De plus en plus, les oulémas au Tchad se versent dans des pratiques politiciennes, très compromettantes quand à la dignité et à la clairvoyance qui doivent en principe illustrer le comportement d’un guide religieux. Quand le folklore politique prend une place dans le minbar de l’imam, tout message quelque soit sa teneur dogmatique ne peut contribuer qu’à la manipulation des fidèles, les enfonçant davantage dans le trou de la déviance morale. Un imam est par essence une lumière qui éclaire la société de façon indépendante.
 

Que retient donc d’une fatwa élogieuse à l’égard d’un dirigeant qui a conduit son pays à l’abime?
 

De la crise socioéconomique due à la prédation des biens publics, la corruption, la mauvaise gouvernance en passant par des menaces terroristes et le mercenariat dont se targue ce régime impopulaire, le thème ne manque pas pour un vrai héritier du prophète Mohamed d’inviter ceux qui ont pris le peuple en otage pendant un quart de siècle à bien regarder sur leur rétroviseur.
 

Fort malheureusement, l’imam de la mosquée Roi Fayçal de Ndjamena abonde dans le sens voulu par le monarque de Djambangato qui consiste à louer la grandeur du chef en invitant le peuple à se ranger derrière son guide bien aimé. C’est une véritable promotion de la pensée unique que voudrait véhiculer Ahmat Annour qui, un jour viendra, répondra au Messager d’Allah pour avoir utilisé l’Islam au service d’un homme qui n’a cure de la vie prospère de ses concitoyens. La perversion de nos guides musulmans est un phénomène inquiétant et déstabilisateur pour le pays. On aurait du attendre d’eux autrement que de les voir confondre avec les troubadours du MPS, ce qui met bien évidemment à rude épreuve leur foi en Dieu.

 

Autre chose qui me laisse perplexe ce sont les larmes versées lorsque l’imam évoquait dans son passage l’héroïsme des ancêtres tchadiens qui selon lui  » ont combattu les conquérants blancs avec leurs sabres ». Une page donc oubliée de notre histoire sauf que l’orateur n’a pas bien situé le contexte. S’agit il de la résistance à la pénétration coloniale ou bien pendant la colonisation.

 

Où bien les débuts de la révolte populaire sous la première république? En tout cas cet héroïsme dont il est question n’a rien à voir avec un » qothba » de la fête de Tabaski. Généralement en des pareilles circonstances, nombre d’imams quand ils abordent le sacrifice du père Abraham, son obéissance à Dieu et la foi et le courage de son fils Ismail, se plongent dans une saine émotion. Ce ne fut pas le cas de Ahmat Annour qui aura peut être été impressionné par la bonne forme d’un revenant de président.

 

Ahmat Yacoub Adam

 

 

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