Deby a eu le mérite de chasser Habré, le “dictateur“, mais il a pris le soin de conserver tout son système, la dictature, le totalitarisme parfait. Qui l’ignore encore ? Un changement de nom, mais un conservatisme systémique…  La démocratie était voulue, non ? C’est la dictature sans passion qui est finalement imposée et vécue depuis plus de deux décennies. Objection à cela ?  Deby a réussi à réduire la démocratie à l’élection, le citoyen à l’individu, le peuple à l’esclavage, la politique de développement » au clientélisme politique, la Politique au seul pouvoir, le «pouvoir  à la domination. Quelqu’un pour un argumentaire contraire ? Deby a « tué » des corps, au Tchad comme ailleurs, et qui pourrait le nier ? Il les a également faits tuer. Et qui vous a dit que c’est déjà fini ? Aujourd’hui, enfin depuis quelque temps, il se fixe un objectif ultime : tuer des esprits et tuer des consciences. C’est si imperceptible que ça ? Depuis 2005, enfin après ce référendum imposé, aucune élection n’est légale et légitime au Tchad. Absolument aucune. Il n’y a eu que des détournements constants de la volonté populaire. Des contestations à cela ? De nos supposés juristes ou constitutionnalistes ? De nos pseudos intellectuels ? ».

C’est un constat d’une lucidité implacable de la situation politique du Tchad que fait Don Ebert. Il se montre très critique contre la volonté manifeste d’un homme d’utiliser toutes les institutions pour atteindre son objectif de s’éterniser au pouvoir par tous les moyens. Très sensible à la misère généralisée dont souffrent ses concitoyens, Don Ebert éprouve une profonde amertume de voir son pays marcher à reculons alors que les autres nations avancent à pas de géant vers le développement. Il souffre au plus profond de lui-même et donc, c’est une façon pour lui d’exprimer tout haut, pendant que beaucoup de jeunes de sa génération, probablement dénoncent tout bas. Lui, pas du tout. Il parle de façon crue et dure : « Deby a « désétatisé » notre Etat (s’il y en a encore dans la double orthographe du mot), mais maintenant il veut carrément « monarchiser » la République à travers « la réforme institutionnelle » en cours. Que croyons-nous ? Qu’il va quitter le pouvoir ? Franchement, jusqu’ à quand le peuple tchadien continuer a-t-il dans son silence complice et coupable ? Jusqu’à quand se refuser a-t-il à suivre les exemples burkinabè, sénégalais, togolais et de tant d’autres nations qui se sont battues ou se battent encore pour leur liberté. Notre devoir, surtout à nous la jeunesse tchadienne, c’est de comprendre ce qui se passe dans ce pays que nous aimons tant, pour mieux agir… ! Hier, figurons-nous, il y a eu les « damnés de la terre ». Aujourd’hui, il y a les damnés de la mer, du Sahara, du Tchad… Cette supposée « réforme » ou devais-je dire ce processus de « dépolitisation » au niveau géostratégique et de pillage au niveau économique qui est en cours, il faut le contrer, mais à tout prix…Les institutions qui seront mises en place (si nous n’agissons pas tout de suite en disant un grand Non) permettront au « système en place » de sécuriser les espaces qui lui sont déjà acquis, contre la capacité économique et sociale déjà faible des citoyens que nous sommes… Eh oui ! Parce que quand on est déjà une Assemblée nationale qui ne fait que tout cautionner ou presque, que fera un Sénat ? Quand on a déjà une Haute Cour de Justice qui ne condamne ni monsieur Deby ni aucun de ses ministres pour haute trahison et pour détournements constants de la volonté du peuple, que fera une Cour Suprême ? Quand on a déjà des voleurs de la République qui occupent les hautes fonctions de l’Etat, qui sont immunisés, et qui se disent même experts (ce qui est pire) dans cette réforme en cours, que feront une Cour des comptes et une Cour de Répression des Crimes Economiques et Financiers ? Criminaliser des innocents ? Innocenter des coupables ? Non, c’est de tout le système dont nous n’avons plus besoin… ».

Don Ebert espère voir naître une nouvelle République du Tchad avec des idées nouvelles et un peuple vaillant. Ses dernières phrases contiennent des vraies suggestions : « Et que dire de notre armée qui est, comme toujours, un simple supplétif ? La militarisation du Tchad est une vraie impasse. Elle attire ou plutôt attise les conflits, ce que beaucoup de nous ignorons. La Souveraineté du pays doit passer par le démantèlement de toutes ces forces armées sans conscience. Il le faut, pour une nouvelle démocratie, pour un nouvel Etat de droit, pour une nouvelle République ! Alors Non, Non et Non à cette « réforme » (insensée) en cours ! Levons-nous, enfants du Tchad ! ». Il se donne une mission pour terminer son analyse : « Don… au service de la République et de la vérité ! ». C’est un véritable cri de cœur et un appel vibrant ç la mobilisation de toute la jeunesse qu’il encourage et exhorte de se défaire de la fatigue morale et psychologique face à un régime inaudible et insensible. Autrement dit, pour se libérer du joug de l’oppresseur, la seule démarche possible c’est de prendre son destin en main et de résister. Il est temps comme d’autres mouvements populaires, les jeunes Tchadiens devraient apprendre à surmonter ensemble l’adversité et confiner la peur dans les vestiaires ou l’expédier comme lettre à la poste sous d’autres cieux.

Moussa T. Yowanga/Ahmat Zéïdane Bichara

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