11 mai 2014 TCHAD/Affaire Ibni : le Sénateur français Jean-Pierre Sueur « décidé de ne pas laisser étouffer le dossier »
En mars 2010, ils font voter une résolution par l’Assemblée nationale. Le texte, adopté à l’unanimité, demande au gouvernement français de s’engager auprès du Tchad pour que la lumière soit faite.
Les deux parlementaires multiplient les démarches auprès du ministère des affaires étrangères de l’Elysée, de la justice tchadienne, des Nations unies. Le pouvoir français les assure de son soutien, mais rien ne semble avancer.
« Aujourd’hui, nous avons décidé de reprendre l’initiative parlementaire afin de ne pas laisser étouffer le dossier », explique Jean-Pierre Sueur dans son bureau du Sénat. Début février, les deux sénateurs socialistes ont demandé l’ouverture d’une commission d’enquête en France.
Cette fois, il s’agit d’entendre les officiels français présents à N’Djamena en février 2008.« Une présence française – militaire, diplomatique mais aussi policière – était alors manifeste. Le rôle joué par certains ressortissants français doit être expliqué », poursuit Jean-Pierre Sueur.
« Le centre opérationnel était à la présidence où se tenaient notamment le chef de l’Etat, les militaires français (…) », expliquait, en 2008, à la commission d’enquête l’ancien ministre tchadien de la défense, Mahamat Ali Abdallah Nassour, chargé à l’époque decoordonner les opérations militaires.
Certains Français ont-ils été informés de l’enlèvement des opposants ? Et si oui, à quel moment ? « Dès le 3 au soir, l‘ambassadeur était au moins informé de la disparition de Lol, rappelle un journaliste présent lors des événements, pourquoi ne pas avoir demandé à rencontrer les autres ténors de l‘opposition ? »
Autre interrogation : les propos tenus le 5 février par l’ambassadeur de France au Tchad, Bruno Foucher, à des journalistes :« On ne peut pas confirmer ces arrestations. On se renseigne. Mais je sais qu‘il y a eu collusion entre des opposants politiques et les rebelles. »
D’où venaient de telles informations ? Les autorités tchadiennes auraient-elles pu s’enservir pour décider de la rafle ? Auditionné en 2010 à Paris par la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale, Bruno Foucher modérait ses propos : « Il n‘existe pas de collusion avérée. »
Les proches d’Ibni Oumar Mahamat Saleh savent que le rapprochement actuel entre la France et le Tchad est une difficulté supplémentaire. Depuis sa participation aux opérations militaires au Mali et en Centrafrique, Idriss Déby est un allié incontournable.
« Nous ne voulons pas interférer dans les relations entre la France et le Tchad, souligne Gaëtan Gorce, mais il n‘est pas imaginable que la France se désintéresse de ces événements. »
LE MONDE
Par Charlotte Bozonnet (N’Djamena, envoyée spéciale)
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