Le ministre de la Justice chargé des droits humains, Mahamat Ahmad Alhabo, a annoncé dimanche un renforcement des effectifs de gendarmes dans les juridictions de l’ensemble du pays, en réaction aux revendications des magistrats qui sont en grève depuis l’assassinat du procureur d’Oum Hadjer.

S’exprimant à la Télévision nationale, le ministre a qualifié de légitimes les revendications des magistrats :

« Ils réclament la sécurité. Ils disent que les gendarmes qui sont positionnés dans les cours d’appels, tribunaux, justice de paix ne sont pas en nombre suffisant. Ils réclament qu’on augmente leur nombre. Nous on considère que c’est une question légitime ».Mahamat Ahmad Alhabo a expliqué que des instructions ont été données par le Premier ministre au ministre de la Défense :

« Je suis allé voir le Premier ministre, lui présenter cette doléance des magistrats. Il a répondu favorablement. Il faut augmenter le nombre de gendarmes pour qu’ils assurent la sécurité des magistrats. Ensuite il a instruit le ministre de la Défense pour qu’il augmente le nombre de gendarmes déjà mis à la disposition du ministère de la Justice pour que leur effectif soit suffisant et que les magistrats, dans l’exercice de leurs fonctions, se sentent mieux assurés. Ça, on est en train de le régler. Par exemple, pour la cour d’appel de N’Djamena, ils demandent une cinquantaine de gendarmes en plus. Hier soir, les 50 gendarmes ont été déjà positionnés. Sur l’ensemble du pays, tout l’effectif qui a été réclamé sera déployé ». 

S’agissant du droit de port d’arme pour les magistrats, le ministre a indiqué que des autorisations sont signées chaque jour. Il a toutefois précisé que les armes doivent être commandées pour que l’État dote tous les magistrats :

Ils demandent à être dotés tous d’armes de poing. Déjà, la Loi et le droit autorisent aux magistrats de porter des armes. Chaque jour, dans les parapheurs que je reçois, je signe une autorisation de port d’arme aux magistrats. Ce document est signé conjointement avec le ministre de la Sécurité.

Mais les armes on ne les fabrique pas au Tchad. Pour doter tous les magistrats d’armes, il faut commander. Cela prend beaucoup de temps, même s’il y a la volonté. La tradition au ministère de la Justice c’est qu’on délivre les autorisations de port d’arme et les magistrats achètent sur le marché ou je ne sais comment ils le font. Si vous avez une arme de chasse ou arme de poing, ce n’est pas n’importe quel calibre. Il y a des armes réservées aux forces de défense et de sécurité et d’autres aux civils. 

« On a l’impression d’être dans la jungle où chacun cherche protection. C’est grave Monsieur le ministre, jusqu’à ce point », a déclaré la journaliste Hinda Ahmed Cherif, en interrogeant le ministre sur la sécurité des magistrats et leur demande en dotation d’armes.

Mahamat Ahmad Alhabo a déploré le fait qu’au Tchad, le justiciable ne craint pas le magistrat contrairement à d’autres pays :

« Dans un pays normal, un justiciable doit avoir peur du procureur, du magistrat parce que ce sont les seules personnes autorisées à inculper et enfermer quelqu’un. Même pas le ministre que je suis. C’est le magistrat qui peut te priver de ta liberté, tu dois en avoir peur. Malheureusement ce n’est pas le cas dans notre pays. Non seulement les gens n’ont pas peur mais c’est triste de se rendre compte que les justiciables viennent armes au poing jusqu’à tuer un magistrat. C’est le summum. C’est un acte de mépris pour les magistrats et les juges.

C’est quand même triste qu’un magistrat, dans l’exercice de sa fonction, en plein jour, soit assassiné. Par le passé, plusieurs magistrats ont été maltraités, malmenés, menacés. Aujourd’hui, on a atteint le paroxysme de la défiance de la justice ».

Le ministre de la Justice a expliqué que malgré leur présence, les gendarmes n’ont pas été en mesure d’empêcher l’assassinat du procureur car ils ont peur des conséquences et du manque de protection de l’État à leur égard :

« Un justiciable vient au Palais et il enlève son couteau. Et les gendarmes n’ont pas été capables de le neutraliser. Le magistrat, en reculant, a trébuché sur une moto. Le justiciable a foncé sur lui et lui a planté le couteau dans le cœur. Pourquoi ? Je me pose la question, le gendarme qui est là, qui doit assurer la protection de ce magistrat, pourquoi n’a-t-il pas user de son arme ou de sa force, parce qu’un gendarme c’est un militaire. Et un militaire c’est un homme qui est formé pour assurer la protection des Hommes. Même s’il n’a rien entre les mains, c’est un homme armé. Il doit être capable de neutraliser n’importe quel civil avec des techniques qui lui sont appropriées. Il pouvait peut-être casser les pieds à ce Monsieur pour qu’il ne puisse pas se déplacer avec son arme dans la cour. Il ne l’a pas fait. Vous savez pourquoi ? Parce qu’il a peur. Il ne sait pas qui est cet assaillant. S’il le tuait, il a peur que l’administration le laisse lui seul et sa famille pour régler la question de la Dia (prix du sang, Ndlr), ou bien il sera victime d’une vendetta. Même ceux qui sont censés assurer la sécurité des personnalités ont peur de faire leur travail parce qu’ils n’ont pas suffisamment de protection eux-mêmes ».

S’agissant des doléances des magistrats, le ministre de la Justice annonce une augmentation des effectifs de gendarmes à N’Djamena et en province. « Par exemple, pour la Cour d’appel de N’Djamena, ils demandent une cinquantaine de gendarmes en plus. Hier soir, les 50 gendarmes ont été déjà positionnés. Sur l’ensemble du pays, tout l’effectif qui a été réclamé sera déployé », selon Mahamat Ahmad Alhabo.

Il précise que les magistrats sont autorisés à porter des armes et qu’il signe chaque jour des autorisations.

Toutefois, le Tchad ne produit pas d’armes et il faut les commander.

Tchadanthropus-tribune avec Alwihda.info

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