Après avoir fêté le cinquantenaire, la françafrique médiatique a décidé de célébrer à sa façon, les 60 ans des indépendances octroyées aux colonies africaines. Pour cette tournée africaine, le journaliste françafricain Alain Foka de RFI est à la barre pour faire le boulot. Très introduit dans le milieu des Chefs d’État africains grâce au Pass RFI-France24, il a déroulé son interview avec une grande complaisance. L’ambiance était détendue, Idriss Deby a cru bon nous rappeler plusieurs fois, sa rencontre à Paris avec M.Foka, histoire de nous rappeler qu’on est entre copains.

Cet échange entre le journaliste de RFI et Idriss Deby a été accepté à condition que cela se passe de manière complaisante. Force est de constater que malgré 30 années de pouvoir, Idriss Deby ne s’est pas bonifié, bien au contraire, toujours à la peine pour dérouler une pensée cohérente et logique. Malgré la cohorte de conseillers qui lui pondent des fiches posées sur la table.

Trente ans de pouvoir et au bout, le cirque d’un maréchal d’opérette, dans un pays où Idriss Deby a, par décret, attribué à plus 500 personnes, le grade de Général même à des gens qui n’avaient aucune formation militaire comme l’Imam Hassan Hissein Abakar. Alors, l’orchestre a été dirigé par l’Assemblée Nationale pour la forme. Partout en Afrique, les moqueries fusent, le pouvoir tchadien, les hommes et femmes politiques sont ridiculisés. On verra de tout «  Idriss Deby, Maréchal du Tchad : le pouvoir crétinise !», « l’Assemblée Nationale tchadienne ressuscite BOKASSA au Tchad », « BOKASSA de retour, Idriss Deby le réincarne ».

Démarrant l’interview, Idriss Deby avouera d’emblée qu’il n’est pas capable de faire le bilan des 60 ans d’indépendance. OMG !  Et dire que c’était le prétexte de l’interview ! Heureusement qu’il s’est abstenu. Sinon, on en aurait tremblé de honte !

Son bilan à lui : 30 années de pouvoir et installé pour une présidence à vie, a été largement passé sous silence par le journaliste. Répétant sans cesse qu’il a apporté la démocratie, il n’empêche que le constat sur place parle de lui-même : aucun acteur de l’opposition ou de la société civile indépendante n’a pu être invité à prendre la parole dans ce bilan des 60 ans initiés par RFI et France 24. Un véritable huis clos entre copains.

Son bilan économique est une catastrophe sans précédent : tous les secteurs qui portaient l’économie tchadienne avant l’avènement du pétrole ont été liquidés. Ainsi entre autres, la filière coton a été mise en faillite, la société sucrière tchadienne également, au bénéfice de l’importation massive du sucre soudanais, commerce lucratif organisé par les Colonels du régime, a aussi été coulé et bradé aux Soudanais. Quant au projet pétrolier présenté par la Banque Mondiale comme le projet du siècle,il s’est soldé par un immense échec et l’institution financière a dû le reconnaître officiellement et même se retirer du projet. Alain Foka le sait parfaitement.

Tous les indicateurs des institutions spécialisés BAD, MO Ibrahim, PNUD etc, placent le Tchad toujours à la dernière place ou dans le trio final quelque soit le secteur. Le pouvoir de Deby a battu de tristes records : plus fort taux d’alcoolémie en Afrique, plus grand nombre de viols, de rapts de jeunes filles. Alain Foka et son équipe de RFI – France 24, en sont conscients. Et, en toute logique, des instituts ont souligné que les Tchadiens étaient dans leur écrasante majorité malheureux dans leur pays.

Quoi d’étonnant! Le calvaire et les angoisses d’une vie au quotidien où chaque famille fait face quotidiennement à la pauvreté, aux salaires impayés, à la crainte de voir ses enfants tués comme des lapins ou kidnappés, à l’absence d’électricité, de gaz, d’eau, sans compter les inondations actuellement mais aussi les coupures d’Internet. En 2018, Emmanuel Macron a annoncé en prélude à sa visite au Tchad, une aide financière pour payer les fonctionnaires tchadiens qui traînaient plusieurs mois de salaires impayés. Très fort pour mentir sans honte, Idriss Deby a affirmé le contraire. De très gros mensonges d’Idriss Deby, sur le nombre de médecins en 1990 : il sera démenti par le Conseil de l’Ordre des médecins, sur le règlement de la question d’Aouzou, que de mensonges grossiers. Que dire de ses propres divagations : après avoir annoncé en grande pompe la fin de Boko Haram, c’est au moment de son intronisation comme Maréchal qu’il rétro-pédale sur ses fanfaronnades et affirme que Boko Haram va encore faire beaucoup de dégâts. Soucieux de sauver sa rente politique autour de la lutte contre le Terrorisme ?

On ne peut s’empêcher de souligner pour franchement rire ; quand Idriss Deby fustige qu’il ne pouvait en aucun cas être du côté « des complices de l’occupant du Tchad ». Et que voit-on, en première ligne, dirigeant son intronisation de Maréchal, une grosse brochette de complices de l’occupant. Un occupant à qui, il a vendu son âme de soldat puisqu’il était caché dans son jardin après sa fuite du Tchad et qui lui a imposé très tôt, tous ceux qui ont été ses agents au Tchad et qui demeurent encore largement dans son entourage et qui participent à ses côtés, hier comme aujourd’hui, au naufrage du Tchad.Et bien, M Foka a partagé les rigolades d’Idriss Deby pour passer tout cela sous silence.

A combien s’élève l’enveloppe pour une interview-taquinerie ? Dans l’entourage de Idriss Déby, on murmure qu’elle a été conséquente et lourde ! Crise de l’audiovisuel public français en charge de l’information pour ses colonies, oblige.On a ainsi assisté à des échanges truqués avec aussi une autre émission où plastronnait l’idéologue du pouvoir d’Idriss Déby, M Ali Abderaman Haggar qui fait figure de gestionnaire des médias occidentaux en visite au Tchad pour lisser et photoshoppé la face hideuse du pouvoir. C’est ainsi qu’avec le clan a été théorisé pendant 30 ans, la confiscation du pouvoir par leur ethnie et qui a consisté à positionner 150 membres de la famille ITNO et ses alliés de la branche HINDA DEBY dans toutes les régies financières de l’État et de détourner massivement les revenus pétroliers vers Dubaï, l’Afrique du sud, et la Malaisie. Ils ont aussi théorisé et mis en application une politique de la terreur des autres communautés par le viol massif des jeunes filles en ciblant particulièrement des ethnies considérées comme non favorables à leur tyrannie, sans compter, des exécutions arbitraires quotidiennes pour du n’importe quoi, au moindre incident. Récemment, un Colonel de cette galaxie ethnique au pouvoir a fait réparer sa voiture 4×4 pour une vidange et a refusé de payer 2000 francs cfa et proposait 700 francs. Le simple refus du mécanicien a suffi au Colonel pour sortir son arme et tué l’un de ces jeunes, âgé de 20 ans à peine. Révoltés par ce qui est leur quotidien fait de spoliations, de brimades, d’exécutions, les mécaniciens se sont rués sur le Colonel pour le bastonner. La grande émotion et la révolte exprimées par de nombreux segments de la société tchadienne étaient égales à celles qui ont suivi le viol collectif perpétré par les fils des généraux d’Idriss Deby et infligé à la jeune Zouhoura, dévoilant ainsi, à toute l’opinion internationale le sort que subissent les femmes tchadiennes sous la dictature du pouvoir d’Idriss Déby.

Cette violence d’État parfaitement organisée et pensée par le clan des idéologues qui œuvrent quotidiennement à diviser les Tchadiens, seule assurance pour leur survie, est connue de tous les observateurs de la scène politique africaine. On constate la misère du journaliste qui ne pouvait même pas dire que la modification de l’âge des candidatures a été faite pour écarter Succès Masra, ceci pour ne pas déplaire au Maréchal Deby. C’est dire que même les taquineries ont des lignes rouges à ne pas franchir. Assurément, ce qui avilit le journaliste, ce n’est pas la censure car celle-ci a son visage laid connu de tous, mais plutôt, l’autocensure qui marque la défaite du journaliste qui baisse l’échine, sans combattre pour les faits qui sont sacrés selon l’essence même de son métier.

La Rédaction de Zoom Tchad

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