En première ligne au Sahel, ainsi que sur les frontières libyenne et centrafricaine, le Tchad juge insuffisante l’aide qu’il perçoit de la France, qui a amorcé son retrait de la région, et surtout de l’Union européenne. A tel point que N’Djaména envisage de réduire son déploiement au Niger, dans le Liptako-Gourma.

Le message a été successivement passé à la ministre française des armées Florence Parly par son homologue tchadien, le général Daoud Yaya Brahim, en visite à Paris le 29 juin, puis par le président tchadien Mahamat Idriss Déby lui-même, reçu par Emmanuel Macron à l’Élysée le 5 juillet pour préparer le prochain sommet du G5 Sahel qui se tiendra en visio-conférence le 9 juillet. Au regard de son engagement, à la fois dans le G5 Sahel, mais également sur les frontières libyenne et centrafricaine, le nouveau leadership tchadien estime que son armée est insuffisamment soutenue, que ce soit en matériel, en financement ou en formation, par la France et l’Union européenne.

Le contraste avec le Mali, récipiendaire de matériels et de financements importants de Bruxelles, est particulièrement mal vécu à N’Djamena, à tel point que les différents responsables tchadiens ont ouvertement évoqué avec leurs homologues français la possibilité de réduire l’ampleur de leur déploiement dans la région du Liptako-Gourma, située à cheval entre le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Déployé en février et partiellement financé par l’Union européenne, dont la Task Force Takuba est présente dans la même région, le contingent tchadien pourrait, selon les scénarios évoqués par les responsables tchadiens avec leurs homologues français, rapidement passer de 1 200 à 700/800 hommes.

Un message reçu cinq sur cinq par Paris : quelques heures seulement après son entretien avec le président tchadien, Emmanuel Macron a annoncé « à échéance rapprochée une nouvelle aide budgétaire » au Tchad, ainsi qu’un appui à la renégociation de sa dette. Selon nos informations, le montant de cette aide devrait avoisiner les 15 millions d’euros. Une mission de la Direction générale du Trésor devrait se rendre à N’Djamena dans les prochaines semaines pour évaluer les besoins les plus pressants, et le décaissement devrait intervenir le mois suivant, sur la base des recommandations de la mission.

Reconfiguration de la coopération militaire

Lors de leur entrevue à l’Hôtel de Brienne, le général Brahim, accompagné pour l’occasion du chef d’état-major de l’armée de l’air Idriss Amine Ahmed, a expliqué à Florence Parly que la coopération militaire française, qui porte notamment sur la fourniture de véhicules décommissionnés par la France à l’armée de terre tchadienne, ne répondait pas aux besoins du pays (la France couvre également les frais de carburants de l’armée tchadienne, forces aériennes comprises).

Idriss Amine Ahmed, qui a détaillé à Florence Parly le concept d’opération aérienne qu’il met actuellement en place sur les frontières du pays en liaison avec son homologue nigérien (AI du 28/06/21), lui a expliqué, ainsi qu’à son homologue français, le général Philippe Lavigne, qu’il a rencontré séparément, que les futurs pilotes des avions de reconnaissance tchadiens allaient avoir besoin de formation, et qu’une aide de la France dans ce domaine serait appréciée.

Le message a été d’autant mieux reçu par la ministre française que les responsables militaires tchadiens n’ont pas fait mystère de leur volonté d’équiper leurs deux Cessna 208B avec de l’équipement ISR Safran, et qu’ils ont informés leurs interlocuteurs français qu’ils avaient également signé un contrat d’accompagnement sur la digitalisation de leurs forces aériennes avec la société Griffon Aerospace Middle East du pilote français Habib Boukharouba.

Après Mahamat Idriss Déby, le président du Niger, Mohamed Bazoum, devrait également se rendre dans la capitale française ce 9 juillet pour rencontrer Emmanuel Macron.

Tchadanthropus-tribune avec la Lettre du Continent

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