Je dédie ce texte d’Etienne de la Boétie à toutes les filles et les fils du Tchad. " Ta liberté naîtra de ton courage "    


D’où tire-t-il  tous ces yeux qui vous épient, si ce n’est de vous ?
 


"……Comme le feu d’une petite étincelle grandit et se renforce toujours , et plus il trouve de bois à brûler , plus il en dévore , mais se consume  et finit par s’éteindre de lui -même quand on cesse de l’alimenter , de même , plus les tyrans pillent , plus ils exigent ; plus ils ruinent et détruisent ,plus où leur fournit , plus on les sert . Ils se fortifient d’autant, deviennent de plus en plus frais et dispos pour tout anéantir et tout détruire. Mais si on ne leur fournit rien , si on ne leur obéit pas , sans les combattre , sans les frapper, ils restent nus et défaits et ne sont plus rien , de même que la branche , n’ayant plus de suc ni d’aliment à sa racine , devient sèche et morte.

 

Pauvres gens misérables, peuples insensés, nations opiniâtres à votre mal, et aveugle à votre bien!  Vous vous laissez enlever sous vos yeux le plus beau et le plus claire de votre revenu, vous laissez piller vos champs, voler et dépouiller vos maisons des vieux meubles de vos ancêtres ! Vous vivez de telle sorte que rien n’est plus à vous. Il semble que vous regarderiez désormais comme un grand bonheur qu’on  vous lassât seulement la moitié de vos biens de vos familles, de vos vies. Et tous ces dégâts, ces malheurs, cette ruine, ne vous viennent pas des ennemis, mais certes bien de l’ennemi, de celui-là même que vous avez fait ce qu’il est, de celui pour qui vous allez si courageusement à la guerre, et pour la grandeur duquel vous ne refusez pas de vous offrir vous-même à la mort. Ce Maitre n’a pourtant que deux yeux, deux mains, un corps, et rien de plus que n’a le dernier des habitants du nombre infini de nos villes. Ce qu’il a de plus, ce sont les moyens que vous lui fournissez pour vous détruire. D’où tire-t-il  tous ces yeux qui vous épient, si ce n’est de vous ? Comment a-t-il tant de mains pour vous frapper, s’il ne vous les emprunte ?

 

Les pieds dont il foule vos cités ne sont-ils pas aussi les vôtres ? 

A-t-il pouvoir sur vous, qui ne soit de vous – même ? 

Comment oserait-il vous assaillir, s’il n’était d’intelligence avec vous ?  

 

Quel mal pourrait-il vous faire, si vous n’étiez les receleurs du larron qui vous pille, les complices du meurtrier qui vous tue et les traîtres de vous même ? Vous semez vos champs pour qu’il les dévaste, vous meublez et remplissez vos maisons pour fournir ses pillerie, vous élevez vos filles afin qu’il puisse assouvir sa luxure, vous nourrissez vos enfants pour qu’il en fasse des soldats dans le meilleur de cas, pour qu’il les mène à la guerre, à la boucherie, qu’il les rende ministres de ses convoitises et exécuteurs de ses vengeances. Vous vous usez à la peine afin qu’il puisse se mignarder  dans ses délices et se vautrer dans ses sales plaisir. Vous vous affaiblissez afin qu’il, soit plus fort, et qu’il vous tienne plus rudement la bride plus courte. Et de tant d’indignités que les bêtes elles-mêmes ne supporteraient pas si elles les sentaient, vous pourriez vous délivrer si vous essayiez, même pas de vous délivrer, seulement de le vouloir.

 

Soyez résolus à ne plus servir, et vous voilà libres. Je ne vous demande pas de le pousser, de l’ébranler, mais seulement de ne plus le soutenir, et vous le verrez, tel un grand colosse dont on a brisé la base, fondre sous son poids et se rompre.

 

Le discours de la servitude volontaire. (Etienne de la Boétie).

 

Fait à Paris.

Le 7 janvier 2016.

Abakar ASSILECK HALATA.

Activiste politique.

 

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