Le document n’avait jusqu’ici pas été rendu public. Succès Masra y est accusé de « tentatives d’atteinte à l’ordre constitutionnel, atteinte à l’autorité de l’État, incitation à la haine et à un soulèvement insurrectionnel, atteinte à l’intégrité du territoire national, atteinte contre les institutions de l’État » (sic).

Signé le 8 juin dernier par le procureur général de la République, Mahamat Elhadj Abba Nana, ce mandat d’arrêt international transmis à l’agence Interpol réclame l’arrestation et l’extradition de l’opposant tchadien, lequel est « susceptible de se rendre aux États-Unis, en Côte d’Ivoire et en France, à des fins de poursuites judiciaires ».

« Aux armes citoyens »

Succès Masra, précise le document, « a demandé aux frères du Sud de s’armer contre l’État tchadien en employant plusieurs fois les termes “Aux armes citoyens” dans des messages sur les réseaux sociaux. » Ceux-ci « vont à l’encontre de la cohésion sociale tout en violant les dispositions légales [et] ne pourraient rester impunis », ajoute le procureur général.

Ce mandat d’arrêt international fait suite à une requête du procureur du tribunal de grande instance de N’Djamena, Oumar Mahamat Kedelaye. Celui-ci avait engagé des poursuites contre Succès Masra, avant de solliciter le procureur général de la République afin qu’il saisisse Interpol et réclame l’arrestation de l’opposant à l’étranger.

Si le mandat a bien été émis en juin, il n’a cependant pas été appliqué. Succès Masra a en effet séjourné à la fois aux États-Unis et en France – il avait d’ailleurs rendu visite à la rédaction de Jeune Afrique –, sans être inquiété et sans que ces pays ne fassent procéder à son arrestation par leurs services de police.

Pourparlers pour un retour

Succès Masra a récemment annoncé son ambition de revenir prochainement au Tchad, la date du 18 octobre ayant pour le moment été retenue. En exil depuis les manifestations meurtrières du 20 octobre 2022, il espère participer aux commémorations des événements et reprendre place dans la transition dirigée par le président Mahamat Idriss Déby Itno. Depuis, les conditions de son retour font l’objet de pourparlers entre les autorités de N’Djamena et l’opposant.

Ce dernier a d’ailleurs envoyé, ce 5 octobre, le détail de son projet de fin d’exil au ministère de la Sécurité publique. Il demande à ce dernier de prendre les « mesures sécuritaires » nécessaires pour « faciliter [son] accueil » à son arrivée à l’aéroport de N’Djamena, « le 18 octobre 2023 à 12h30 ». « Si l’objectif est de m’arrêter, la meilleure manière de le faire serait d’attendre que je rentre. L’itinéraire, le vol et le jour de mon arrivée leur ont été communiqués », explique Succès Masra à Jeune Afrique.

À N’Djamena, le Premier ministre Saleh Kebzabo est l’un de ses adversaires et n’a jamais fait mystère de sa volonté de voir son cadet faire face à la justice. Mahamat Idriss Déby Itno, qui garde la main sur le dossier, pourrait cependant choisir de jouer la carte de la réconciliation. En 2022, le nom de Succès Masra – qui vise la présidentielle à venir en 2024 – avait été évoqué pour le poste de Premier ministre, avant que celui-ci ne soit occupé par Albert Pahimi Padacké, puis par Saleh Kebzabo.

Jeune Afrique

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