La junior britannique Savannah Energy essaye de ne pas perdre pied au Tchad, où les tribunaux multiplient les décisions bloquant son rachat des actifs d’ExxonMobil.

Le tribunal de grande instance de N’Djamena a confirmé, le 25 janvier, une décision prise en première instance le 14 décembre, suspendant le transfert des actifs d’ExxonMobil à Savannah Energy sur les gisements de Doba. La Société des hydrocarbures du Tchad(SHT, qui détient 40 % dans les mêmes champs) représentait l’Etat dans la procédure au titre de son droit de préemption qui n’aurait, selon elle, pas été respecté.

Tous les expatriés de Savannah Energy – moins d’une dizaine – ont été expulsés mi-décembre après la première décision judiciaire. A la demande de Savannah Energy, la Chambre de commerce internationale (CCI) de Paris avait toutefois considéré ce jugement illégal dans un arbitrage d’urgence rendu le 7 janvier (AI du 10/01/23), que la SHT conteste. Depuis lors, Savannah Energy, conscient de la difficulté liée à l’impossibilité de faire revenir le moindre expatrié au Tchad, tente de reprendre contact avec la junte dirigée par Mahamat Idriss Déby et son proche collaborateur, le directeur de cabinet Idriss Youssouf Boy.

Le ministre rassure les employés tchadiens

En attendant, le pouvoir assure auprès des quelque 250 salariés, présents sur les sites de production en jeu dans l’affaire, que rien ne change et qu’il n’y a aucune raison de s’inquiéter. Conscients de l’importance de nouer des bonnes relations avec les employés tchadiens, le ministre du pétrole, Djerassem Le Bemadjiel, et le secrétaire général de la présidence, Gali Ngothé Gatta, se sont déplacés à Komé (centre névralgique de la production estimée à 19 000 b/j), le 13 janvier, afin de leur assurer que leur emploi serait sauvegardé et les activités pérennisées. Ils s’y étaient déjà rendus le 22 décembre.

La position très ferme du gouvernement contre Savannah ne semble pas uniquement liée aux relations dégradées de la junior avec le pouvoir. Certains employés font part de leur crainte que l’arrivée de Savannah change les méthodes de travail et diminue la part de sous-traitance afin de réduire les coûts. Les salariés, dont certains ont plus de vingt ans d’ancienneté, voient d’un mauvais œil ces potentielles évolutions impulsées par d’anciens collaborateurs de la junior française Perenco officiant désormais au sein de Savannah Energy, qui se montreraient très attentifs au moindre coût.

Le directeur de la filiale tchadienne de Savannah Energy, Nicolas de Blanpré, basé à N’Djamena, est par exemple un ancien de la firme dirigée par la famille Perrodo. Il n’a cependant pas été directement confronté aux salariés, étant davantage chargé de la relation avec le gouvernement – tout du moins avant son expulsion en décembre 2022. Son supérieur hiérarchique, le directeur des opérations Antoine Richard, est également un ancien de Perenco, pour qui il a dirigé les filiales du Cameroun, de RDC et du Venezuela, entre 1993 et 2015, après un début de carrière chez TotalEnergies.

Tchadanthropus-tribune avec Africa intelligence

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