Le Département d’État américain suit de près les discussions qui se tiennent actuellement à Doha entre groupes armés et junte au pouvoir. Dans la foulée de la visite fin mars, à N’Djamena, de la secrétaire adjointe aux affaires étrangères, la diplomatie américaine a dépêché une équipe au Qatar.

Mi-avril, le Département d’État a discrètement dépêché une mission diplomatique à Doha. Objectif : suivre les pourparlers qui se tiennent en ce moment entre groupes « politico militaires » tchadiens dans la capitale qatarie et dont les délais ne cessent de s’allonger. La mission américaine est ainsi chargée de prendre attache avec la plupart des mouvements rebelles afin de sonder l’avancée des discussions en cours.

Molly Phee à la manœuvre

Dans le même temps, la sous-secrétaire aux affaires africaines Molly Phee est également en contact avec les Qataris, et plus particulièrement avec l’envoyé spécial pour les médiations du ministère des affaires étrangères, Mutlaq bin Majeed al-Qahtani. La « Mme Afrique » de Washington connaît particulièrement bien ce dernier : elle a auparavant été représentante adjointe pour la réconciliation en Afghanistan, dont la médiation en 2020 et 2021 avait aussi été confiée au Qatar, et spécifiquement à al-Qahtani.

Elle s’est rendue en personne à N’Djamena du 20 au 22 mars où elle a dîné avec le ministre de la Réconciliation nationale, et ancien rebelle lui-même, Acheikh Ibn Oumar. Ces dernières années, Washington a en effet largement resserré ses liens avec le Tchad, carrefour entre le Niger, la Libye, le Soudan et la République centrafricaine. De son côté, la CIA a, depuis deux ans, intensifié sa collaboration avec l’Agence nationale de sécurité (ANS) tchadienne, particulièrement sur les dossiers libyens et soudanais, alors que l’influence russe dans la région ne cesse de croître. Mais si les services de sécurité américains s’accommodent davantage des gradés tchadiens, le Département d’État se montre bien plus regardant sur l’avancée de la transition en cours. Durant son séjour au Tchad, Molly Phee a ainsi multiplié les allusions à « une transition rapide vers un gouvernement civil » visant en creux le Conseil militaire de transition (CMT) dirigé par le fils d’Idriss Déby, Mahamat Idriss Déby.

Un nouvel ambassadeur à N’Djamena

Depuis le début des pourparlers, Molly Phee s’est également entretenu à plusieurs reprises de l’avancée des discussions avec son homologue français Christophe Bigot, alors que Paris s’est mué en principal avocat à l’international de la transition tchadienne.

Washington a, par le passé, été particulièrement véhément à l’égard de N’Djamena sur la question des droits de l’homme épinglant, entre les lignes, le soutien français au Tchad. En 2019, la diplomatie américaine, avait ainsi dépêché son chargé d’affaires à N’Djamena à un rassemblement de l’opposant Succès Masra. Depuis, les relations entre les deux capitales se sont largement apaisées et l’ambassade américaine doit prochainement voir l’arrivée d’un nouvel ambassadeur, Alexander Mark Laskaris, passé par Conakry de 2012 à 2015.

A la Maison Blanche, la transition tchadienne est également suivie depuis peu par Matthew Petit, nommé mi-avril « directeur Sahel » au sein du National Security Council (NSC) où il travaille notamment aux côtés de Judd Devermont (AI du 09/12/21).

Tchadanthropus-tribune avec Africa Intelligence

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