Si Idriss Déby était un acteur de théâtre, il aurait sans doute adoré cette réplique des Mains sales de Jean-Paul Sartre : « Moi j’ai les mains sales. Jusqu’aux coudes. Je les ai plongées dans la merde et dans le sang. Et puis après ? Est-ce que tu t’imagines qu’on peut gouverner innocemment ? » Il l’aurait répété partout à Londres, à Paris, à Nouakchott, partout où il vient de poser ses belles chaussures vernies, recueillant à chaque fois les applaudissements d’une foule conquise. Il aurait particulièrement excellé dans certains rôles, surtout ceux des dictateurs avides de sang et de pouvoir, Caligula de Camus, Richard III de Shakespeare, Créon dans l’Antigone d’Anouilh.
 

Sauf que la vie n’est pas une pièce de théâtre et que le sang qui brille sur les mains de Déby n’est pas du jus de tomate fabriqué dans les studios d’Hollywood. Car le dictateur du Palais Rose, après avoir assassiné consciencieusement ses opposants les plus brillants tels qu’Ibni Oumar Mahamat Saleh, Joseph Behidi ou Bichara Digui, après avoir pillé méthodiquement les ressources pétrolières de son pays, n’était pas encore rassasié. Non, il lui fallait étendre son empire machiavélique. C’est pourquoi il a lancé à l’assaut de la Centrafrique une horde de mercenaires assoiffés de meurtres et de rapines, cette même horde de mercenaires qui a allumé l’étincelle des terribles violences interreligieuses que nous connaissons aujourd’hui, suscitant des réactions non moins violentes des terribles anti-balaka. Et demain, à qui le tour ? Au Cameroun, qui voit des éléments manipulés par N’djamena s’infiltrer sur son territoire ? Le Nigeria, où le pouvoir soupçonne Idriss Déby de financer Boko Haram ? La RDC, où des mercenaires sont recrutés pour venir renforcer le chaos en RCA ? Le Niger, une vraie démocratie, au contraire du Tchad ?
 

Et pendant ce temps-là, Idriss Déby continue sa tournée qu’il croit triomphale, cachant derrière son dos ses mains gluantes d’hémoglobine comme un petit enfant ayant mangé trop de chocolat.
Incroyable d’audace et de morgue, il demande à l’ONU de lui donner plus des moyens pour rétablir la paix en RCA, feignant d’oublier qu’il est lui-même à l’origine du conflit. A Nouakchott, il participe à la création du G5, groupement d’Etats contre le terrorisme, alors qu’il se pose lui-même comme le premier terroriste de la sous-région. Le tout en faisant croire que son pays est devenu un havre de paix et de liberté, alors que la situation des Droits de l’Homme y est absolument catastrophique (139ème au dernier classement de Reporters sans frontières sur la liberté de la presse, en net recul).
 

Mais ne nous y trompons pas, ses alliés d’aujourd’hui, et en premier lieu la France, ne sont pas aveugles. Ils voient bien que le régime d’Idriss Déby est un poison toxique, non seulement pour son propre pays mais aussi pour la stabilité à la fois du Sahel et de l’Afrique Centrale. La peur seule d’un chaos suivant sa chute empêche encore les puissances occidentales de se retourner contre ce tyran infâme. Alors, le M3F est ici pour les rassurer : une alternance existe et elle est prête à prendre la relève au Tchad, sans que notre pays ne devienne une nouvelle Libye, un énième repère pour djihadistes. Et nous avons confiance dans les gouvernements voisins, dans les puissances occidentales pour prendre acte de cette possibilité d’alternance et pour décider dans les mois à venir de cesser son soutien à celui qui opprime la terre de Toumaï depuis bien trop d’années. Ils feront alors preuve de l’humanité et de la compassion qui leur ont bien trop souvent fait défaut.
 

Pour que vive le rêve d’Ibni et pour que vive le Tchad libre !

Fait à Orléans (Coligny) le 19 février 2014,
 Collectif 
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