La disparition de Déby ouvre la possibilité, si les Tchadiens se dressent comme ils l’ont fait contre le sixième mandat, d’asseoir enfin les bases d’une démocratie. D’ores et déjà, des partis politiques et des acteurs de la société civile s’insurgent contre la prise du pouvoir par l’armée.

Une armée qui n’a fait que s’engouffrer dans vide laissé par Déby lui-même. Il s’agit en réalité d’un coup de force. Les Tchadiens ne devraient pas accepter cette main mise par le clan Déby. Le Tchad n’est pas un sultanat où le pouvoir se transmet de père en fils. Cela dit, cette situation découle de l’irresponsabilité de Déby. En dictateur assumé, il n’a pas respecté la constitution qu’il a lui-même concoctée.

Et aucun des prétendus juristes qui l’entourent n’a osé lever le petit doigt. Autant dire que le refus de Déby de se soumettre à la constitution est un acte de trahison dans la mesure où le chaos dans lequel nous sommes est la conséquence de ses manquements. En effet, la constitution de 2020 prévoit la nomination d’un vice-président et la mise en place d’un sénat. En cas de vacance de pouvoir, l’article 82 de la constitution dispose que le président du sénat assurera l’intérim et des élections seront organisées au plus tard dans quatre-vingts jours. Toutes choses qui n’ont pas été faites par Déby. D’où le gouffre constitutionnel auquel nous faisons face. Seul maître à bord, Déby n’était en réalité préoccupé que par sa réélection. Il savait que la très grande majorité des Tchadiens ne voulait plus de lui. Ils étaient contre un sixième mandat. Et ils sont arrivés à leurs fins, leur vœu a été exaucé. Son sixième mandat, Déby ne l’accomplira pas.

On peut regretter la mort de son prochain, mais il ne faut pas se laisser emporter par l’émotion. L’avenir du Tchad mérite mieux. La volonté du peuple doit continuer à s’exprimer. Que ça soit dans la rue ou sur les réseaux sociaux. Pour cela, il faut à nouveau se mobiliser contre ce conseil militaire de transition pour qu’un changement advienne. L’UST a rejoint les revendications de la Coordination des actions citoyennes : l’UST ne reconnaît pas le conseil militaire de transition et demande à ses militants d’observer un arrêt de travail. Pour acculer cette junte composée en majorité par les proches parents de Déby, il faut aller encore plus loin et lancer un appel à une grève illimitée. Que tout le monde s’arrête de travailler. Débarrassons-nous de nos peurs ancestrales et mettons le pays en arrêt total jusqu’à ce que les militaires rendent le pouvoir aux civils. Après quoi, on pourra s’atteler à l’organisation d’élections libres, démocratiques et transparentes supervisées par les Nations-Unies. Et pour renvoyer définitivement les militaires dans leurs casernes, il faudrait inscrire dans le marbre que tout militaire qui veut se présenter à la magistrature suprême doit au préalable non pas se mettre en congé (comme cela était le cas dans les différents constitutions), mais démissionner de l’armée. Il perdra ainsi toutes ses jouissances et se présentera en simple citoyen. Comme les autres. Si nous voulons un avenir paisible pour nos enfants, c’est la seule solution pour mettre fin à l’usage de la force pour accéder au pouvoir.

Abderraouf Mahamat Oulèche

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