Je suis pris d’une colère verte depuis que j’ai lu cette mise au point nauséabonde d’un rapporteur dont la condescendance n’a d’égal que le péché qu’il essaie de défendre. Comment ne pas être en colère, monsieur le rapporteur, quand vous essayez de justifier l’injustifiable, quand vous essayez de verser dans l’intimidation avec cette folle accusation de « jeter le discrédit sur son propre pays », alors que c’est à juste titre qu’on essaie de dénoncer un plagiat sans scrupule et d’une bassesse intellectuelle inouïe. Monsieur le rapporteur, depuis quand dénoncer un plagiat commis par un Comité Technique, aussi important soit-il, est synonyme de discréditer son pays ? D’où tenez-vous, diable !, cet amalgame entre un honteux plagiat et le discrédit d’un pays tout entier ? Faites-vous une confusion grotesque entre un comité technique et tout un pays ? Faites-vous une fuite en avant en essayant de rendre responsable tout un pays, toute une nation, tout un Etat, d’un acte commis par un ou des membres d’un comité technique. Pendant qu’on y est, pourquoi n’avez-vous qualifié ces dénonciateurs d’ennemis du peuple ? D’apatrides ? De terroristes ? Pourquoi ne nous avez-vous pas disqualifiés de la République ? Monsieur le rapporteur, si dénoncer le plagiat dont est empesté ce rapport du Comité technique signifie « jeter le discrédit sur son propre pays et ses institutions », eh bien, qu’il en soit ainsi. Rien n’est donc plus légitime que de jeter le discrédit sur son propre pays. Eh bien, s’il en est ainsi, j’enfonce le couteau et vous déclare : j’ai honte de mon pays, monsieur le rapporteur. J’ai honte de mon pays et de ses institutions, dans ce cas. Heureusement, et ne vous en déplaise, le pays, mon pays et ses institutions ne sont pas comptables d’un crime intellectuel – parce que oui monsieur le rapporteur un plagiat si honteux est un crime intellectuel- commis par un ou quelques membres d’un comité technique nommé. Seuls le ou les membres du comité techniques responsables doivent répondre de ce plagiat dont le caractère est personnel. Et le comité Technique, à moins qu’il ne désavoue ce plagiat.

 

Monsieur le rapporteur, vous semblez déplorer que l’on n’ait pas porté un jugement de fond sur le rapport. Croyez-moi, jusqu’à ce que ce plagiat soit décelé, j’étais fier du travail du comité. Et beaucoup d’entre nous avions suivi avec intérêt ce travail dont l’importance est incontestable, malgré les désaccords et les limites possibles. Naturellement. Mais monsieur le rapporteur, quel manque de jugement de fond déplorez-vous ? Mais, monsieur le rapporteur, on vous a servi, ce jugement de fond. Puisque le plagiat est un problème de fond, et non de forme. Car un plagiat, ce n’est pas une faute de syntaxe. Un plagiat n’est pas une faute de style. Un plagiat n’est pas une faute d’orthographe ou de grammaire. Un plagiat, monsieur le rapporteur, est une faute morale, civile et commerciale. Un plagiat commis par un comité de haut niveau composé de personnes d’une compétence avérée, parmi lesquels des docteurs et professeur, est un crime. Un crime dont la simple accusation a conduit l’ancienne Ministre de l’Education d’Allemagne, madame Annette Chavane, à démissionner, alors que l’acte incriminé concernait une thèse datant de plus de vingt ans et n’ayant aucun lien avec ses fonctions.

 

Monsieur le rapporteur, vous avez affirmé que « dénoncer [ce plagiat][1] n’est ni juste moralement, ni exact matériellement, ni honnête intellectuellement ». Dire que dénoncer un plagiat n’est pas juste moralement, c’est ignorer la morale, d’autant plus que le plagiat est une faute morale. Ajouter que ce n’est pas exact matériellement est un mensonge, parce que les preuves sont là. Il y a plagiat. Monsieur Lyadish Ahmed l’a rapporté, je l’ai vérifié. Un simple détour sur Google, et n’importe qui aurait la preuve. On est face à un flagrant délit. Vous parlez d’honnêteté intellectuelle ? Connaissez-vous la formule ?! Entre le plagiat et l’indignation face au plagiat, de quel côté se trouve la malhonnêteté intellectuelle ? Répondons à la question en restant intellectuellement honnête. Même si vous avez compris que « pour certains, toute action du pouvoir est par définition et par nature contesté et contestable », sachez qu’il y a, parmi les personnes qui déplorent et s’indignent de ce plagiat, celles qui ne sont ni politiquement engagée, ni par nature opposantes. Car ce plagiat ne concerne pas « le pouvoir » et n’engage ni le Haut Comité des Réformes Institutionnelles ni même le Comité Technique, pour peu que ceux-ci choisissent de ne pas « se solidariser » avec le ou les membres responsables du plagiat.

 

Monsieur le rapporteur, pour ne pas tomber dans la malhonnêteté intellectuelle dont vous parlez, j’ai envie de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Je me fais l’obligation de reconnaître ici que cette réforme institutionnelle est en soi une chose louable, et le travail du comité, ce crime excepté, est à saluer. Malgré les insuffisances naturelles dont ce travail est entaché et les désaccords d’opinion qu’il peut susciter.

 

Monsieur le rapporteur, vous auriez dû vous excuser au lieu de chercher fallacieusement des excuses. Monsieur le rapporteur, vous auriez mieux fait de vous taire, car votre arrogance n’a fait que nous mettre en colère, nous autres qui croyons à un Tchad des valeurs et des compétences, nous qui avions peu ou prou été satisfaits, malgré les désaccords, par le travail du comité.

Vous assurant que d’autres jugements de fond vous seront servis, veuillez croire que cette réaction n’a rien de personnelle et relève d’une colère intellectuelle et non politique.

 

Brahim Béchir Mourtallah

[1] Plagiat est un ajout personnel, d’où l’encadrement

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