La politique tchadienne nécessite une pluralité de « projets de société » qui nous permettront d’appréhender chaque parti politique dans son idéologie scientifique spécifique. Cette pluralité de projets nécessaires au destin du pays, doivent être matérialisés dans un texte, doivent être à la portée des intéressés, puis être défendus oralement et publiquement par les initiateurs.
Constamment invoqués et commentés dans les démocraties modernes, les programmes politiques constituent cette technologie structurant les interactions entre acteurs des mondes politique, journalistique, intellectuel, économique et syndical. Comme une boussole ils permettent de prévenir la destination finale. Ils sont le cœur de la transaction électorale et permettent à la population d’interpréter le vote comme un acte d’adhésion aux idées que porteraient un candidat ou un parti selon sa vision commune de la gestion des affaires publiques.
A cet instant, je déplore tout simplement l’absence générale de tels précis documents programmatiques qui sont pourtant la figure imposée de toute compétition électorale. Même s’il existe un certain nombre d’idées ramassées ici et là, présentées sous forme de promesses politiques, elles ne constituent en rien un « programme politique » solide et structuré, ayant une base idéologique, qui permettra à la population de se décider sur la base de cette base idéologique.
Pire, l’absence de ces textes prédéterminés qui pourraient affecter le choix de tous les électeurs, à se prononcer, en toute indépendance, sur des offres politiques concurrentes induit une partie de l’électorat à en croire au phénomène de la déification du candidat sortant qui court à sa propre succession. Cette absence amplifie aussi la psychose du rejet de l’autre sans fondement et nourrit la négative chronique de la méfiance d’un « doum » en un « sara » dirigeant ou d’un « sara » en un dirigeant « doum ».
La stérilité politique tchadienne assure ainsi gratuitement au candidat sortant de s’imposer dans un jeu politique d’avance gagné sans qu’il expose de manière détaillée la conception qu’il se fait de l’intérêt commun ou des reformes qu’il envisage apporter pour conquérir l’électorat. Comme si l’amputement psychologique des électeurs entraine le coup de force politique du candidat sortant.
C’est de ce constat vulgaire qu’émane notre légitime crie à l’évanescence politique tchadienne !
Peuple tchadien, notre vie ne doit jamais continuer éternellement à osciller comme une pendule inarretable entre la souffrance et l’ennui, entre le désespoir et l’amertume, entre l’incertitude et la vacillation, entre la précarité et l’instabilité, entre l’énigme et l’ambiguïté, entre le mal et le pire, entre « darraba » et « karkandji », entre « souroundou » et « boule morte », entre le palu et la typhoïde, entre l’injustice et l’impunité, entre galère et misère, nous devons nous ouvrir les yeux et le cœur, nous devons guidés nos choix dans la logique du raisonnable.
Nous ne devons plus continuer à s’attarder sur ces phénomènes rétrogrades qui nous permettent de différencier les candidats selon leur religion ou la dénomination de leur partis, selon leur appartenance régionale, selon leur ancienneté dans le jeu politique, selon leur corruption psychologique, nous sommes appelés à analyser, à creuser et à décider sur la base du contenu de ce qu’ils nous proposent comme projet de société et veiller à ce qu’ils exécutent à ce qu’ils soient jugés sur la base de leur rendement ou du respect de leur programme.
D’aucuns me rétorquerons, à quoi servira de croire ou d’adhérer aux idéaux politico-sociologiques d’un parti dans un pays comme le Tchad où le jeu électoral est gagné d’avance par un parti qui s’impose et s’accroche au pouvoir avec la tricherie électorale ?
Je crois que le changement attendu et dont j’espère que ce texte pourra propager est plus accentué et centré sur l’orientation psychologique individuel qui résultera certainement sur une prise de conscience collective. Lorsque le peuple se rend compte de ce que c’est l’enjeu de son attente en politique, de ce que c’est l’impact de la politique sur la société, de ce que c’est la responsabilité des dirigeants en politique, de ce que c’est le jugement d’un parti sur la base de son offre politique, les tentatives de fraudes électorales s’amenuiseront.
Le Tchad est l’un de rares pays, qui se fait gérer hasardement, sur la base de l’improvisation politique, en tout évènement, en toute situation donnée, sans aucun itinéraire politique précis. Cette improvisation continuelle nous a retenu pendant de longues années dans le sous-développement. La paresse de nos politiciens ne doit plus continuer à être cautionner par notre silence assourdissant que complice. Il faut se faire entendre et décider selon la conviction politique rassurante.
L’exigence des idées claires dans le jeu politique, ne laissera plus de place au « commerce politique » qui sous-entend la prolifération abracadabrantesque des partis politiques, bannira les successions régionalistes considérées à tort comme légitimes dans les partis politiques, privera aux partis politiques de s’hasarder dans des accords politiques injustifiables, encouragera la guerre des idées et non des armes et assurera un destin consentit à la population.
A nous d’en revoir notre compréhension politique (….)

Kelle Mahamat.

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