes les questions des journalistes sur la mort du professeur Ibni. Ils ont tué Ibni. J’avais toujours espoir que la vérité finirait par triompher. A l’époque, la France de Droite était impliquée, indirectement, dans cette mort. Et avec l’arrivée de la Gauche française au pouvoir, l’espoir était permis. Je me rappelle du discours du Bourget du candidat, devenu président français, François Hollande. Il disait avec force que son arrivée au pouvoir sera une mauvaise nouvelle pour les dictateurs. J’ai instantanément pensé à Ibni. Homme de gauche. Ami de la gauche française. J’étais convaincu que l’arrivée au pouvoir de la gauche allait accélérer les choses. Ou du moins mettre la pression sur les autorités tchadiennes afin que Deby Itno lâche ceux qui ont exécuté Ibni.

J’étais un grand naïf… Ils ont tué Ibni. Le temps est passé. La Gauche s’est dévoilée. Elle est sur la droite ligne de la Droite. L’expression qui dit que les états n’ont pas des amis mais des intérêts se confirme. La Gauche et la dictature tchadienne sont ami-ami pour intervenir au Mali. Le président tchadien s’emploie avec la fougue du chef de guerre qu’on lui connaît. François Hollande, boude mais fini par céder aux lobbys militaires de l’armée française. Deby Itno est leur protégé. Il est prêt a envoyer des jeunes tchadiens mourir. Certainement, il y a eu une contrepartie à cela.

Le silence de certains ténors de la gauche sur cette mort est-il lié aux intérêts français? Je ne saurai le dire mais c’est curieux. Pire, la justice tchadienne a prononcé, l’été dernier, un non-lieu dans l’affaire. Terminée. Classée. Circulez. Il n’y a rien. Les auteurs et complices de ce crime ne sont pas inquiétés. Ils ont tué Ibni. Seul espoir, quelques jours après, la Justice française charge un juge d’instruction pour enquêter sur la disparition de l’opposant. L’ouverture de cette enquête est le résultat de la ténacité de la famille d’Ibni. Mais c’est contre l’avis du parquet de Paris que le juge d’instruction a décidé de mener son enquête. Il y a un gout amer dans cette démarche. Il faut espérer que du bon sortira de cette enquête. Même si c’est la justice d’un autre pays qui fera, peut-être, la lumière sur la disparition du plus brillant d’entre nous. Ils ont tué physiquement Ibni. Mais ils ne pourront le tuer dans nos esprits, ni dans nos cœurs.

Bello Bakary Mana Source : wwww.lmiroir.com 

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