Tout le monde a été pris de court mardi, lorsque le directeur de cabinet du président, Abdoulaye Sabre Fadoul, a été remplacé à ce poste par celui qui était son adjoint et demi-frère du chef de la junte militaire à la tête du pays, Mahamat Idriss Deby Itno. 

Abdoulaye Sabre Fadoul n’est pas n’importe qui. Qualifié de brillant, de bosseur et bon gestionnaire, il a occupé de nombreux postes ministériels tels que les Finances, la Justice ou encore la Santé, a été chef de cabinet de Deby père avant de le redevenir sous Deby fils, fin février dernier.

Même pas 40 jours en poste, Abdoulaye Sabre Fadoul venait à peine de revêtir à nouveau les habits de chef de cabinet du président lorsqu’il a été remplacé il y a trois jours. C’est la surprise totale à Ndjamena, où les spéculations vont bon train.

Les premières informations distillées dans la presse parlent d’une révocation. Certains médias rappellent qu’il avait soutenu publiquement la veille le secrétaire d’État à la Santé qui venait d’être limogé, d’autres font allusion à une probable mauvaise gestion des fonds destinés à la lutte contre le Covid-19 au Tchad.

Mais l’ex-chef de cabinet est un homme d’une réputation irréprochable malgré plus d’une dizaine d’années aux affaires, selon la presse locale. Il décide de contre-attaquer et de dire sa vérité la même nuit sur sa page Facebook.

Son remplacement ? Une « démission acceptée par le président du Conseil militaire de transition »

Dr Abdoulaye Sabre Fadoul

« Pour des motifs « institutionnels et interpersonnels, explique-t-il en pointant « une certaine irrationalité administrative dont le président de la transition est lui-même victime ».

« Nous avons un chef de l’État qui est obsédé par une seule chose, c’est de réussir la transition, a-t-il confié à RFI. Et donc moi j’étais à ses côtés et j’avais le sentiment d’être inutile au poste où j’étais, que je ne pouvais pas l’aider. Pour une raison simple : les règles de fonctionnement de base de l’État étaient – on va dire – galvaudées. »

En cause pour certains journaux locaux, « un profond désaccord » avec le tout puissant secrétaire particulier du PCMT, le général Idriss Youssouf Boy, accusé d’avoir verrouillé à la présidence, qui serait à l’origine de ce départ. Une source à la présidence reconnaît que « fortes tensions » ces derniers jours au Palais Rose. Abdoulaye Sabre Fadoul lui s’est refusé à toute polémique, en assurant que son intention est tout simplement de « tirer la sonnette d’alarme ».

« Je ne citerais personne, que chacun tire les conclusions ou les interprétations qu’il veut. Tout ce que je dis, c’est que l’enjeu n’est pas un problème de personne, derrière les problèmes de personne, c’est une sorte de dysfonctionnement des institutions, qui risque même d’avoir un impact sur le bon déroulement de la transition. »

Les services de communication de la présidence tchadienne contactée vendredi soir n’ont pas souhaité réagir à ce stade.

C’est un ensemble de pratiques qui ont cours qui risquent, je le dis avec la plus grande franchise, de poser problème pour la transition en cours dans notre pays. Je ne pouvais pas rester juste pour conserver un poste, faire prendre des risques au président, sachant que je suis impuissant à faire quoique ce soit pour que ça change. Donc j’ai demandé au président de me libérer. Bien évidemment je reste à la disposition de mon pays pour le servir. Mais je tire la sonnette d’alarme.

Tchadanthropus-tribune avec RFI

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