Le ministre de l’Urbanisme et de l’aménagement du territoire, Gata NGoulou (GN) est au coeur de la controverse dans l’attribution de terrain sur la corniche de la capitale tchadienne, N’Djamena. Qui est Gata NGoulou? Agit-il dans l’intérêt public? Ou est-il plus préoccupé par ses intérêts personnels? Ceux de sa famille et des amis? Bénéficie t-il de la protection du président Deby Itno? Profite-il de son prestige d’ex-banquier pour rafler, par l’intermédiaire de ses associés, des gros contrats publics? Enquête. 

 

Originaire de la région du Moyen Chari, la soixantaine bien entamée,  GN a fait ses études secondaires chez les réputés pères jésuites du Collège Charles Lwanga à Sarh, au sud du Tchad. Ensuite, il a continué une partie de sa formation au Cameroun pour la terminer en France. Diplôme de maitrise en Statistique en main, il décide de rentrer au pays.  De retour, il a, dit-on, été parrainé par feu Joseph Yodeïman pour rejoindre la BEAC. Sérieux, travailleur et poli, il est apprécié par sa hiérarchie. Très vite, il gravit les échelons.  De 1998 à 2008, il  devient même  le Secrétaire Général de cette prestigieuse institution régionale. Un poste très convoité. A plusieurs reprises, le président tchadien Deby Itno a tenté de le coopter. Refus catégorique du défunt président gabonais Oumar Bongo. C’est son protégé. Peu après la mort de ce dernier, il rentre à N’Djamena. Il dirige tour à tour des ministères importants: celui des Finances, des Infrastructures (grands travaux) et du Domaine foncier. Il a aussi été Directeur de Cabinet Civil à la présidence tchadienne. Plusieurs sources affirment que GN traine avec lui plusieurs casseroles. Retour en arrière… 

 

Novembre 2009, l’hebdomadaire Jeune Afrique publie une enquête dévastatrice au titré fracassant: Hold-up à la BEAC. 19 milliards de F CFA (30 millions d’euros) sont détournés au Bureau extérieur de Paris (BEP) en France entre 2004 et 2008.  Comment ? par qui ? et pour le compte de qui ? le détournement a eu lieu s’interroge JA. Le nom du tchadien Gata NGoulou revient plusieurs fois. A l’époque, il était la tête pensante de l’ex-gouverneur Mamalepot. Toutefois, l’enquête dit qu’il n’a pas tiré de bénéfice financier. Mais sa responsabilité dans le dysfonctionnement du système à l’origine du détournement s’est avérée vrai. Plus tard, un audit et les chefs d’états de l’Afrique centrale confirmeront cela.


http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAJA2540p024-030.xml0/banque-detournement-de-fonds-beac-rigobert-roger-andelyexclusif-hold-up-a-la-beac.html

 

En février 2010, dans une entrevue à JA, M. NGoulou rejette les accusations du rapport de l’audit. Il affirme: » un complot délibérément orchestré cherche à faire de moi l’un des boucs émissaires. L’audit a été biaisé. On a servi des conclusions erronées aux chefs d’État. » Il dit bénéficier de la confiance du président Deby Itno. 


http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAJA2560p036-037.xml1/ministre-interview-detournement-de-fonds-beacbeac-gata-ngoulou-continue-de-beneficier-de-la-confiance-du-president.html

 

Au moment de publier cet article, GN, bénéficie toujours du soutien sans faille du président. Plusieurs sources du Miroir affirment que  son retour au Tchad est en partie lié à ce scandale. « Il a été presque exfiltré par le président Deby après la mort de Bongo, père. N’oubliez pas que votre président l’a lui même dit qu’il doit tout au défunt Bongo. Ceci expliquerait-il cela? Je vous laisse deviner » nous dit au téléphone notre interlocuteur, ex-cadre à la BEAC.

 

Depuis son engagement en politique, l’étoile de GN ne semble pas pâlir auprès du président. » Gata est très intelligent. Il a bluffé tout le monde y compris le président en faisant croire qu’il est un politicien d’une autre catégorie. Un politique investisseur qui ne s’engage pas pour s’enrichir. Il est déjà riche », affirme un ancien ministre. Un petit coup de sonde (non scientifique) effectué à N’Djamena, révèle à notre rédaction que du banquier respecté suscitant la fierté de ses compatriotes, GN passe de plus en plus pour un oligarque du régime. Certains barons du pouvoir soutiennent qu’il est mêlé à des investissements louches financés par l’argent public. Ils donnent au Miroir l’exemple de la Fibre optique. « Ça fait des années qu’on parle de la fibre optique. Où sont les résultats? C’est une catastrophe », disent-ils.

 

De toute évidence, GN suscite beaucoup de jalousie au sein de l’écurie du parti au pouvoir. Bon banquier, politicien un peu terne mais redoutable homme d’affaire. Il a investit dans l’immobilier, l’hôtellerie et la restauration. Il a placé à la tête de ses affaires les membres de sa famille et ses amis. Surtout ses enfants. Son hôtel restaurant, Le Selasao situé au quartier Sabangali est l’endroit le plus prisé par les nantis de la capitale. Sa fille Kitoko semble aussi prospère que son père en affaire. Elle vient de lancer un Magazine dénommé Excellence. Il est dédié aux africains qui réussissent en affaire. Plusieurs sources affirment qu’elle gère une grande partie des affaires de son papa. Entre autres : une agence de communication et d’organisation d’événements culturels. 

 

GN a-t-il  jeté son dévolu sur le quartier Sabangali? Oui affirment plusieurs sources. A notre question: Pourquoi? « Parce que ce coin de la capitale fait l’objet d’énormes investissements pour accueillir le sommet de l’Union Africaine l’an prochain », disent nos interlocuteurs. Un complexe hôtelier est en phase de finition. Un projet d’une quarantaine de villas est en construction etc. Sabangali est en pleine métamorphose. 

 

De plus, au sujet de Sabangali, le site Tchadanthropus a révélé, documents à l’appui, ce qu’il faut désormais appelé « l’affaire de la Corniche ». Grace à l’accord du ministre, certains membres du gouvernement, leurs amis et la famille du président se sont partagés plusieurs lots de terrain. L’information à été reprise et dénoncée par le site Tchadoscopie. L’ébruitement de cette histoire sur le Net a provoqué, dit-on, une commotion à N’Djamena. Et a rallumé le mécontentement des anciens expropriés d’une autre partie du quartier. Ils veulent voir des têtes tombées et obtenir pleine compensation. Pour crédibiliser leurs revendications, ils ont crée une association pour mieux se défendre. Déjà, une lettre express à été envoyée au président Deby Itno.


https://www.letchadanthropus-tribune.com/article-4968-554.html
http://www.tchadoscopie.com/2014/07/tchad-la-liste-noire-des-ministres-et-anciens-premiers-ministres-predateurs.html

 

À son retour des vacances, le président a semble t-il lancé une première petite interrogation  » qu’est ce que ce que cette histoire de terrain à Sabangali » dit son entourage. Si tôt rentré, si tôt reparti aux USA pour le sommet Afrique-Etats-Unis, la présidence affirme que le président s’en occupera à son retour. Plusieurs membres de la société civile disent que de cas comme celui de la corniche sont légions. 

 

Cette affaire de corniche met GN dans une mauvaise posture. Bénéficiera t-il de l’appui du président? Dans la capitale tchadienne on parle déjà d’un futur remaniement ministériel dès le retour du président. « Les cornichards » seront-ils exclus du gouvernement? Gata NGoulou, le premier responsable sera t-il muté de son ministère? Ou purement écarté? Des informations contradictoires circulent. Elles s’amplifient, se modifient au gré des intérêts des uns et des autres. GN, lui, est serein affirme ses proches. 

 

Dans un article de RFI, le ministre affirme qu’il n’est pas question dans cette affaire d’installer des citoyens à la place d’autres. Parce que le terrain dont il s’agit est un lot inhabité. Il dit assumer la responsabilité de la distribution de terrains : « la petite poche qui est concernée est en réalité celle qui a, un moment donné, abrité un zoo qui a disparu. Aujourd’hui, c’est un espace vague où personne n’habite. L’urgence de mettre de la propriété, de la sécurité avant la tenue du sommet, nous oblige à faire un choix de tout ce qui peut occuper ces lieux », dit-il. Confiant, le ministre a profité pour annoncer des futurs déguerpissements pour qu’il n’y ait plus de quartier populaire autour du centre de conférences en construction. 

 

Bello Bakary Mana

Source : LeMiroir

 

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