La persécution, concept central de l’octroi du statut de réfugié, est, évidemment, la source principale de consécration des moyens juridiques de protection des personnes vulnérables au rang desquelles figurent en bonne place les réfugiés. Au nombre des moyens juridiques existant, la Convention de Genève de 1951 portant statut de réfugié et son Protocole additionnel de New-York de 1967 en sont les fondamentaux au niveau universel. Et, la Convention de l’OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique l’est au niveau régional africain. Ces instruments auxquels le Tchad est l’un des Etats partie, traitent avec soin les problèmes des réfugies mettant en première ligne la question d’« accueil » sur qui s’intéresse notre analyse.

L’« accueil » voire l’ « admission » d’une personne dans un État et qui relève d’un régime autre que celui régissant les étrangers n’est pas sans conditions (voir l’article 1er de la convention de Genève). L’importance desdites conditions se justifie selon Richard STAINSBY par des « flux mixtes, lorsqu’il est nécessaire de distinguer les réfugiés des autres migrants ». A ce titre, elles fixent les règles de reconnaissance, d’exclusion et même de la cessation du statut du réfugié lorsqu’il est préalablement octroyé.

Aux termes des pertinentes dispositions de la Convention de Genève de 1951, la reconnaissance du statut de réfugié est subordonnée à la satisfaction des conditions cumulatives pouvant se regrouper en objectives d’une part et subjectives d’autre part. Les premières sont celles qui traduisent les causes pour lesquelles une personne s’oblige à quitter son foyer. Tandis que les secondes sont les raisons pour lesquelles une personne est persécutée. Les causes s’expliquent par l’existence d’une crainte justifiée par la persécution, y être à l’étranger et être dans l’incapacité de se réclamer de la protection de son État de nationalité. Tandis que les raisons pour lesquelles l’on est persécuté est dû à son appartenance, à un groupe social ou encore à son idéologie et qu’il ne veut pas se réclamer de la protection de son État de nationalité.

L’ensemble de ces conditions constitue pour l’État partie (le Tchad) une obligation d’accueillir sur son territoire celui qui en satisfait. Cette obligation est, à forte raison, couronnée par la consécration du principe de non-refoulement.

Affirmé dans la Convention de Genève, le principe de non-refoulement réapparait dans la Convention de l’OUA de 1967 et constitue un gage par excellence à l’accueil d’une personne ayant fui la persécution. Cette réaffirmation redonne un poids à ce principe de consécration universelle dans son applicabilité ou de sa mise en œuvre en Afrique.  Cette pratique traduit l’esprit de l’article 8 de la Convention de l’OUA de 1967 selon lequel : « La présente convention constituera pour l’Afrique, le complément régional efficace de la Convention de 1951 des Nations unies sur le statut des réfugiés ».

Dans la perspective du refoulement, l’OUA affirme sa radicalité à toute mesure tendant au refoulement, à la reconduction et/ou à l’expulsion d’un réfugié ou toute forme du rejet d’un réfugié. Cette idée est puisée à partir de l’article 2 al.3 de sa Convention selon lequel : « nul ne peut être soumis par un État membre à des mesures telles que le refus d’admission à la frontière, le refoulement ou l’expulsion qui l’obligeraient à retourner ou à demeurer dans un territoire où sa vie, son intégrité corporelle ou sa liberté seraient menacées pour les raisons énumérées à l’article 1(1) et (2) ». Et dans la mesure où l’accueil des réfugiés poserait des problèmes à l’État d’accueil, celui-ci, « (…) pourra lancer un appel aux autres Etats membres, tant directement que par l’intermédiaire de l’OUA; et les autres États membres, dans un esprit de solidarité africaine et de coopération internationale prendront les mesures appropriées pour alléger le fardeau dudit État membre accordant le droit d’asile » (article 2 al.4 de la Convention de l’OUA).

Il convient de rappeler que le principe de non-refoulement n’est pas que fait mention dans la Convention de Genève et dans celle de l’OUA, aussi moins exclusif pour les réfugiés. Il est également affirmé dans d’autres instruments, constituant la Charte internationale des droits de l’homme, faisant bénéficier plus ou moins les réfugiés du droit contre le refoulement. L’ensemble de ces textes, dont le Tchad fait partie, concourent tous à la défense du refoulement, d’expulsion, de la reconduction ou de toute sorte du rejet d’une personne, quelle qu’elle en soit, vers l’endroit où sa vie, sa liberté ou son intégrité est menacée. Fidèle à ses engagements internationaux, l’État tchadien a agi dans le bon sens en laissant ouvertes ses frontières aux personnes justifiant leur fuite du Cameroun par la crainte de persécution.

ABDRAMANE Mahamat-Zène Koukou

Chercheur en Droit Public

Consultant indépendant

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