Comble de l’ubuesque : le Tchad, pays pétrolier depuis 2004, produisant plus de 120 000 barils/jour, connaît actuellement une des plus graves crises énergétiques de son Histoire. L’épicentre de l’épineux problème se situe dans notre capitale, Ndjamena, où depuis que quelques jours, le litre d’essence se négocie aux tarifs faramineux de 1500 à 2000 Francs CFA le litre (2,25 à 3 euros). La situation est d’autant plus dramatique que la pénurie est survenue en pleine fête du Tabaski (Aïd-el-adha) et a empêché les tchadiens de respecter la tradition en allant visiter leur famille. Cette hausse brutale du coût de l’essence est à ajouter à la cherté exponentielle de la vie (7 % d’inflation l’année dernière), où même les produits de première nécessité deviennent inaccessibles à des habitants pour lesquels les salaires n’augmentent pas.

 

Ce prix exorbitant de l’essence est à mettre en comparaison avec le coût du carburant dans d’autres pays africains producteurs de pétrole. Au Gabon, il demeure relativement stable, oscillant entre 430 et 480 Francs CFA, de 3 à 4 fois moins cher. Au Congo, il fluctue entre 540 et 595 Francs CFA pour le super et 400 à 475 Francs pour le gasoil. Prenons maintenant un pays non-pétrolier tel que le Togo : le coût du super est de 655 Francs, bien loin de l’inflation que connaît actuellement notre nation. Pourtant, lorsque la raffinerie de Djarmaya a été inaugurée en 2011, les autorités et au premier rang desquels Deby avaient promis un prix de l’essence inférieur à 500 Francs CFA. Trois ans plus tard, le constat est accablant. La raffinerie a fermé à plusieurs reprises et n’a jamais été capable de fournir la quantité suffisante de pétrole transformé pour atteindre un tel niveau de prix. Mais il y a plus grave : cette augmentation subite est à mettre sur le compte de proches de pouvoir, et notamment d’Haoua Daoussa Deby, DGA de la raffinerie. Ceux-ci stockent des citernes d’essence, afin de créer artificiellement une augmentation des prix en jouant sur les lois de l’offre et de la demande. Ils font également commerce de certaines citernes avec la Centrafrique, où la demande est encore plus forte et les prix plus élevés. On assiste donc à une véritable prédation des biens de première nécessité par des personnes gravitant autour du chef de l’Etat, sur le même modèle que celui qui a prévalu lorsque le frère de Deby, Daoussa, a sciemment coulé la Compagnie sucrière pour importer son propre sucre du Soudan, à des tarifs beaucoup moins compétitifs.

 

Le Mouvement du 3 février (M3F), principale force d’opposition constructive à la dictature de Deby, se joint de toutes ses forces à la journée « ville-morte » décrétée par de nombreux mouvements de la société civile et appelle ses militants de Ndjamena à participer à cette opération, afin que le régime comprenne qu’il ne pourra indéfiniment s’enrichir au détriment d’une population de plus en plus exsangue.

 

Fait à Londres le 8 octobre 2014,

 

Collectif

 

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