Comment, après tous les crimes qui ont jalonné les 24 années de Déby, Mr. Hollande «  peut-il continuer à défendre les droits de l’homme au Tchad ?

Au nom du Front Républicain pour la Démocratie (FRD), je voudrais informer  l’opinion, sur la situation au Tchad, qui devrait préoccuper au plus haut point la France et la communauté internationale, qui se soucient de la paix et de la sécurité, en Afrique en général, en Afrique centrale en particulier. Je crois qu’une majorité de tchadiens, a l’impression que les différents gouvernements français, depuis l’avènement de Déby en 1990, n’ont pas apporté un soutien ferme basé sur des principes, au développement des institutions démocratiques et inclusives, au respect des droits fondamentaux des citoyens, et à la responsabilité des officiels pour des graves violations des droits de l’homme. C’est,  aussi et  surtout, pour rappeler «  le rôle que vous pouvez jouer, en  vue  de promouvoir la liberté, la bonne gouvernance » et la paix au Tchad et en Afrique centrale. (Le  drame  de  la RCA où la majorité des morts sont des musulmans tchadiens, doit  nous maintenir éveillés…).

La situation de gouvernance au Tchad :

La population du Tchad souffre depuis longtemps des gouvernants répressifs et, par conséquent de conflits violents. Cette violence a atteint son paroxysme dans la guerre civile de 1979 à 1980. Sans doute êtes-vous conscient des privations et des immenses souffrances, endurées par des millions des tchadiens, du Nord au Sud. Au sortir de la Conférence nationale (CNS), pas souveraine du  tout, l’ensemble de la classe politique a cru devoir accompagner, le processus démocratique naissant. Malgré le soutien de la France et de la communauté internationale, aucun progrès significatif n’a été constaté. Depuis l’avènement du MPS, tous les changements constatés, ne s’inscrivent pas dans des valeurs démocratiques, le respect des droits de l’homme et une large inclusion. Comme certaines presses l’ont souligné « ce ne sont pas des nouveaux bâtiments, quelques kilomètres de bitume et que le gouvernement fonctionne « que le Tchad va bien,  comme veulent le faire croire les amis de Déby, haut placés en France et en Europe. En vérité, le Tchad est essentiellement, une façade démocratique, un Etat policier (une police  politique- ANS -, omniprésente) avec un parti unique très dur.

Le parti au pouvoir, le Mouvement patriotique  du Salut (MPS), a fermé  l’espace politique aux autres participants : Les Fonctionnaires ont un salaire ridicule ; Toute  responsabilité est soumise à  la présentation de la carte du  parti unique ; Les marchés publics réservés aux seuls  militants du MPS ; Même une réunion de 10 personnes est interdite. Le MPS n’admet pas d’opposition politique ou la  compétition ouverte pour le pouvoir. Le Président Déby ne permet pas l’existence et le libre fonctionnement des partis d’opposition. Les Médias critiques à l’égard du gouvernement sont soit fermés, soit obligés de cesser d’exister du fait des intimidations exercées  sur leurs journalistes.

Le gouvernement a réduit au silence tous les médias indépendants que le pays a connus. Les organisations de la société civile indépendantes sont obligées de fonctionner avec des restrictions si draconiennes  qu’elles ne peuvent servir de contrepoids au gouvernement. Le gouvernement tchadien est sous l’emprise d’un petit groupe, composé de Déby, de Daoussa, son frère, de Mahamat Saleh Brahim, son oncle (patron des Gardes nomades) de Hinda, sa femme, et quelques hommes liges, militaires et civils qui le contrôlent. Sans oublier, le «  très influent « Hassan Hussein «  Chef du Comité islamique, adepte inconditionnel, de l’islamiste Hassan  AL TOURABI du Soudan. La  participation à la vie politique, de la majorité de la population, est ainsi marginalisée.

Le régime tchadien ne se maintient au  pouvoir que par une sévère répression. Le MPS restreint les libertés politiques des citoyens, par toute une série de lois et de pratiques administratives, ainsi que par la terreur. Ceux qui critiquent le Régime, subissent continuellement, diverses violations des droits de l’homme dont des arrestations et des exécutions extrajudiciaires. Chargés de maintenir Déby au pouvoir, les services de sécurité, qui sont tous contrôlés exclusivement par des militaires «  ZAGAWA « ( Ethnie de Déby ) , jouissent d’une absolue impunité ; De nombreux membres des partis d’opposition, des Associations de  la société civile et des Médias indépendants, en plus des individus soupçonnés d’être des  opposants au Régime, sont pourchassés, arrêtés, torturés,  emprisonnés ou tués, par des agents de l’ANS. Rappelons  que la  plupart de ces agents, avaient déjà travaillé, sous les ordres de  Déby, alors  Patron de la DDS, de sinistre mémoire, du temps de Hissein Habré. Parmi  les victimes de cette terreur étatique ayant perdu la vie figurent : Mtre BEHEDI,  avocat et Président de l’Association tchadienne  des droits  de  l’homme ; BISSO Mamadou, co-fondateur du RDP ( 1er Parti d’opposition au MPS ) ; MBAYLAO Djimaldé, Haut fonctionnaire, alors, Directeur de Réinsertion dans l’Armée Nationale Tchadienne ; Bichara  DIGUI, trésorier du RDP ; Abbas KOTI, frère d’armes et co-fondateur du MPS ; Moise KETTE, Laoukin BARDE, Docteur HARRIS, Docteur GUETTI, Yaya  LABADRI, Professeur IBNI OUMAR Mahamat Saleh, Président du PLD.  D’aucuns ajouteraient volontiers, à cette liste macabre et non  exhaustive, M. Abdéramane DADY et Ahmed LAMINE. Ces deux hauts fonctionnaires en mission, dont le retour aurait été précipité, par Déby lui-même, malgré le mauvais temps, sont morts dans l’accident tragique, de l’avion qui les ramenait du Cameroun.

Le gouvernement tchadien a déployé un grand nombre d’agents secrets, à travers les pays voisins : C’est le cas au Soudan, en Libye, en RCA et au Cameroun, pour pourchasser et tuer les opposants, s’ils ne les enlevaient pas, purement et simplement avant de les faire disparaitre.

De nombreux membres et dirigeants des partis d’opposition, ont trouvé la mort : ex : au Soudan ; certains ont été enlevés  en  RCA  et  emprisonnés à KORO TORO (Prison de l’extrême-nord ) et beaucoup d’autres  menacés d’extermination,  par les Oueled Sliman, en  Libye. La  persécution a  touché également,  les collaborateurs de Déby tels que : Mr. Haroun KABADI ( actuel  Président de l’ assemblée ), Ahmat ANNADIF, alors, Directeur de cabinet, Mahamat ALI HASSAN, Mahamat ZEN BADA,  Mr. Jean Bernard  PADARE, ainsi que des journalistes indépendants, à des longues peines de prison, certains  par contumace, au terme des procès qui n’ont pas rempli, les critères internationaux d’équité. Le climat de répression qui règne au Tchad, a contraint à l’exil, où ils ont rejoint des centaines de milliers d’autres  tchadiens, des anciens ministres, des juges, des officiers de l’Armée nationale, des hauts fonctionnaires civils et militaires, des  journalistes et des militants des  droits  de  l’homme : Le  cas de  M.  MAKAILA Nguebla expulsé de  Dakar est  édifiant…

Du fait de la répression des services de sécurité de Déby, le Tchad est un pays noyé sous la peur. Il faut remonter au temps de  Hissein Habré, pour trouver un degré de terreur  comparable, à celui que Déby exerce sur ses citoyens. Le  climat de peur et de terreur au Tchad ne permet pas aux  tchadiens, de débattre librement des problèmes que rencontre le pays, moins encore, de  leur trouver des solutions.

 Déby ou Le  leadership à  tout  prix.

La grave crise politique au Tchad est largement la conséquence de la poursuite sans relâche d’un pouvoir absolu par le Président Déby. Le premier gouvernement post- Conférence  Nationale avait inclus, d’autres partis politiques qui avaient fait campagne, pour des réformes démocratiques, conformément aux résolutions de la  dite conférence. L’expérience d’un gouvernement multipartiste a pris fin, au  bout de six mois seulement. Le  Premier ministre, issu de la conférence nationale (Mr. Fidel MOUNGAR) a été, alors remercié. Les leaders de l’opposition, membres du gouvernement, ont  été  chassés, sous prétexte  qu’ils étaient  trop critiques,  par rapport aux violations des droits de l’homme, commises par les membres de l’Armée patriotique du salut (APS). De même, Déby s’est fixé comme but, de renforcer  systématiquement son parti, les Institutions étatiques et de bâtir, un Etat contrôlé dans tous les domaines, par un seul individu  doté d’un  pouvoir absolu, sans avoir à  rendre  compte à  personne. Déby exerce son pouvoir absolu, aussi bien sur le Parti (MPS) que sur le  gouvernement : Il totalise, 13 premiers ministres en 23 ans de règne. Toutes les Institutions sont sous son contrôle. Il n’ya pas de  contre pouvoir du tout. Ni le  pouvoir judiciaire, ni le pouvoir législatif, ne sont indépendants. Les Institutions de l’Etat, en particulier les organes de sécurité et la justice, sont là, tout simplement, pour protéger Déby et son monopôle politique, et non pas pour garantir les droits fondamentaux des citoyens, tel que prescrit par la Constitution. Le contrôle absolu qu’exerce le Président Déby sur l’appareil d’état, le met à l’abri de toute responsabilité pour les crimes qu’il a commis dont la plupart  ont eu des conséquences effarantes, pour des civils innocents, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du Tchad.

Le Président Déby est l’un des dictateurs les plus impitoyables d’Afrique. Il est corrompu et s’offre un mode de vie si dispensié qui n’a aucune commune mesure, avec l’abjecte pauvreté dans laquelle croupit la majorité de la population tchadienne. Déby a mis à profit son temps au pouvoir (¼ de siècle), pour amasser une fortune personnelle sans précédent en Afrique centrale. Le conglomérat d’entreprises appartenant à Déby et à sa  famille,  s’octroie tous les Marchés publics, grâce au gré à gré. Les rares entreprises Nationales son dirigées par  ses  enfants, Ex : la Cimenterie de Baoré, l’usine de  jus de fruit de Sarh, La raffinerie de Djermaya ; de même , tous les Projets financés par les partenaires internationaux sont exclusivement dirigés par ses proches  sinon  par les membres de sa famille. SATOM, spécialiste des BTP, est obligée de sous-traiter pour le compte de la SNER dont le patron  n’est autre que  Mr. Daoussa Déby Itno Ministre et frère du Président ; Les marchés d’approvisionnement sont aussi accordés aux proches, Ex : Le gaz oïl pour la centrale électrique de Ndjamena, le Parc automobile de la Présidence, les moyens roulants de tous les Départements ministériels et la construction  de tous les Bâtiments publics etc.…

M. DEBY porte également une responsabilité personnelle, pour des violations extrêmement graves de droit humanitaire international et des droits de l’homme, lorsqu’il fit transporter en  1992, par camions entiers depuis Maiduguri (Nigéria), plusieurs opposants dont M. Issa Gorane et Mahamat Bidon : Le rare survivant, M. Oumar Kadjalami, aujourd’hui Général, fut plusieurs fois ministre de DEBY…

M. Déby ne recule devant aucun crime pour  se  maintenir  au pouvoir. Il  n’a  aucun  respect pour le caractère  sacré de la  vie, raison pour laquelle il recourt  à l’assassinat d’opposant, même  quand  il s’agit de défis pacifiques lancés à son  régime. Déby est seul responsable de la transition manquée au Tchad et de l’impasse politique qui est  le résultat de son maintien, envers et contre tout, au pouvoir.

L’usage abusif des institutions d’Etat par M. Déby est condamné  par pratiquement toutes les organisations de défense des droits de l’homme, de nombreux médias indépendants ainsi que des chercheurs et journalistes dont certains qui l’avaient soutenu  auparavant. L’implication de  Déby en RCA ne semble faire aucun doute aujourd’hui…

Le  Régime Déby : Une  vraie dictature

Comme indiqué ci-dessus, le Tchad doit faire face  à  de nombreux problèmes, dans la  construction d’une Nation. Jamais la  société tchadienne n’a été aussi divisée ethniquement. Le pays est calme depuis 2008, mais de nombreux observateurs estiment que le retour des violences extrêmes y est inévitable, à moyen ou long terme.

M.  Déby prétend avoir fait progresser le Tchad, en arguant  que les droits de l’homme y compris le droit de participation politique, ne constituent pas  une priorité pour le développement. Or, les  problèmes de réconciliation nationale et de la construction d’un système démocratique soulèvent des questions, quant à la durabilité  des avancées économiques et sociales et du potentiel pour de nouveaux  conflits. Ces questions obèrent sérieusement l’avenir du pays. Le Tchad restera-il un pays en paix alors que son gouvernement est oppressif et qu’une large majorité de la population le considère comme  illégitim ? Comment équilibrer les libertés individuelles avec les  nécessités d’une communauté  nationale stable ? Comment devraient réagir des citoyens  constatant que  leur président prend l’Etat pour sa propriété privée et les  prive de leurs droits inaliénables ?

Nous sommes convaincus que les violents conflits que le Tchad a connus  depuis 1963 (la police a tiré sur les manifestants à Fort-Lamy et plusieurs opposants sont arrêtés), trouvent leurs racines dans la mauvaise gouvernance. Selon nous, le MPS  à failli dans la tâche de s’attaquer à la racine des problèmes tchadiens. Par conséquent, le Tchad est sérieusement en crise. La seule voie menant à la paix et à un développement durable passe par un système de  gouvernement jouissant du soutien populaire, incluant toutes les communautés du pays et respectant les droits de l’homme, notamment l’intégrité  de  la  personne humaine et le droit à la participation politique.

Tout développement économique dans une société post-conflit, qui n’est pas enraciné dans des valeurs démocratiques, le respect  des droits de l’homme et un système inclusif n’est pas durable. Nous sommes convaincus que le Tchad plongera à nouveau dans la violence. Si l’actuel gouvernement se refuse à entendre les appels au dialogue et n’accepte pas un processus pacifique de démocratisation, les acquis de l’aide internationale, depuis 24 ans, pourraient être  rapidement remis en cause et s’en suivraient des graves conséquences pour toute la région, ainsi que pour la paix et la sécurité internationales.

La  Communauté internationale soutenir le changement démocratique au Tchad.

Le Président Déby a exploité l’incapacité de l’occident à prévenir ou arrêter les dérives dictatoriales, en faisant réduire au silence, par ses services de sécurité, l’opposition réclamant un changement démocratique et le respect des droits de l’homme. L’absence de réaction de la communauté internationale face aux excès de Déby, a offert l’impunité à ce dernier.

Aujourd’hui, Déby constitue le seul obstacle à la paix et au développement durable. Pire, l’indifférence de la France à l’égard des violations des droits de l’homme et du refus d’accorder des droits politiques, restent incompris par la majorité des tchadiens, et, une source d’aliénation. La stabilité relative et  la construction de quelques «  éléphants blancs » ne peuvent se substituer à la liberté.

Compte tenu des graves conséquences  qu’engendrerait un retour à la guerre au Tchad,  le Front Républicain pour la Démocratie (FRD) estime que la paix et la sécurité au Tchad devraient être une préoccupation internationale. Le peuple tchadien compte sur la France et les partenaires au développement, pour soutenir le respect des droits de l’homme et des progrès en démocratie. Nous estimons que ces partenaires qui ont noué des liens très étroits avec le régime actuel, notamment la France, ont un rôle unique à jouer, sinon une responsabilité à endosser, pour faire progresser le retour à un Etat de droit au Tchad, en faisant comprendre à Déby, la nécessité de garantir des droits fondamentaux et un dialogue national inclusif, pour résoudre la crise.

La communauté internationale devrait soutenir le changement démocratique, un gouvernement inclusif et le respect des droits de l’homme, pour des  multiples raisons dont celles-ci :

    1) Emanciper le peuple tchadien pour qu’il jouisse de tous les droits humains : les tchadiens sont privés des droits fondamentaux dont le droit à l’intégrité physique, la liberté d’expression et le droit de participer aux affaires politiques.

Le peuple tchadien a autant  le droit d’être affranchi de la tyrannie que les Tunisiens, Egyptiens, Irakiens, Afghans et Libyens, à qui la communauté internationale apporte son soutien pour que leurs droits deviennent réalité.

    2) Promouvoir la paix et la sécurité internationales : En l’absence des réformes démocratiques, la politique de Déby, risque de mener le Tchad dans des  nouvelles violences. Un système de gouvernement, sans droits ni démocratie, ne peut pas durer indéfiniment : Le changement au  tchad est inéluctable. La question est de savoir si, il sera négocié et pacifique, ou violent,  et, imposé une fois encore par une «  Ethnie «  sur l’ensemble des tchadiens.


Enfin, depuis 24 ans de règne, Déby par sa gouvernance a installé la haine dans le cœur de beaucoup de tchadiens. Les injustices, les  intimidations, les assassinats des opposants et des citoyens  soupçonnés, les mariages forcés, les famines récurrentes dans les provinces, ont laissé des traces indélébiles, dans la mémoire de  la grande majorité. Si on veut éviter aux tchadiens le drame de la  RCA, permettez-moi d’attirer l’attention  de  l’opinion, en  vu d’agir au plus vite, avant qu’il  ne soit trop tard.  


Des millions des tchadiens affligés, le cœur brisé, captifs de leur peur et prisonniers de leur situation, nous appellent à agir. C’est un appel à  l’aide que nous  ne pouvons ignorer…

L’Ambassadeur TAHER ALI NANAYE

Co-fondateur et membre  de la Direction du Front Républicain pour  la Démocratie (FRD).                                 

 Fait le 22  Avril  2014  

 

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