En janvier dernier, alors que l’armée tchadienne donnait la chasse aux islamistes d’Ansar Dine dans les montagnes de l’Adrar des Ifoghas, aux confins du Niger et du Mali, au nom de la liberté et de la justice, le gouvernement qui envoyait cette armée bafouait ces mêmes principes dans son propre pays.

Ainsi, une révision constitutionnelle majeure, posant le glaive et la balance de la justice dans les mains du seul pouvoir exécutif reçut l’onction des députés du pays. Ce n’est pas que cette justice fut auparavant un parangon subtropical d’impartialité.

Comme si le glaive auxiliaire tchadien dans le désert malien voilait ou légitimait les turpitudes imposées aux sujets du régime de N’Djaména.

Le rôle des blogueurs

Makaila Nguébla au Forum social mondial de Tunis, le 28 mars 2013 (Abdelkerim Yacoub/Internet Sans Frontières)

Il est remarquable que cette information fut relayée pour l’essentiel, par les blogueurs tchadiens.

En ce moment, une répression sans précédent s’abat sur ceux qui éditent ou font circuler la parole en public, notamment sur les réseaux en ligne. Et voilà que le bras de N’Djaména atteint aussi ceux qui se croyaient protégés parce qu’ils sont au delà des frontières du pays.

Encore plus étonnant, le missi dominici des actions liberticides de celui qui, dit-on, se rêve remplaçant de Mouammar Kadhafi dans la région est un avocat, ancien défenseur des droits de l’homme passé maître inquisiteur, l’actuel ministre de la Justice, Jean-Bernard Padaré.

Makaila Nguébla arrêté et expulsé du Sénégal

Le 7 mai, Makaila Nguébla, correspondant d’Internet Sans Frontières, en exil forcé au Sénégal depuis huit ans, a été arrêté par les autorités du pays et expulsé, en violation totale de la Constitution sénégalaise qui garantit la liberté d’expression à tous les êtres humains.

Nous pensons qu’elle la garantit probablement plus à ceux qui sont persécutés dans leur pays pour leurs opinions et trouvent refuge au Sénégal.

Pis, le Sénégal a ratifié et transposé les dispositions de la convention onusienne sur les réfugiés et apatrides qui lui imposait au minimum de faire prononcer cette expulsion vers la guinée voisine, par un juge indépendant.

Cette expulsion illégale intervient quelques 48 heures après que le tout frais nommé ministre tchadien de la justice eût signé un accord de coopération judiciaire et obtenu ensuite une audience avec le président du Sénégal.

Qu’un ancien défenseur des droits de l’homme demande la tête d’un blogueur et réfugié politique démuni à un homme élu à la suite d’une opiniâtre bataille pour les libertés étonne. Ce qui surprend encore plus est de savoir que la femme de ce ministre et ses enfants sont ici, en Ile-de-France, et ont le statut de réfugiés politiques.

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