SEULE UNE RIPOSTE COLLECTIVE DES TRAVAILLEURS ET DE L’ENSEMBLE DES OPPRIMES, DE TOUTES LES ETHNIES, DE TOUTES LES RÉGIONS, DE TOUTES LES RELIGIONS, POURRAIT PERMETTRE DE SORTIR DE L’IMPASSE ACTUELLE !

L’état de santé, réel ou supposé, d’Idriss Déby Ino continue, tel un buzz, de susciter diverses réactions sur la toile, tant du côté des organisations politico-militaires que de certains partis politiques. Pour l’essentiel, il s’agit notamment de supputations et de spéculations, avec un champ lexical morbide, prévoyant une éventuelle disparition du dictateur et, par ricochet, la fin de son régime, vieux bientôt de trente ans. Aussi, dans la perspective de voir leurs prévisions se réaliser, nombreux sont les dirigeants de ces organisations qui ont pris la parole ou pondu des communiqués pour proposer des solutions, tant pour sortir de l’impasse actuelle que pour éviter que, selon eux, le pays ne sombre de nouveau dans des affrontement fratricides sur des bases ethniques, comme il y a peu dans notre passé récent.

Ainsi, tout en mettant en garde les proches d’Idriss Déby Itno contre toute tentation de succession concoctée au sein de la famille de ce dernier, au cas où il viendrait à disparaître, certaines de ces organisations prônent la tenue d’un dialogue inclusif, sous l’égide de la communauté internationale, afin de régler la question d’une éventuelle vacance du pouvoir. C’est, par exemple, le cas du CNDR, qui propose « des assises nationales réunissant toute la classe politique et les acteurs de la société civile pour mener une transition pacifique afin d’éviter le pire ». L’UFR aussi abonde dans ce sens, qui, dans un communiqué, rejette « le transfert du pouvoir à la dynastie de Déby » et déclare : « L’après-Déby sera de toute évidence l’affaire de tous les Tchadiens et l’UFR apportera pleinement sa contribution. » Il en est de même du RAJET pour qui « Déby doit s’écarter pour nous permettre de procéder dans un bref délai à des élections anticipées à travers un dialogue inclusif avec tous les acteurs politiques du pays, de la diaspora et ainsi que les politico-militaires (…). »

Par contre, d’autres responsables des organisations armées, prenant une posture radicale, voire martiale, en apparence du moins, affichent leur volonté d’en finir militairement avec la bande armée au pouvoir à N’Djaména. Telle est la position des  responsables du FNDJT, diffusée par le biais d’un communiqué audio par son porte-parole : comme des sauveurs qu’attendraient les masses opprimées, ils ont lancé des appels à celles-ci, les invitant à se ranger derrière eux, à leur confier leur destin et à les laisser régler leur compte à Déby et ses partisans. 

Alors que penser de tout cela ? Est-il vrai que, pour sortir de l’impasse actuelle, il suffirait de dialoguer avec le camp de la dictature, de faire des élections ou de dégager simplement Déby du pouvoir ?

            L’art de vouloir faire du neuf avec du vieux…

L’histoire récente du pays a déjà répondu négativement à ces questions-là ! En effet, depuis les années 80, marquées notamment par la décomposition de l’Etat et la loi des bandes armées, jusqu’aujourd’hui, nombreux sont les dialogues et autres « assises nationales » qui ont émaillé l’histoire politique du pays ! Mais qu’ont-ils changé ? Pas grand-chose pour ne pas dire rien du tout ! Le plus important de ces dialogues a été la conférence nationale, qualifiée de « souveraine » par ses adeptes, qui, au final, n’a accouché que d’une souris : somme toute, elle a juste permis aux différents politiciens de l’époque – qui, pour l’essentiel, sont pratiquement les mêmes que ceux d’aujourd’hui-, de s’entendre autour d’un simple toilettage du régime en place, par le biais d’une constitution satisfaisant les intérêts des uns et des autres et garantissant ce qui, au fil du temps, allait s’avérer être une fiction de démocratie, derrière laquelle se voilait la dictature actuelle, qui n’a même plus besoin de se cacher derrière les oripeaux pseudo-démocratiques et montre, sans vergogne aucune, son visage hideux, comme l’attestent les arrestations arbitraires, mais, surtout la misère sans nom dans laquelle sombrent les masses opprimées alors que notre société n’a jamais été aussi riche qu’aujourd’hui.

La même histoire a aussi largement prouvé que, contrairement aux déclarations de certains politiciens, chefs de guerre ou parlementaires, il ne suffirait pas de chasser un dictateur du pouvoir pour que s’ouvre devant le pays la voie royale d’un véritable changement prenant en compte les aspirations des couches populaires à une  vie digne de notre époque et aux libertés essentielles ! De Tombalbaye à Idriss Déby Itno, que de changements d’hommes il y a eus, en effet ! Mais qu’en a-t-il résulté ? Une fois de plus, absolument rien pour les masses opprimées, dont les conditions de vie se dégradent de plus en plus, surtout aujourd’hui, sous la férule du régime du MPS, né du coup de force du 1er décembre 1990 qui a fait tomber Hissein Habré avec la bénédiction de l’impérialisme français.

Le pays a connu également plusieurs élections. Mais elles, non plus, n’ont résolu aucun problème majeur  : elles ont plutôt été utilisées comme un alibi par les tenants du pouvoir pour légitimer leur dictature au moyen de fraudes, de bourrages des urnes, de falsifications des résultats ou, au besoin, de la force brutale de l’armée, comme lors des présidentielles de 2016. Par conséquent, même si d’autres élections se tiennent, pour les masses opprimées, comme avant, à coup sûr, rien ne changera : quels qu’en soient les résultats, ce sera toujours la misère, les maladies, les privations de toutes sortes et la chape de plomb de la dictature étouffant jusqu’aux libertés les plus élémentaires! Il convient d’ailleurs de souligner que cela n’est pas exclusif au Tchad : nulle part au monde, on a vu de simples élections changer les sort des masses opprimées, même pas dans les pays riches, comme la France, par exemple, où le phénomène des gilets jaunes symbolise une profonde dégradation des conditions de vie des couches populaires, qui expriment leur exaspération pour dire qu’elles n’en peuvent plus!

 Alors pourquoi ces perspectives-là – le dialogue inclusif, les élections, un simple remplacement des hommes au pouvoir- qui ont échoué hier, seraient, de façon miraculeuse, valables aujourd’hui ? Quelle garantie avons-nous pour que ces politiciens en treillis ou parlementaires ne fassent pas comme les Malloum, les Goukouny, les Habré, les Déby et  n’imposent pas une nouvelle dictature sous de nouvelles formes ? Aucune !

            Des gens du même monde défendant les mêmes intérêts…        

En réalité, en embouchant la trompette du dialogue inclusif ou en faisant croire qu’il suffirait de dégager Déby du pouvoir, par un coup de force militaire quelconque ou par des élections, pour que les choses changent, ce que visent tous ces politiciens, c’est juste un remake de la politique qui a totalement échoué depuis ces dernières quarante ans. Ce faisant, anciens sous-fifres de la dictature d’Hissein Habré ou d’Idriss Déby, pour certains d’entre eux, ils montrent surtout que, fondamentalement, ils ne sont pas différents des dirigeants actuels du MPS : ils défendent tous la même politique que la leur, au service des mêmes intérêts, ceux des riches, des bourgeois et privilégiés tchadiens et, au-dessus de ces derniers, ceux de l’impérialisme français. Au final, ce qui les intéresse, c’est uniquement le pouvoir, dans le but de jouir des prérogatives qu’il confère. Voilà pourquoi, fermant les yeux sur les conditions des masses opprimées, ils ne focalisent leur attention que sur le dialogue avec Déby et les élections, parce que, au bout, il y a des postes de député, de maire, de conseiller, voire un strapontin ministériel auquel ils pourraient accéder suite à des marchandages avec le pouvoir dictatorial en vigueur.

Les masses opprimées ne peuvent compter que sur elles-mêmes et sur leurs luttes…

Pour sortir donc de l’impasse actuelle, la solution ne se trouve ni dans dans un dialogue avec la dictature, ni dans un coup de force militaire perpétré par une bande armée. Le sort des opprimés ne pourrait pas  se régler non plus dans les urnes. Par conséquent, pour l’amélioration de leurs conditions de vie et l’accession aux libertés essentielles, les masses populaires ne peuvent compter que sur elles-mêmes et sur leurs luttes, avec leurs propres armes : la mobilisation, la grève, les manifestations, la rue! Seule une riposte collective des travailleurs et de l’ensemble des opprimés du pays pourrait permettre de tracer le chemin vers un avenir meilleur : l’émancipation de ces derniers de l’exploitation, de la misère et de la dictature sera leur propre œuvre ou ne sera pas!

S’il y avait dans le pays un parti révolutionnaire, défendant exclusivement les intérêts des travailleurs et des opprimés contre ceux de la bourgeoisie locale, des trusts et de l’impérialisme français, ce serait à lui que reviendrait la tâche de construire méthodiquement cette riposte collective-là. Mais, en l’absence d’un tel parti, qui fait cruellement défaut de nos jours, ce serait logique que ce soit à la plate-forme revendicative, formée autour de l’UST, la structure syndicale la plus importante et la plus combative du pays, de porter cette perspective, si ses dirigeants en avaient l’ambition.

Le choix des travailleurs d’organiser et de piloter la riposte collective n’est évidemment pas fortuit : ces derniers constituent la principale force du pays ! A cause de leur position au cœur de l’économie et de l’administration, ils jouent un rôle fondamental dans tout ce qui fait marcher la société. Ce sont eux qui font fonctionner les secteurs industriels dont dépend le pays : la Coton Tchad, les sites pétroliers, la Brasserie, la SONACIM, la STE, la SONASUT, la SLE, la Poste, la Téléphonie, mais aussi les banques, les assurances, l’hôtellerie, le bâtiment, le transport, etc. Dans l’administration également, rien ne se fait sans leur force de travail ou leur intelligence : l’Education, la Santé, la Culture, la justice, la Communication, etc, tous les secteurs publics essentiels ne fonctionnent que grâce à eux. Ils sont la sève, la source nourricière, dont dépend toute l’organisation sociale.

Ce rôle particulier, nécessaire, que les travailleurs, du public comme du privé, jouent, sur toute l’étendue du pays, leur confère une force colossale dont ne dispose aucune autre classe sociale. Par conséquent, s’ils en ont l’ambition, ils pourraient s’en servir pour fédérer toutes les colères qui couvent dans le pays contre la politique d’Idriss Déby Itno et ses partisans afin de construire une riposte collective de l’ensemble des opprimés en vue d’imposer à la dictature les aspirations populaires à une vie digne de notre époque et aux libertés essentielles en bloquent et paralysant tout le pays, au moyen d’un grève générale soutenue par des manifestations.

Quelle stratégie ? Quel programme pour construire cette riposte collective ?

Si les dirigeants de la plate-forme syndicale avaient l’ambition de construire cette riposte collective, ils devraient entrer en contact et discuter avec toutes les organisations syndicales, celles des droits de l’homme, les partis politiques de l’opposition, les associations des femmes, des étudiants et des élèves, des retraités, des vacataires et autres contractuels, etc, en vue de constituer avec eux un programme, sous la forme d’un plan d’urgence, d’intérêt public, comprenant les exigences essentielles des masses laborieuses, aussi bien face à la cherté de la la vie qu’à la dictature, pouvant fédérer tout le monde dans un mouvement de tous ensemble contre le régime du MPS.

Quelles revendications communes la plate-forme pourrait défendre auprès de tous les travailleurs du pays ?

La dernière grève du mois de décembre a, certes, fait reculer Idriss Déby et l’a obligé à arrêter de continuer à couper les salaires des travailleurs de la fonction publique. Mais le compte n’y est pas! En effet, de la première goutte du pétrole jusqu’aujourd’hui, il y a eu beaucoup d’argent engrangé dans le pays, dont les trusts du pétrole sont les principaux bénéficiaires. Mais, ceux-ci en ont aussi laissé des miettes importantes à l’Etat tchadien. Idriss Déby s’en est servi pour équiper militairement sa dictature, mais également promouvoir une minorité de parasites bourgeois, qu’il a aidés à devenir des milliardaires grâce au détournement des fonds publics et à la surfacturation. Or, dans le partage de la cagnotte revenue au Tchad, les travailleurs, qui sont à l’origine de la création de ces richesses, n’en ont rien eu : le pouvoir  s’est juste contenté de leur offrir des primes et des indemnités – qu’il a coupées ensuite, durant des mois, après la chute du prix du pétrole sur le marché mondial-, au lieu d’augmenter leurs salaires, comme il l’a fait avec les émoluments des députés, par exemple. Les travailleurs sont donc les seuls à être doublement perdants dans cette affaire, d’autant plus que la cherté de la vie a augmenté vertigineusement. Dans ces conditions, vu que le prix du baril du pétrole et sa production ont augmenté, pour rattraper ce qu’ils ont perdu, il serait fort juste que les travailleurs revendiquent une augmentation substantielle, car, il est difficile de vivre aujourd’hui avec un smig de 60 000 f cfa ou même un salaire de 100 000 fr.

Par conséquent, la plate-forme devrait proposer aux autres syndicats de lutter ensemble contre la cherté de la vie, dont les masses opprimées sont les principales victimes, en défendant ensemble des revendications telles qu’une diminution drastique des salaires des ministres, des députés, des responsables de l’armée, des gouverneurs, des préfets, sans oublier les hauts cadres des grosses entreprises publiques, une taxe plus forte sur les revenus des trusts, les grosses fortunes, une augmentation conséquente des salaires de tous les travailleurs, tant du privé que du public, du SMIC, des allocations de chômage, des pensions de retraite, le paiement des arriérés des salaires des fonctionnaires, l’embauche de tous les contractuels et des précaires dans les secteurs publics essentiels, l’Education, la Santé, notamment, une baisse importante des prix des produits et des articles de première nécessité, de l’eau, de l’électricité, du pétrole, de l’essence, du gaz, du transport, des impôts, des loyers, l’instauration de l’échelle mobile des salaires, – chaque fois que les prix des produits indispensables augmentent, les salaires font de même, ils augmentent aussi, proportionnellement -, la gratuité effective de l’éducation et des soins dans le public, un revenu minimum pour tous ceux qui ne bénéficient d’aucun emploi, un fonds de soutien aux personnes âgées ne bénéficiant d’aucune retraite, la création d’un service de transport public, la construction de logements sociaux, etc.

Quelles revendications communes la plate-forme pourrait proposer aux organisations des droits de l’homme et aux partis politiques ?

Depuis la chute du régime d’Hissein Habré et l’instauration du multipartisme, sous la pression de l’impérialisme français, les libertés essentielles auxquelles aspirent les masses populaires n’existent que dans des textes et non dans la vie réelle. Nous assistons à une fiction de démocratie, un ersatz de celle-ci, derrière lesquels se cache la même dictature d’antan, qui continue à maintenir le pays sous sa férule. On le voit notamment avec les arrestations arbitraires, comme celles de ces derniers temps, mais aussi, le fait que, au bout de trente ans bientôt, le régime n’a toléré aucune manifestation, en plus de la misère de plus en plus croissante dans laquelle la société s’enfonce.

L’homme ne vivant pas que de pain, le programme d’intérêt public devrait comprendre aussi des revendications politiques, conformes aux aspirations populaires face à la dictature : la plate-forme aurait donc intérêt à proposer aux organisations des droits de l’homme et aux partis politiques de défendre ensemble la libération de tous ceux qui son en prison pour un délit d’opinion, le respect du vote des populations en changeant profondément les structures chargées de l’organisation des élections et de la proclamation de leurs résultats, la défense et la jouissance des droits démocratiques élémentaires, de réunion, d’expression, d’organisation, de manifestation, sans aucune menace ni entrave de la part du pouvoir, la rupture du cordon ombilical qui lie exclusivement la presse publique, la radio, la télévision notamment, au pouvoir du MPS, en vue de l’émancipation des de ces structures du joug de celui-ci et de l’instauration d’une expression libre de toutes les sensibilités au sein de l’ONRTV, etc…

Evidemment, dans ce combat commun, il est hors de question que les travailleurs se fondent dans les partis politiques ou laissent ceux-ci prendre la direction de la riposte collective : s’il est nécessaire qu’ils luttent ensemble pour ces revendications qui leur sont communes, chacun devrait rester sous son drapeau parce qu’ils n’ont pas le même agenda. En effet, pour les partis bourgeois de l’opposition, la démocratie est une fin en soi, mais, pour les travailleurs, elle n’est qu’un moyen pouvant leur permettre de s’organiser pour défendre collectivement leurs intérêts spécifiques, tant sociaux que politiques : s’exprimer, faire des grèves, manifester, s’organiser pour se doter d’un parti qui soit le leur propre, en vue de se lancer un jour à la conquête du  pouvoir dan le but de transformer radicalement la société en fonction des intérêts des larges couches populaires.

Quelles revendications communes que la plate-forme pourrait proposer aux élèves, aux étudiants, aux femmes et aux autres catégories d’opprimés souffrant, comme eux, du caractère arriéré du pays?

Notre bourgeoisie, grande comme petite, est venue tardivement sur la scène de l’histoire, comme un pur produit du colonialisme français, d’abord, et un valet des puissances impérialistes, notamment de la France, ensuite. Aussi est-elle pleutre, poltronne, incapable même de réaliser ses propres tâches démocratiques, comme moderniser la société en vulgarisant la science, les connaissances modernes, en finissant aussi avec les structures féodales, les mœurs rétrogrades, barbares, héritées du passé, comme l’oppression de la femme notamment. Par conséquent, c’est aussi aux travailleurs et autres opprimés qu’il appartient de se charger de ces tâches-là et de les réaliser par leurs combats.

Ainsi, dans le cadre de la mobilisation générale de tous les opprimés du pays, les travailleurs devraient-ils proposer également:

  • des revendications communes aux élèves et étudiants : l’instauration d’une bourse, comme un droit pour tout étudiant, la formation d’un personnel hautement qualifié pour  les établissements publics, la création de bibliothèques dans ces derniers, de cantines scolaires gratuites, la multiplication des aires et salles de sport, la construction de médiathèques, de salles de cinéma dans les quartiers populaires, la création de conservatoires de musique, la gratuité effective de l’éducation, mais aussi, de la santé, etc.
  • des revendications communes aux femmes : une lutte hardie contre leur oppression, comprenant l’interdiction réelle du mariage des filles mineures, de la dote, qui ressemble à un prix d’achat des filles, de la polygamie, – symbole officiel de l’oppression de la femme -, de la coutume  qui permet à un père de donner sa fille en aumône, tel un mouton, une révolution agraire profonde afin que les paysannes soient propriétaires des terres qu’elles cultivent, l’instauration d’un Code familial progressiste, donnant aux femmes les mêmes droits que les hommes face à l’héritage, à la garde des enfants, au divorce, l’octroi d’une pension à la femme divorcée si c’est à elle que revient la garde les enfants, un revenu minimum pour les femmes et les mères isolées, l’interdiction de la coutume qui veut qu’une femme épouse, malgré elle, le frère de son  mari défunt ou un membre de la famille de celui-ci, lui revenant ainsi tel un objet dont il hérite, la parité totale dans toutes les institutions publiques et les partis politiques, l’harmonisation des droits sur le lieu du travail- toute femme qui a le même diplôme ou remplit la même responsabilité qu’un homme doit avoir le même salaire que lui-, l’abolition du port du voile dans les lieux publics, les écoles, les lycées, les collèges, les universités, les bureaux,- comme le réclament les femmes musulmanes tunisiennes, algériennes, iraniennes ou même saoudiennes, en lutte contre l’intégrisme religieux-, la mixité des femmes et des hommes, des filles et des garçons, dans les espaces publics, la construction de centres de formation professionnelle destinés à donner aux femmes une spécialisation dans plusieurs domaines afin qu’elles aient une qualification en vue d’un métier, la création par l’Etat de crèches, de garderies, pour détacher les femmes du lourd fardeau relatif à la maternité, mais aussi de maquis géants, de restaurants publics, dans les centres administratifs, les zones industrielles et tous les quartiers des grandes villes, avec un personnel qualifié, où tous ceux qui travaillent, tant dans le public que dans le privé, peuvent venir se restaurer grâce à des tickets payés par leurs employeurs, afin que les femmes s’émancipent des tâches ménagères, notamment du devoir de faire la cuisine, et consacrent leur temps libre à leur formation culturelle ou à leurs loisirs.

Dans le cadre du combat nécessaire à mener pour la modernisation du pays, la plate-forme devrait aussi proposer à tous les opprimés une vaste campagne d’alphabétisation au profit des adultes et des jeunes déscolarisés, femmes et hommes, filles et garçons, en vue de leur permettre d’être autonomes et capables de remplir les tâches administratives élémentaires, l’abolition des chefferies traditionnelles, ces structures féodales, anachroniques, sur lesquelles s’appuient toutes les dictatures en vue de leur maintien, la fin des tribunaux coutumiers, l’instauration d’une justice publique, moderne, unique pour tous, pour toutes les femmes et tous les hommes, égaux en droit, une justice libérée des coutumes et autres considérations religieuses rétrogrades, la rupture des relations entre les pouvoirs publics et les associations religieuses, – la religion devant relever du domaine du privé et de l’associatif : elle n’a pas à se mêler des affaires publiques -, le contrôle stricte de toutes les universités et écoles religieuses, quelles qu’elles soient, au niveau du contenu leur enseignement notamment, pour voir s’il est conforme au caractère laïque de l’Etat, une vaste propagande contre toute forme d’obscurantisme, contre l’influence réactionnaire de toutes les religions, qui obscurcissent la conscience des travailleurs, prêchent le culte du chef, l’adaptation à l’ordre établi, avec ses inégalités, ses injustices, sous prétexte que ce serait le fait du destin, mais aussi contre le nationalisme, le tribalisme, le régionalisme, la misogynie, la division en castes, toutes ces choses dont les politiciens bourgeois se servent pour opposer les opprimés les uns aux autres, pour les diviser, afin de mieux les dominer, pour les empêcher de prendre conscience du fait qu’ils constituent une seule et même classe, à part, celle des pauvres, qui ont les mêmes intérêts, quelles que soient leur culture, leur religion, leur région ou leur nation, parce qu’ils subissent tous la même exploitation, les mêmes maladies, les mêmes injustices, les mêmes inégalités, la même dictature, imposées par le même Etat et le même patronat, au service des riches, etc… 

Opposer à la politique du pouvoir une perspective fondée sur les revendications communes aux masses populaires, de toutes les ethnies, de toutes les régions et de toutes les religions, afin de les rassembler autour de la défense collective de leur droit à la vie, tel est l’objectif de la riposte collective des travailleurs et de l’ensemble des opprimés ! C’est cette perspective seule qui pourrait permettre à ces derniers de faire irruption dans les sphères politiques où se décident les choix les concernant au premier chef et d’imposer eux-mêmes, par leurs luttes, les changements nécessaires conformes à leurs aspirations, tant politiques que sociales. Par ailleurs, dans les circonstances actuelles où l’état de santé, réel ou supposé, d’Idriss Déby Itno suscite tant de réactions et de manœuvres, aussi bien dans son propre camp que dans celui de son opposition, seule cette perspective pourrait aussi permettre aux masses opprimées d’empêcher que la France et ses différents valets locaux ne leur imposent une nouvelle dictature sous une nouvelle forme. 

Par conséquent, quels qu’ils soient, – syndicalistes, militants des organisations de la société civile défendant les droits de l’homme, des partis politiques, des associations des femmes, des étudiants, des élèves et d’autres-, tous ceux qui sont réellement révoltés par la situation actuelle, aspirent à ce que les choses changent vraiment, ne voudraient pas que la société continue à sombrer dans la déchéance et la dictature, devraient tout faire pour aider les travailleurs et l’ensemble des opprimés à construire cette riposte collective, seul moyen pour sortir de l’impasse actuelle et  tracer le chemin vers un avenir meilleur !

Ali Mohamed Abali Marangabi

abali_icho@yahoo.fr    

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