La France voulait une annulation de la dette des pays africains. Pour l’instant, elle a obtenu un moratoire du club de Paris (les pays prêteurs) et du G20. 

Cette année 2020, les 76 pays les plus pauvres de la planète, dont quarante pays africains, devaient rembourser un total de 32 milliards de dollars. Paris a obtenu le moratoire au niveau des créanciers bilatéraux et privés, c’est-à-dire un total de vingt milliards de dollars. La Chine, qui est l’un des plus gros créanciers de l’Afrique, a accepté ce principe. Il reste les 12 milliards de créances dus par ces pays à la Banque mondiale. Selon Paris, un accord est en bonne voie, il sera peut-être même annoncé dès cette semaine lors des réunions de printemps à Washington du FMI et de la Banque mondiale. Cette dernière s’était déclarée en faveur d’un moratoire sur la dette des pays africains. 

Il y a deux semaines, les ministres des Finances africains souhaitaient un moratoire portant sur 44 milliards de dollars. L’accord obtenu par la France est donc en deçà de leurs attentes, mais « c’est un premier pas », comme le soulignait ce matin Bruno Le Maire. Le ministre français de l’Économie n’exclut pas que des annulations « au cas par cas et dans un cadre multilatéral » puissent avoir lieu.

La question de l’annulation pure et simple de la dette des pays africains est importante. Beaucoup de pays dépensent davantage en remboursement de dette que pour leur système de santé, soulignait récemment un rapport de l’Union africaine. De plus, une vingtaine de pays africains sont trop endettés et sept d’entre eux sont considérés comme surendettés, dont la République du Congo, par exemple. Mais certains créanciers publics et privés ne sont pas encore favorables à une annulation. 

La Chine, le plus gros créancier

Il serait par exemple intéressant de connaître l’avis de la Chine qui est l’un des plus gros créanciers de l’Afrique avec un stock de dettes estimé à 145 milliards de dollars, si l’on compte la dette de ses entreprises. Par ailleurs une partie de cette dette africaine est privée, elle est due à des entreprises, à des négociants de matière première, des banques et fonds d’investissements. Il s’agit aussi parfois d’emprunts directs des États africains sur les marchés financiers, les fameux eurobonds. Et pour cette dette « il faut encore trouver des mécanisme », affirmait récemment Albert Zeufack, l’économiste en chef pour l’Afrique de la Banque mondiale.

De son côté, le Fonds monétaire international n’a pas attendu le moratoire des créanciers publics pour agir. Dès mardi soir, la directrice générale du FMI Kristalina Georgieva annonçait que le Fonds allait payer lui-même le service de la dette de 25 pays à faibles revenus dont dix-neuf pays africains pour une période de six mois. Ce qui revient à annuler une partie de la dette de ces pays envers le FMI. L’institution de Bretton Wood joue aussi les pompiers depuis plusieurs semaines. Elle a déclaré qu’elle était prête à débourser en urgence des crédits pour les pays africains qui ont besoin d’argent afin de faire face aux conséquences économiques de la pandémie. La semaine dernière une vingtaine de pays africains avaient fait une demande, ils sont sans doute plus aujourd’hui. 

Beaucoup ont reçu des fonds. Par exemple la Tunisie a obtenu 745 millions de dollars le 10 avril, le Sénégal 440 millions de dollars le 13 avril et le Ghana vient de recevoir, ce mardi 14 avril, un milliard de dollars. Cet argent est versé via deux mécanismes : la facilité de crédit rapide (FCR) et l’instrument financier d’urgence (IFR). Ce sont essentiellement des prêts à taux zéro avec un délai de remboursement très avantageux. Mais il convient de préciser que ce ne sont pas des dons. C’est de l’argent qui au final viendra s’ajouter au stock de dette des États. 

■ Quelles aides pour l’Afrique au temps du coronavirus

FMI, 100 milliards de dollars.

Le Fonds monétaire international l’a dit dès le début de la crise, il dispose d’une puissance de feu de 1 000 milliards de dollars pour ceux de ses 189 membres qui ont besoin d’argent. La directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva est particulièrement attentive aux pays à faibles revenus, en particulier les pays africains. Les fonds disponibles en urgence ont été portés à 100 milliards de dollars. Depuis quelques semaines tous les pays africains qui en font la demande reçoivent une aide d’urgence à travers deux mécanismes, la facilité de crédit élargie (FEC), prêts à taux zéro pour les pays à faibles revenus, et l’instrument de financement rapide (IFR) , prêts à conditions avantageuses ouvert à tous les pays. De plus, le Fonds fiduciaire d’assistance et de riposte aux catastrophes a été remanié et sera porté à 1,4 milliards de dollars. Il permet aux pays devant faire face à des échéances de dette de recevoir une compensation sous forme de dons. 19 pays africains viennent ainsi de voir dotés pour six mois, période pendant laquelle c’est le FMI qui paye leurs dettes. 

Banque Mondiale, 14 milliards de dollars pour l’Afrique et sur quinze mois 160 milliards supplémentaires pour les pays en voie de développement

La deuxième grande institution financière mondiale a, elle aussi, sorti le chéquier avec en ligne de mire les aides aux entreprises, quelle que soit leur taille. Pour l’Afrique, la Banque mondiale est bien décidée à épauler tous les secteurs et insiste notamment sur les besoins du secteur informel, sachant que l’immense majorité des travailleurs en Afrique sont dans ce cas. Huit des 14 milliards de dollars iront aux entreprises.

BAD, Banque africaine de développement, 10 milliards de dollars.

Le plan annoncé par la BAD est le plus ambitieux jamais élaboré par l’institution panafricaine. 1,4 milliard de dollars sur les 10 iront directement au secteur privé. Le reste est réparti entre une aide directe aux États et le renflouement du Fond africain de développement.

Union européenne, 14 milliards d’euros.

Annoncée par la présidente de la Commission européenne, Ursula Von Der Leyen, l’enveloppe ira à 90% aux pays africains, et en particulier aux entreprises qui bénéficieront de 8 milliards d’euros sur les 14 proposés. Il s’agit en grande partie de fonds disponibles via les FED, les Fonds européens de développement, et de réallocation de ressources déjà budgétisés pour les pays du Sud. La France qui participera à ce plan annonce en plus 1,2 milliards d’euros en aide sanitaire et alimentaire pour un groupe de dix-neuf pays. 

Afreximbank, 3 milliards de dollars.

La banque d’import-export africaine a elle aussi concocté son plan de soutien à l’Afrique. Les fonds qu’elle rend disponibles serviront aux pays qui en ont besoin à financer les opérations de commerce international sur lesquelles ils sont engagés. Il s’agit essentiellement de facilité de crédit accordées aux Banques centrales.

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