L’aviation tchadienne du général Idriss Amine Ahmed s’apprête à réceptionner deux drones d’attaque Anka de Turkish Aerospace Industries (TAI). Le constructeur lui a déjà livré en avril trois avions Hurkus et déploie une équipe technique sur place. Des commandes qui interviennent alors que les contrats d’armement sont l’objet d’une lutte d’influence à N’Djamena.

C’est une présence aussi discrète que stratégique. Depuis le mois de mai, deux cadres de Turkish Aerospace Industries (TAI) séjournent dans la capitale tchadienne. Le duo est chargé du « remontage » de trois avions d’attaque Hurkus livrés en pièces détachés à l’armée de l’air tchadienne par le groupe turc à la mi-avril.

Les appareils doivent être équipés de missiles guidés laser air-sol Cirit conçus par le turc Roketsan ainsi que de boules optroniques d’observation MX-15 pour mener des missions de surveillance (AI du 30/01/23). Dirigée par un ancien officier de l’armée turque, Sami T., la petite équipe a pris ses quartiers dans un appartement cosy du centre de N’Djamena. Un immeuble qui appartient à un homme d’affaires tchadien d’origine libanaise bien introduit dans la capitale.

Drones Anka-S

Ces derniers mois, le Tchad est devenu un client choyé du groupe truc. Car outre la commande des trois avions Hurkus, N’Djamena finalise dans le même temps un contrat pour l’achat de deux à quatre drones Anka-S auprès de TAI. Fin mai, le général Idriss Amine Ahmed, chef d’état-major de l’armée de l’air tchadienne, s’était rendu à Ankara, afin de superviser les derniers détails du contrat d’acquisition. Les deux premiers aéronefs d’attaque, commandés en février, doivent être livrés dans les tout prochains jours. Ils devraient être accompagnés du déploiement d’une nouvelle équipe de TAI dans la capitale tchadienne.

Un renfort qui arrive à point nommé : début mai, l’armée de l’air tchadienne a vendu quatre de ses hélicoptères d’attaque Mi-24 à la Force aérienne congolaise (FAC) qui fait face à l’activisme du groupe rebelle du M23 dans l’est de la RDC. Une transaction d’environ 20 millions d’euros qui a quelque peu dégarni les déjà faibles capacités aériennes de l’Armée nationale tchadienne (ANT) et dans laquelle s’est personnellement impliqué Idriss Amine Ahmed. Au plus fort de l’offensive du groupe rebelle du Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (FACT) en avril 2021, deux de ces Mi-24 avaient été rapatriés en urgence de l’usine Tbilaviamsheni (TAM), située à Tbilissi, en Géorgie. La société géorgienne gère depuis plusieurs années la remise en état des aéronefs de l’armée tchadienne via une petite société tchèque, Max Merlin, dont plusieurs actionnaires ont des liens avec de hauts responsables tchadiens (AI du 20/04/21). C’est elle qui est officiellement attributaire du contrat de maintenance des Mi-24et Mi-35 tchadiens et refacture dans la foulée les services de TAM à N’Djamena.

Bataille autour des contrats d’équipements de défense

Au cœur des discussions avec les industriels turcs figure le jeune chef d’état-major de l’armée de l’air tchadienne depuis 2019, Idriss Amine Ahmed. Pas encore quadragénaire, ce dernier, par ailleurs détenteur de la nationalité française, est un ami d’enfance du président de la transition tchadienne, Mahamat Idriss Déby, dit « Kaka« . En novembre 2021, il s’était déjà rendu à Ankara pour s’entretenir avec Hasan Küçükakyüz, le chef d’état-major de l’armée de l’air turque, retraité depuis 2022. Une visite au cours de laquelle l’achat d’avions et de drones de fabrication turque avait été évoqué.

Depuis le décès d’Idriss Déby en 2021, les contrats en équipements de défense historiquement dévolus à Oumar Déby, le patron de la Direction générale de la réserve stratégique (DGRS), sont néanmoins l’objet d’une sourde lutte d’influence. Le frère cadet de l’ex-président a vu tout au long de l’année 2022 son pré carré jalousé et attaqué.

Plusieurs figures évoluant dans l’entourage proche du président de la transition ont tenté de s’imposer sur ce créneau. C’est le cas de Yosko Youssouf Boy, frère aîné du tout-puissant directeur de cabinet de « Kaka », Idriss Youssouf Boy qui n’est néanmoins pas parvenu à ses fins. Yosko Youssouf Boy est notamment actif dans la sécurité aéroportuaire.

Africa intelligence

 

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