
1 juillet 2025 #Tchad : L’ODL dénonce le recours à la Dia dans le règlement des conflits de Molou et alerte sur la dérive des droits humains
Dans un communiqué de presse publié ce 1er juillet 2025, l’Observatoire des Droits et Libertés au Tchad (ODL) exprime sa profonde consternation face à une information circulant sur les réseaux sociaux, selon laquelle une indemnisation de 13 millions de FCFA par victime aurait été versée dans le cadre du règlement des conflits meurtriers de Molou, dans la province du Ouaddaï, à l’est du Tchad. Cette pratique, si elle est avérée, marquerait un tournant inquiétant dans la gestion des conflits au Tchad, en favorisant des arrangements coutumiers et tribaux au détriment de la justice formelle.
L’ODL qualifie cette initiative d’« action d’une gravité extrême », d’autant plus préoccupante qu’elle pourrait émaner des plus hautes autorités de l’État, notamment des services de la présidence. Dans un pays dont la Constitution consacre le caractère laïc et où la justice est censée fonctionner, le recours à la Dia (compensation financière traditionnelle) pour régler des conflits aussi graves que ceux de Molou constitue, selon l’organisation, une entorse majeure au principe de l’État de droit.
L’ODL craint que cette démarche n’ouvre la voie à une officialisation de la Dia à l’échelle nationale, ce qui marginaliserait davantage le système judiciaire et compromettrait l’unité des communautés tchadiennes. Une menace pour la justice et l’unité nationale.
Le communiqué souligne que le recours à des règlements coutumiers, bien que parfois pratiqué dans certaines communautés, ne peut engager l’ensemble des Tchadiens, qui sont régis par une Constitution garantissant la laïcité et l’égalité devant la loi. En privilégiant la Dia au détriment des institutions judiciaires, les autorités risquent de fragiliser la cohésion nationale et de légitimer des pratiques qui échappent au cadre légal.
L’ODL exige des explications claires de la part des autorités sur cette affaire. Elle appelle à une enquête approfondie pour établir la véracité des informations et les responsabilités éventuelles. Selon l’organisation, une telle dérive pourrait avoir des conséquences désastreuses, notamment en encourageant l’impunité et en affaiblissant les institutions judiciaires déjà fragiles. Un appel à la communauté internationale .
Face à ce qu’elle considère comme une « détérioration excessive des conditions des droits humains au Tchad », l’ODL lance un appel pressant à la communauté internationale, et en particulier au Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme. Elle demande une intervention urgente pour examiner la situation des droits humains dans le pays, en mettant un accent particulier sur la sécurité des défenseurs des droits humains et des journalistes, souvent exposés à des menaces et à des intimidations.
Une alerte sur un précédent dangereux L’ODL, par la voix de son président, Franck Nakingar Djirangate, met en garde contre les implications à long terme de cette pratique. En officialisant des mécanismes coutumiers comme la Dia pour régler des conflits meurtriers, les autorités pourraient créer un précédent qui compromettrait la justice formelle et encouragerait la résolution des différends par des moyens extrajudiciaires.
Cela risquerait d’aggraver les tensions intercommunautaires dans un pays déjà marqué par des conflits récurrents.
l’ODL réitère enfin sa condamnation ferme de cette pratique et appelle à une mobilisation nationale et internationale pour préserver l’État de droit au Tchad. L’organisation insiste sur la nécessité de transparence et de responsabilité dans la gestion des conflits, afin que la justice, et non des arrangements coutumiers, reste le pilier de la résolution des différends dans un pays laïc. Alors que le Tchad fait face à des défis croissants en matière de gouvernance et de droits humains, cette affaire souligne l’urgence de renforcer les institutions judiciaires et de protéger les défenseurs des droits humains.
Tchadanthropus-Tribune
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